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1940 - 348e CACC

348e Compagnie Autonome

de Chars de Combat

 


La compagnie est constituée le 18 mai 1940 à Guyancourt. Elle quitte Versailles dans la nuit du 19 au 20 mai en direction de Pierrefitte où elle passe la nuit et la journée du 20. A partir de cette date, les déplacements des chars s'effectuent sur chenilles.
Matériel : 14 chars B1 bis

432 KLEBER
489 DAVOUT
??? LA SALLE
429 MARCEAU
528 Maréchal LEFEVRE
427 LA FAYETTE
530 NEY
433 MASSENA
527 CAMBRONNE
220 PARIS
428 HOCHE
227 BORDEAUX
233 NICE
259 TERRIBLE

Bataille d'Abbeville 4 juin 1940
A 3 heures 20 la compagnie débouche de son P.D., en colonne, sur la droite par section de trois chars :
dans l'ordre : BORDEAUX, NICE, Maréchal FEFEVRE, KLEBER, char du capitaine.
En deuxième échelon : NEY, LAFAYETTE, TERRIBLE
A 3h30 la section du Lieutenant Mathieu, premier échelon, passe la base de départ d'infanterie écossaise et se dirigea sur 01.
À 3h45, arrivant à 01, elle marque un temps d'arrêt du fait de la présence d'engins antichar.
A quatre heures, la section du Lieutenant Mathieu se dirigea sur 02. Le NICE et le BORDEAUX sautent sur un champ de mines. Seul le Maréchal LEFEVRE atteint 02 vers 4h30.
À 4h20, le KLEBER, char du capitaine, se dirigea sur la parallèle d'infanterie écossaise, fait demi-tour pour ramener les chars du deuxième échelon qui le dépassent.
À 4h35 les chars du deuxième échelon, NEY et TERRIBLE, atteignait la parallèle de départ arrivant à H +5, et se dirigent sur 01 où il sautent successivement sur le champ de mines à environ H +30.
Le LAFAYETTE descend sur la droite, suit la route d'Abbeville et est arrêté par un 105 allemand (à H +45).
Le KLEBER passe la parallèle de départ à H +15, poursuit sa route de sur 01 et dépasse la ligne d'infanterie anglaise arrêtée par les armes automatiques ennemies ; laissant sur sa gauche les deux chars déjà sautés sur le champ de mines, poursuit sa route sur 02, laissant derrière lui les deux chars du deuxième échelon est atteint 02 vers 5h10. Après avoir dépassé le Maréchal LEFEVRE, il poursuit sa route sur les contre-pentes nord-est de l'éperon du Mont Caubert. Il est la cible d'un violent tir d'artillerie et dépasse trois lignes de résistance allemande en y causant des pertes importantes en matériel et en personnel.
A 5h30, se dirigeant à l'aide du compas VION, il revient sur 02, rameuter le Maréchal LEFEVRE et est pris à partie par les chars légers qui le forcent à faire demi-tour. Il repart sur 02 et enfin rejoindront la position de ralliement à 6h15.
Le commandant des forces anglaises signale un emplacement d'armes automatiques non réduites entre 01 et 02.
Le KLEBER repart à nouveau, dépasse 01 et atteignant 02, neutralise sur son chemin les armes indiquées. En revenant sur la position de ralliement, il rallie le Maréchal LEFEVRE.
Le char CAMBRONNE en panne au départ, rejoint la position de ralliement vers 6h50.
Les armes antichars ayant été signalées en lisière est du bois de Villers, le KLEBER et le CAMBRONNE sont chargés de les réduire en allant se poster à proximité. Mission accomplie à 7h30.
Chars rentrés : KLEBER, CAMBRONNE, Maréchal LEFEVRE.
Chars sautés sur mines : NICE, BORDEAUX, TERRIBLE, NEY.
Char arrêtés par les armes antichar : LAFAYETTE.

Sources : Archives du SHAT Vincennes.

1940 - 347e CACC

 

347e Compagnie Autonome

  de Chars de Combat

 

                

La compagnie est constituée du 15 au 19 mai 1940 à Versailles sous le commandement du capitaine Legraverend. Constituée officiellement le 17 mai. Elle quitte Versailles dans la nuit du 19 au 20 mai en direction de Pierrefitte où elle passe la nuit et la journée du 20. A partir de cette date, les déplacements des chars s'effectuent sur chenilles. La compagnie laissera 6 chars en panne au cours des déplacements.
Dans la nuit du 20 au 21, la compagnie se porte dans la forêt de Senlis où elle reste jusqu'aux 22.
Le 22 mai, à 13 heures, la compagnie reçoit un ordre la rattachant à la 2e D.C.r. (P.C. à Orruy).
À 22 heures, la compagnie quitte la forêt de Senlis pour Gury.
Ce mouvement est gêné par l'encombrement des routes et la colonne de chars ne dépassera pas Henevillers.
23 mai : à 20 heures la compagnie fait mouvement vers le Plessier de Wangny. Elle y reste jusqu'au 27 mai.
28 mai : à 18 heures, la compagnie se met en route pour Guerbigny. Elle est rattachée au 8e bataillon de chars. À 23 heures elle quitte Guerbigny pour Quiry le Sec.
29 mai : La compagnie arrive à cinq heures et en repart à 10 heures pour Bonneuil les Eaux où elle arrive à 15 heures. À 16 heures elle repart en sens inverse pour Estrainvillers qu'elle atteint à deux heures le 30 mai.

La compagnie séjourne les 30 et 31 à Estrainvillers.
1er juin : la compagnie part à 0 heures pour Lignières qu'elle atteint à 4h30. À 21 heures elle repart pour le bois de Neuville sur Leuilly.
2 juin : le bois est atteint à 5 heures. La compagnie repart le soir même à 23 heures et gagne les bois de la Cavette.
3 juin : la compagnie se porte à partir de 22 heures sur Grebaumesnil pour y prendre des positions de départ. Il reste trois chars sur 14. Ils sont mis à la disposition du 8e bataillon de chars pour former une compagnie de marche qui participera à l'attaque du 4 juin sur Abbeville. Les cinq autres chars B sont envoyés à l'élément d'atelier en forêt d'Eu pour réparation.

Le lieutenant Fèvre commande l'élément d'atelier.
Le lieutenant Philibeaux prend le commandement de l'échelon qu'il ramènera par étapes jusqu'à Montfayon (Creuse).
Dans la journée du 5 juin, les chars PROVENCE, VENDEE, NANCY sont réparés. Le 6 juin à 20h, l'échelon est replié en direction de … où l'élément reste encore le 7 juin conduit par le sous-lieutenant N…
Le char PROVENCE remorque le NIVERNAIS, le VENDEE remorque le BEARN, le NANCY remorque
Le 9 juin le VENDEE tombe en panne. Le pilote Grenier et l'aide pilote sont tués par un fusil mitrailleur français qui croit avoir affaire à un char ennemi. Le sergent Lafleur est blessé.
Le 10 juin le char PROVENCE est détruit par un antichar allemand et le personnel est fait prisonnier à Rozay.
Le 12 le sous lieutenant Berlin et le sergent Noret sont faits prisonniers à Saint Valéry en Caux en même temps que tout ce qui reste de la 2e D.C.r.

Personnel

Le personnel est composé des éléments les plus disparates (Ecole des chars, 505e , 106e et 108e bataillons, dépôt 503 et 511) dont 50 % sont totalement inexpérimentés.
Effectif : 230 sous-officiers, caporaux et chasseurs
1 section de commandement
4 sections de combat
1 section d'échelon
1 élément d'atelier de bataillon
L'encadrement composé uniquement d'officiers de réserve était de première qualité.


Matériel

 

13 chars, 10 chars B1, 3 chars B1 bis. (effectifs indiqués par le rapport du Lt Philibeaux mais le rapport du Cdt Girier indique 14 chars).

371 AVIZE
119 BEARN
117 VENDEE
133 NIVERNAIS
109 NANCY détruit le 9 juin à Mesnières
111 DUNKERQUE détruit le 8 juin à Neuvy sur Loeilly
110 BELFORT
103 LORRAINE
403 CRECY au MONT Lieutenant Blondelet détruit le 4 juin à Abbeville
106 METZ
118 AUVERGNE
121 BOURGOGNE
251 FANTASQUE détruit le 6 juin à Rambures

58 véhicules sur roues.
Le matériel char était du matériel d'instruction déjà usé. Il en est résulté que trois chars seulement sur 14 sont arrivés à pied d'œuvre pour l'attaque d'Abbeville.
Les échelons restants constitués par du matériel neuf ont donné toute satisfaction à l'exception des sides Terrot.

Mouvement de l'unité.
La compagnie s'est usée sur la route. Son matériel était en panne, au bout de course lorsqu'elle est arrivée à pied d'œuvre pour être engagée. Le personnel roulait la nuit et passait sa journée à réparer et à remettre en état le matériel.
Lors du repli de l'échelon, les attaques aériennes ont occasionné des pertes sensibles (deux tués, cinq blessés, quatre véhicules détruits).

Rapport du capitaine Legraverend commandant la 347e CACC
Le détachement Berlin
Le 3 juin 1940, cinq appareils de la 347e compagnie de chars de combat, de la 2e Division Cuirassée, ne peuvent pas prendre part à l'attaque de la tête de pont d'Abbeville le 4 juin, en raison de leur mauvais état mécanique. Ils sont envoyés pour réparation à la compagnie d'échelon 8/15 installés en haute forêt d'Eu.
Le 5 juin, sous la menace de la poussée ennemi, la C.E. 8/15 doit évacuer la haute forêt d'Eu alors que les cinq chars ne sont pas remis en état. Les équipages, sous la direction du sous-lieutenant Berlin et de l'adjudant chef Kouton, ne voulant pas abandonner leurs chars, travaillent jour et nuit pour les remettre en état, malgré les bombardements répétés de l'aviation (6 juin : cinq heures, 15 heures, 18 heures, 21 heures).
Dans la nuit du 6 au 7, n'étant plus couverts par aucune troupe, les chars se replient, trois seulement pouvant rouler par leurs propres moyens, doivent remorquer les deux autres.
La lenteur obligée de leur marche ne leur permet pas de rejoindre les éléments arrière de la 2e D.C.r.. La rapidité de la progression et la nuit les poussait vers la côte en direction de Forges les Eaux - Rouen.
A Neamères, le char NANCY tombe en panne de terrain et doit être abandonné. Son équipage (adjudant chef Mouton, sergent Rosquoët, caporaux Lapierre et Monteau) le fait sauter et réussit à rejoindre la compagnie au sud de Paris, par Rouen, le Havre et le bac du Hode.
Complètement isolé de la division, le sous-lieutenant Berlin se met le 9 juin à la disposition de l'état-major de la cinquième division de cavalerie qui le charge d'organiser la défense de son P.C.
Les chars BEARN, NIVERNAIS qui ne peuvent plus rouler par leurs propres moyens, sont disposés à la corde est de la forêt de Saint Saëns, devant Martincamp. Les pilotes (sergents Lecaffeux et Baddoin, caporal-chef Noumier) assurent la défense de ce point d'appui, avec les armes des chars et de concert avec un peloton du 12e chasseurs à cheval. Le 10 juin à neuf heures, l'ordre de repli est donné. Ils font sauter les deux chars et s'assurent de leur destruction totale ; ils tentent de se sauver mais trouvent tous les ponts de la Seine sautés et les rives gardées. Ils se cachent chez des paysans, mais sont finalement capturés, le 22 juin.
Les chars VENDEE et PROVENCE assurent la défense du P.C. des Petites Tentes dans la forêt de Saint Saëns (5e division de cavalerie).
Le 9 juin le VENDEE tombe en panne. Pendant que les équipages tentent de dépanner il est pris sous le feu d'engins motorisés.
Le char PROVENCE formant équipage avec le VENDEE est engagé deux fois dans la journée du 10 juin pour repousser l'avance de l'infanterie. Il est incendié en fin de journée par les antichars ennemis. Son équipage est fait prisonnier peu après.

Sources : Archives du SHAT Vincennes.

1940 - 346e CACC

Historique sommaire de
la 346e compagnie autonome de chars D2 bis
 
 
Compte rendu de l'Aspirant Sarazin

12 avril 1940
L'effectif d'un bataillon quitte le dépôt numéro 511 de Bourges pour se rendre à La Bussière (Loiret).
Personnel : jeunes mobilisés ou récupérer, quelques sous-officiers de réserve, les aspirants et des sous-lieutenants de la promotion de mars à de l'école des chars. Il s'agit de former un bataillon de B1 bis, le 108e, sous la direction du commandant Héritier.
Le 10 mai était arrivé et aucun B1 bis n'avait été livré. Au dernier moment, on avait reçu quelques FT pour instruction.

Formation de la 346e compagnie autonome.
Au 10 mai, émiettement du bataillon en formation.
- Une section B (matériel et instruction)
- Une compagnie B sous la direction du capitaine Grand
- Plusieurs détachements (FT pour la garde des camps d'aviation).
Enfin le 18 mai, formation d'une nouvelle compagnie.
250 hommes, venus pour la plupart du dépôt, sans formation, et même sans équipement.
13 aspirants ou sous-lieutenants.
Sous le commandement du capitaine Durand, venant d'un régiment régional (Nancy).
Matériel : 10 chars D2 neufs (matériel inconnu de tous).
Une compagnie d'échelon entière.
Le tout en deux trains qui partirent de Gien dans la nuit du 19 au 20. Un ordre d'attaque (nous le sûmes plus tard) était prévu pour nous le 20 à sept heures du matin !!!
Le voyage fut gêné dès l'aube du 20 (le Bourget) par des bombardements. À Villers-Cotterêts des motocyclistes venant de Gien nous apportaient les percuteurs des 47, qui, paraît-il, manquaient dans le matériel : c'était heureux, nous n'avions rien pu vérifier des canons dont nous avons pris livraison de Gien.
Bientôt des bombardements si violents qu'on nous donne l'ordre de nous mettre à l'abri dans le tunnel de Vierzy.
Le capitaine, qui avait passé son voyage à nous décrire son incapacité à diriger, à son age, une telle unité, part à la recherche d'un état-major.
Tous les jours, jusqu'au 1er juin, date à laquelle il obtint enfin la relève, il sera sur les routes.
Débarquement : à la nuit, le sous-lieutenant Lavelle et moi-même, malgré l'absence d'aide, prenons sur nous d'effectuer le débarquement.
La manœuvre est épouvantable par manque de personnel exercé nous devons mettre nous-mêmes la main à la pâte.
Aucun couvert à des kilomètres à la ronde. Le jour venait rapidement, le capitaine n'avait pas donné signe de vie.
Lavelle par voiture, au hasard, à un carrefour manque de télescoper un side : c'était celui du capitaine.
Ordre de se mettre à couvert dans un bois près de Longepont (21 mai).

Période du 21 mai au 31 mai
C'est là seulement que nous pûmes étudier un peu notre matériel (les quelques heures disponibles à Gien s'étaient passées à comptabiliser en détail le matériel des caisses à outils).
Chars neufs, non rodés. Tout coinçait (portes, attaches de chargeurs), rien de réglé (embrayage, commandes).
Pour la première fois aussi nous pûmes rendre compte de ce que contenaient les camions. À mesure de nos découvertes nous montions à bord des chars, armement, optiques, lots de bord, munitions…
Le travail de mise au point s'achevait, lorsque le capitaine commandant d'une compagnie du 19e bataillon, qui n'avait plus de chars, obtint de prendre les nôtres.
Nous rejoignîmes l'échelon du 19e B.C.C. en forêt de Compiègne, près de Pierrefonds.

Période du 1er au 9 juin
La 346e devient la 3e compagnie du 19e B.C.C.
C'est alors que le capitaine Durand obtint d'être relevé. Il fut remplacé par le capitaine Collot du 19e B.C.C. breveté d'état-major.
On nous assigne des chars d'instruction du 19e B.C.C. Au 10 mai, ils étaient en réparation à Cirey en Lorraine. Beaucoup avaient les tourelles enlevées pour changer l'armement. L'ordre de marche les avait surpris dans cet état. Ils firent route, les valides traînant les invalides et laissant des trainards le long du chemin vers la forêt de Compiègne où le 19e bataillon toucha du matériel neuf.
C'est du matériel, à demi démonté, pillé de tout outil de bord, qu'on nous donne le 2 juin. Nous avions huit jours pour le remettre en état.
Une nuit, des camions arrivèrent à notre cantonnement : il transportait des spécialistes D2, qui depuis pas mal de temps auraient dû toucher des D2 neufs. Or leurs chars nous avaient été attribués, probablement par erreur, une quinzaine plutôt. Les spécialistes venaient du 106e B.C.C., en formation en même temps que le 108e B.C.C. à quelques dizaines de kilomètres.
Le 7 juin, devant la reprise de l'offensive allemande, ordre de se rendre pour embarquement à Verberie, avec tout le matériel en état de rouler. Nous réussissons à emmener tant bien que mal, 13 chars.
Dans la nuit, descente par voie ferrée vers Creil, remontée sur Beauvais.
Le 8 juin au matin, à Saint-Sulpice (près de Beauvais) débarquement. À midi nous étions à Auneuil devant Beauvais en flammes et qui subissait un violent bombardement.
Dans la journée, étape de 25 à 30 kilomètres vers Savignies. Ce fut la marche d'épreuve de nos chars. Sur 13 chars que nous avions, 7 restèrent en route. Souvent pour des motifs futiles (canalisations rompues, pompes d'alimentation crevées). Nous n'avions aucun moyen de réparation et pas d'échelon avec nous.
Mon char, un des meilleurs, doit être abandonné au passage à niveau d'Auneuil : une bande de freins usée ne lui permettait plus de virer. Le fait avait été signalé au cours des réparations mais les pièces détachées manquaient…
Comme l'ordre était que coûte que coûte, les chefs de section devaient arriver à Savignies, je montai à bord de mon second char.

Journée du 9 juin 1940.
Le deuxième char de ma section, avec lequel j'arrivais à Savignies le 8 au soir, était assez fatigué : le train de roulement en particulier était usé (ce fut la cause mon malheur) et l'allumage était défectueux. C'était un des premiers D2 sorti et portait le numéro 2035 .
L'armement n'avait pas été modifié : 47 court.
L'équipage était formé :
du radio : Mirant André de Thaon-les-Vosges, remarquable d'initiative, de décision et de ténacité.
du pilote : Pruvost d'Arras ? qui souffrait visiblement d'être sans nouvelles de sa femme depuis le 10 mai.
Avec ce char et cet équipage nous passâmes la nuit à Savignies, en compagnie des cinq autres chars restants.
Toute la nuit, cohue indescriptible de réfugiés : une colonne double allant en sens opposé. Aucune trace de troupes à Savignies, pas plus d'ailleurs que dans tous les environs de Beauvais. Beauvais au loin brûlait.
Le 9 juin, à quatre heures du matin sans avoir dormi, ni mangé, ordre de marcher en avant. Nous devions aller à Milly aider au décrochage d'un bataillon de chasseurs.
Traversée de Savignies très pénible à cause des réfugiés particulièrement nombreux et pressés. Puis brusquement le vide total et le silence de la nature.
Traversée de Pierrefitte, où soudain se mirent à pleuvoir des 105. Puis nous nous engageons dans des chemins de terre.
Je presse mon pilote afin de ne pas être distancé. Cette marche d'approche, comme toutes les autres d'ailleurs se faisant sans cartes, il importe de ne pas perdre le fil, sinon il ne reste pour se guider, que la trace des chenilles.
D'ailleurs nous avions abandonné le chemin pour les champs. Puis ce fut la dégringolade au fond d'une gorge escarpée au risque de culbuter.
Le capitaine nous étageait en bordure d'un taillis jusqu'au fond de cette gorge. En face et assez près, une colline arrondie et boisée qui coupait toute vision !
Que venait-on faire là ? pourquoi cette position bizarre et sans issue ? Où étaient les chasseurs à faire décrocher ?
Soudain, vers six heures le capitaine donne les ordres : il fallait dégager immédiatement, nous allions être encerclés ; les chasseurs avaient décroché depuis longtemps !
Tout devenait clair !
C'est alors que, dans la manœuvre pour sortir de ce ravin, mon char perdit une chenille : elle ne se cassa pas, elle tomba à côté du char !!! Cela prouve l'état du matériel.
Le capitaine mis au courant, m'enjoint de tacher de trouver les autres éléments d'échelon et d'essayer de rejoindre une fois la réparation effectuée.
Les autres partent, nous sommes seuls ; silence total.
Huit heures. Soudain, dans un chemin de terre 500 m une colonne en marche. Je me précipite. Ce sont les éléments de dépannage lourd de l'échelon du 19e B.C.C. : ce qu'il me faut. J'explique mon cas. Refus poli, je n'avais qu'à me débrouiller.
Moralement, devant ce refus, nous étions absolument dégagés de toute obligation. Cependant pas un instant ne fut envisagé l'éventualité d'abandonner le char. Nous nous mîmes au travail immédiatement : sans outil de travail était théoriquement impossible.
À neuf heures, nouveau bruit de moteurs sur le chemin de terre : de la crête nous découvrons des voitures blindées allemandes qui patrouillent lentement. Plus de doute cette fois. On se regarde…
Sans rien dire, on se remet au travail : un seul regret, que le char ne soit pas à défilement de tourelle pour faire un carton facile. Petit à petit la méthode de travail est mise au point : il s'agit dans ce ravin plein de taillis, de démonter la chenille patin par patin, de la reformer derrière le char, de laisser couler ce dernier de son propre poids afin qu'il chenille de nouveau. Des branches gênaient : on les coupe au couteau.
Bref, après plusieurs tentatives manquées et au moment où un gros arbre allait interdire définitivement la descente libre du char, nous réussissons la manœuvre.
Restait à boucler la chenille : autre problème, compliqué par le fait qu'un terrain inégal perdait de la longueur sous le char.
Enfin on y réussit : il pouvait être six heures du soir.
Le départ. Pendant que tout s'achève, je fais une petite reconnaissance sur la crête : j'y suis accueilli par des rafales de mitrailleuse, parties de lisières assez éloignées.
Il fallait sortir de ce ravin : le char partirait-il ? en effet l'allumage était défectueux.
Démarrage magnifique. Quel enthousiasme pour tous trois de se sentir de nouveau emportés.
Désormais tout espoir était permis. Encerclés ?? qu'est-ce que cela signifiait ?!! Nous étions décidés à foncer plein Sud !
Nous ne savions pas qu'à ce moment-là, l'ennemi était à 80 km au sud, aux Andelys, sur la Rive Gauche de la Seine.
La crête franchie, nous étions en terrain découvert : soudain signes d'inquiétude du pilote. Je me penche. Le char roulait à merveille, mais il refusait de virer : les manœuvres dans le ravin, exécutées uniquement aux freins, avaient achevé les bandes de direction. Quelle malchance !
On continue. Le char vient donner du nez à l'orée d'un bois contre un gros arbre. Impossible d'aller plus loin.

Ma capture.
Pendant que le pilote et radio s'affairent autour du char, je risque une reconnaissance. Tout est vide et silencieux, trop silencieux. Soudain, dans le soleil qui est à l'horizon, deux silhouettes à une centaine de mètres. Elles avancent tranquillement ; aucune arme apparente. L'un d'eux fait un geste amical. De loin je crois reconnaître le calot et la couleur de l'uniforme de la R.A.F.
je suis pris d'un espoir insensé ! Quand je me rends compte de la réalité (bien tard, puisque je suis accueilli par des mots français et sans brusquerie) je suis bien encadré. On m'avait dit que la Luftwaffe n'était pas là.

Celle de mon équipage.
Pruvost, ne me voyant pas rentrer, me recherche et se fait cueillir au hameau voisin. Conduit immédiatement au P.C., je l'y retrouve quelque temps après, en bien mauvaise posture : il avait été pris en effet habillé d'un pantalon de velours, d'une veste bleue à même la peau, d'un béret, ne portant aucun papier d'identité… Je le tire de là.
Mirant se camoufle jusqu'à la nuit, rend le char et l'armement inutilisables, de prend une mitrailleuse et des chargeurs et part vers le sud (toujours le sud !!!) Il marche toute la nuit. Au petit matin, alors qu'il traversait une route, un side stoppe sa hauteur. Il tire son revolver et foudroie les deux occupants. Il fonce ensuite et vient donner dans une batterie de DCA.
À neuf heures du matin, le 10 juin, nous étions tous trois au PC de Von Beck, où l'on était étonné de voir des " panzer " à 80 km dans les lignes. Moments critiques de l'interrogatoire. Comparutions séparées et répétées, car les déclarations ne correspondaient pas et pour cause…
Je les vis une dernière fois à la caserne Friand à Amiens, au milieu de la foule des prisonniers. Je les quittai pour suivre la colonne des officiers. Nous devions marcher jusqu'à Anent ??
je n'ai pas eu depuis de leurs nouvelles. Pas plus d'ailleurs que de camarades de mon ancienne unité. Et pourtant nous sommes, selon toute ressemblance des seuls prisonniers de la troisième compagnie du 19e bataillon.
Aussi devant ce silence :
sachant combien peut-on souffrir là-bas, surtout quand on a essayé, quand même, de faire plus que le strict devoir ;
considérant par ailleurs que je suis le seul témoin des faits ci-dessus et probablement le premier libéré de ceux qui les ont vécus.
Considérant en outre que rien ne soulagera davantage nos camarades en exil qu'un témoignage officiel de leur dévouement.
J'estime de mon devoir de vous demander, sur le rapport précédent, de vouloir bien attribuer à Mirant et aussi à Pruvost les citations dont les textes pourraient être les suivants :
Mirant André. " Sous-officier radio, plein d'initiative et de dévouement. Encerclé avec l'équipage de son char immobilisé, a mis en œuvre toute son énergie pour le remettre en état et rejoindre les lignes (9 juin 1940). Malgré tous ses efforts et son courage, n'a pu éviter la captivité.
Pruvost. " Pilote de char. Dans des conditions matérielles et morales très pénibles, a fait preuve de la plus grande énergie le 9 juin, où, encerclé avec l'équipage de son char immobilisé, et tenté l'impossible pour le ramener dans les lignes. N'a pu, malgré ses efforts, éviter la captivité.
Remarque. Je crois que pour Mirant un autre devoir s'impose.
Admis, à Bourges, au peloton des S.O.R., il en sortit convenablement en avril 1940. Sa nomination de sous-officier ne vint jamais. Il portait, au cours de la campagne, les galons de caporal, fictivement attribués à lui et à ses camarades par le commandant Héritier à La Bussière (Loiret) au moment où il faisait partie du 108e en formation.

1940 - 345e CACC

Historique sommaire de la
 345e compagnie autonome de chars D2 bis
 
 
 
I. Fondation de la 345e compagnie.
Le 26 avril 1940, le 19e bataillon doit envoyer une de ses compagnies à Versailles pour percevoir 15 chars D2bis neufs et du matériel roulant neuf pour être dirigé ensuite vers les T.O.E. ; c'est-à-dire la Norvège.
La première compagnie est désignée et devient ainsi la 345e compagnie autonome de chars.
La compagnie débarque à Versailles-chantier le 28, et le 29 débarquent que les 15 chars à la gare des matelots.
Au cours de la marche vers Satory, la moitié des chars tombe en panne par suite de difficultés dans l'embrayage. Il s'agit après démontage effectué par le lieutenant Bondard et le capitaine Idée, de mauvais roulements d'embrayage, des manques de graissage, etc… Mais ces chars paraît-il ont satisfait avec succès à toutes les épreuves de réception !
Cependant ce n'est que 15 mai que le capitaine Idée commandant la 345e compagnie pourra déclarer au Ministère, ses chars prêts à partir. La compagnie partira avec 14 chars, le 15e n'étant pas prêt.

II. Combats au nord de l'Aisne.
Le 15 mai, après-midi, la compagnie embarque en 2 rames, à la gare des Matelots. La direction est donnée jusqu'à Soissons, où nous recevons le point de direction suivant.
Le 18 mai, la première rame arrive vers huit heures du matin, à la gare de Soissons. Elle reçoit l'ordre de débarquer immédiatement. Le lieutenant-colonel Sudre commandant la 6e demi-brigade de la 4e D.C.R. dont dépend la compagnie, lui donne l'ordre d'aller se porter et de s'installer en position défensive dans la région sud-ouest de Soissons.
La deuxième rame arrivera à la gare de Crouy, vers 11 heures du matin. Les ordres sont changés, la compagnie doit se porter immédiatement dans la région nord-est de Laon, dans la forêt de Samoussy.
L'itinéraire est suivi sans encombres ; les véhicules sur roues sont laissés dans la région sud de Laon, à Presles.
Le 17 mai, à 4 heures du matin, la compagnie à l'attaque, sa gauche appuyée à la voie ferrée en direction de Montcornet. Elle est encadrée à droite par une compagnie B, la compagnie Bibes.
Dès le début, les chars B que l'on avait espéré rapides, se font remarquer par leur lenteur. Les D2 bis sont obligés de passer les premiers.
Entre Liesse et Chivres, la route traversant des marais est le seul passage possible. Les B doivent passer les premiers. Le passage étant miné, un camion de munitions y a sauté. Les chars sont obligés de se replier momentanément pour pouvoir passer. Un B envoie des coups de 75 mm sur le pont. Le B passe, puis les D2, puis les deux compagnies.
Les villages de Chivres, Bucy, La Ville aux Bois qui étaient occupés par l'ennemi sont nettoyés.
Arrivée à Montcornet, la compagnie D2 peut tirer à loisir sur des colonnes de camions et des motocyclistes circulant sur les routes de Montcornet à Marle et de Montcornet à Lislet. Les chars et automitrailleuses ennemis tentent sans grand succès de s'y opposer. Ils seront détruits.
L'ennemi réagit par son aviation. Le char du lieutenant Lacour est incendié par l'un d'eux, mais l'équipage est recueilli par lieutenant Sergent.
Pendant ce temps, quelques sous-officiers et chasseurs de la compagnie ne faisant pas partie des équipages faisaient des prisonniers et tuaient des ennemis récalcitrants à Liesse.
L'ordre de repli arrivé, la compagnie est attaquée par l'aviation ennemie en nombre. Plusieurs bombes sont jetées sur elle. Une bombe tombe devant le char du sergent Sacotte, les chenilles rompues, le char tombe dans l'entonnoir. Au commandement du commandant de compagnie, les chars se dispersent le plus possible, subissant des attaques en piqué de fléchettes incendiaires ; ils se regroupent à Bucy-les-Pierrepont. C'est là que le sergent Duvet et le chasseur Pract rejoignent la compagnie couverts de brûlures ; ils ont essayé de récupérer l'armement et les munitions du char du lieutenant Lacour, mais ils ont été attaqués par un avion ennemi qui a incendié leur char à son tour.
La compagnie derrière Bucy-les-Pierrepont, a installé ses chars pour garder les issues et pouvoir agir contre une contre-attaque. Les B se replient à 21 heures, la compagnie D2 bis à 22 heures. Elle reste une heure de plus n'ayant pas reçu d'ordre. J'ordonne le repli ; entre Chivres et Liesse je rencontre le colonel Sudre qui ordonne de porter notre compagnie dans la forêt de Samoussy.
Le 18 mai les chars sont remis en état : nettoyage ; le sable sur les blindages, dans la chambre des machines est enlevé. Remise en état des antennes de T.S.F, beaucoup sont cassées. Chaque char a 4 ou 5 impacts, le char du lieutenant Sergent en a 6. Ils n'ont pas traversé, les balles perforantes sont entrées un peu plus profondément mais n'ont pas traversé.
Le soir la compagnie reçoit l'ordre de se porter dans la région nord de Laon, pour une attaque qui aura lieu le lendemain matin.
La compagnie est passée à la 8e demi-brigade (lieutenant-colonel Simonin).
Le 19 mai, la compagnie est réservée. Position de départ, bois au nord de la Cité des Cheminots. Elle se déplace une première fois, puis doit se porter pour attaquer les lisières sud de Crécy sur Serre, afin de permettre l'entrée dans ce village d'une compagnie de R 35. Arrivée sur place, la compagnie voit les R 35 qui se replient. Elle part à l'attaque mais n'est pas suivie. Les D2 vont chercher les R 35 et les lancent dans Crécy, mais les R 35 ne peuvent passer les ponts à l'intérieur du pays qui sont minés et battus de part et d'autre par des canons antichars. Les D2 se précipitent dans le barrage. Un D2 passe 2 barrages, l'Alma du lieutenant Boudard, mais saute sur le troisième où il est pris à partie par des armes antichars et un Pz III. Le char du lieutenant Goddalis saute sur le deuxième barrage, le char du capitaine reçoit trois obus, derrière d'autres D2 tirent à la mitrailleuse et permettent aux équipages des deux premiers chars d'évacuer leurs engins en flammes et de retourner dans les lignes amies.
Parmi eux, le lieutenant Boudard a reçu un coup au front, le sous-lieutenant Goddalis est blessé de deux éclats dans les épaules, le chasseur Martineau a le pied cassé.
Le passage est impossible, le pont a sauté.
La compagnie se met en bataille derrière la ligne de chemin de fer, elle y reste jusqu'à sept heures du soir en attendant l'infanterie qui n'arrivera pas.
L'ordre de repli est donné. La compagnie largement dispersée en bataille subit une violente attaque d'aviation. Les appareils allemands sont une centaine, lâchant partout bombes, fléchettes incendiaires, mitrailles. De ci, de là, un char B flambe, les B semblent exploser rapidement. Tous les villages sur 20 km de profondeur sont bombardés, ainsi que les quelques bois que l'on peut y rencontrer. Ce n'est que dans les bois de la Neuville sous Laon que les chars D2 bis échappent aux avions ennemis.
Le soir, la compagnie ira s'installer dans le bois de Lavergny. À deux heures les chars sont postés face au nord.
Le 20 mai, la 345e compagnie subit l'attaque allemande dans le bois de Lavergny. Beaucoup de fantassins ennemis, des cavaliers, trois automitrailleuses, un char allemand sont abattus par nos chars. La section du lieutenant Sergent va au secours du lieutenant Le Acurf du 24e BC.C. dont le R 35 touché par les antichars ennemis est en flammes sur la route de Eppes. L'ennemi réagit par un violent tir de 77.
Le capitaine Idée est blessé, il continuera de combattre.
La compagnie se replie.
Festieux est bombardé, encerclé par des fantassins ennemis.
Les chars D2 attaquent ; le char du sous-lieutenant Sergent est pris à partie par un canon antichars dissimulé jusqu'au dernier moment qui le tire à bout portant. Le blindage est percé, les coups se succèdent, les autres chars arrivent. Le char du lieutenant Brumeaux est lui aussi atteint. Derrière les sergents Wix, Bour, Monnier tirent et permettent au chasseur Chauffour, à tout équipage du second de sortir de leur engin. Le char du sergent Monnier est lui aussi atteint, il se replie en flammes à l'intérieur du pays. Les rescapés prennent place dans les chars indemnes, et la compagnie sort de Festieux par la sortie nord.
Le char du sergent Tassel rejoint.
La compagnie arrive à passer l'Aisne, ainsi que la compagnie d'échelon et la section d'échelon sous les ordres du lieutenant Marais.
A Mareuil en Dôle, près de Fismes, la compagnie se regroupe avec le 19e bataillon de chars.
Le 21 mai, l'ordre est donné de rattacher la 345e compagnie au point de vue personnel et matériel au 19e bataillon de chars. Il s'ensuit une répartition générale du matériel de la compagnie. Elle perd également la plupart du personnel de son élément d'atelier ainsi que tous les gradés et chasseurs venus à sa formation des autres compagnies du bataillon.
La 345e compagnie redevient la 1ère compagnie.
Portés disparus le 20 mai : sous-lieutenant Sergent, sergent Mounet, caporal Hénon, caporal-chef Damoiselle, chasseur Lefèvre Georges.
Blessé le 17 à Montcornet : sergent Duvet, chasseur Praët.
Blessés le 19 à Crécy sur Serre : sous-lieutenant Goddalis, chasseur Martineau
Blessés le 20 à Lavergny : capitaine Idée, à Festieux : lieutenant Brumeaux

1940 - 68e BCC jmo

Image LE 68e BATAILLON
DE CHARS DE COMBAT
 
 

Dernier des bataillons de chars formés en 1939-1940 dans nos territoires d'Outre-Mer, le 68ème BCC n'eut qu'une existence très brève. Le rôle de cette puissante unité blindée, qui attrait pu être capital dans les événements du Moyen-Orient de 1940-1941, s'est pratiquement réduit à néant sous la pression des circonstances. Son histoire, assez représentative de son époque, mérite cependant que l'on s'y arrête.
C'est, vers le 15 septembre 1939 que le Ministère de la Guerre français, enfin décidé à réaliser pratiquement son soutien à la Pologne, le concrétisa soirs la forme d'un envoi substantiel en matériel militaire. C'est ainsi que le matériel complet et flambant neuf d'un bataillon de chars Renault R35 devait être acheminé par voie maritime en Pologne via Constanza en Roumanie, ces deux pays ayant à l'époque frontière commune. Mais la rapide avance germano-russe interdit tout accès vers notre malheureuse alliée. Devant l'impossibilité de livrer le matériel,on décida en dernier recours de dérouter, le convoi sur la Syrie, pour renforcer le petit potentiel de l'armée du mandat français.
Les projets du général Weygand, Haut-Commissaire et commandant en chef au Levant, sont bien connus : il envisageait alors la création d'un second front dans les Balkans, pour prendre les Allemands à revers, un peu dans le style de l'Armée d'Orient de 1918. Et la métropole commençait à faire parvenir des renforts aux maigres effectifs des forces françaises du Levant dans le but de créer la célèbre "Armée Weygand" destinée aux futures actions dans ce secteur. C'est à ce titre qu'arriva notamment la 86ème Division d'Infanterie ; de même fut créé le 68ème BCC avec le matériel dévié de Pologne. Il était destiné à seconder le 63ème BCC, seule unité blindée française de ce secteur, équipé en partie de D1 et en partie de R 35, de qualité médiocre.
Au début de novembre 1939 on fit donc appel à un certain nombre de volontaires pour garnir les effectifs du nouveau bataillon. Le Centre Mobilisateur 506 à Besançon fut la principale source de recrutement . Même certains indisciplinés qui purgeaient une peine de prison furent pressentis pour se porter volontaires, en échange de leur liberté. La nouvelle unité fut presque entièrement, formée de réservistes et placée sous l'autorité du commandant prince Charles Murat, descendant direct du maréchal d'Empire.
Les équipages rejoignirent leur matériel à Homs, en Syrie, le 30 novembre 1939. Là, le bataillon établit ses quartiers dans l'école militaire des cadets syriens qui avait été débarrassée au préalable de ses pensionnaires.
La composition du bataillon était réglementaire. Il était formé par l'état-major, 3 compagnies de combat comprenant chacune 4 sections de combat et une section d'échelon, et une compagnie d'échelon chargée des travaux de réparations et du transport. Les compagnies de combat comprenaient outre 13 chars Renault R 35, les 4 camions Renault AGR et les 4 chenillettes Lorraine 37L de la section d'échelon, le VTT Laffly du capitaine, une ou deux VTL Peugeot 202 ou 402 et une dizaine de moto-sides René Gillet. La compagnie d'échelon comptait 34 véhicules divers, dont des camionnettes Renault ADK1 et des porte-chars made in USA. Quant à l'état-major, il disposait de 10 véhicules légers.
Cet ensemble de matériel brillait par son homogénéité et son modernisme ; tous les véhicules appartenaient à l'armée et étaient réglementaires. C'est un fait notable à l'époque où dans les unités régnait la réquisition et où les camions de livraison de la Samaritaine côtoyaient les luxueuses limousines Delahaye 135.
Entre novembre 1939 et juin 1940, les seules actions du 68ème BCC se limitèrent à diverses manoeuvres conjuguées avec la Légion Etrangère,notamment le 6ème REI, L'annonce des tragiques événements de métropole fut rendue plus inquiétante encore par l'éloignement de la France. Weygand, le "médecin consultant appelé au chevet d'un malade condamné", quitta son poste au Levant, pour prendre la direction des armées de métropole, puis ce fut l'armistice du 22 juin 1940 ; alors se posa devant les divers ordres du jour contradictoires. Le problème de savoir où était le devoir : respecter l'armistice ou continuer le combat. Tout le bataillon, à l'exception de son chef, le commandant Murat, décida de rejoindre les Anglais en Palestine pour poursuivre la lutte, conformément à la circulaire du colonel de Larminat, chef d'état-major au Levant. Cette tentative considérée comme une "désertion à l'étranger" débuta le 29 juin 1940. La colonne partit d'Homs avec 2 jours de vivres et se dirigea lentement vers la Palestine, empruntant la route du Liban. Mais cette "odyssée" se termina assez rapidement, car à Chtaura, sur la route Beyrouth-Damas, le bataillon se vit couper la route par un barrage de la Légion Étrangère. Les mutins, peu désireux de massacrer des compatriotes, durent se résoudre à clore là leur tentative ; seuls deux officiers en side réussirent à rejoindre les Anglais et à poursuivre la lutte dans les rangs des FFL. Un escadron de Gendarmerie appelé d'urgence se chargea d'appréhender les "déserteurs" et de les escorter jusqu'à Beyrouth où les officiers eurent droit à un séjour en salle de police. La triste rentrée au bercail se fit le 5 juillet 1940. Aucune sanction importante ne vint heureusement frapper les responsables de l'escapade et le bataillon fût rendu à sa monotone vie de garnison jusqu'à sa dissolution au début de 1941. Tous les équipages furent rapatriés à l'exception des rares éléments d'active qui furent réincorporés au 63ème BCC... Quant aux blindés de l'unité, ils vinrent grossir de façon importante le parc du 63ème BCC qui devait, 6 mois plus tard, faire face tragiquement à l'incursion des Anglais et des Forces Françaises Libres en Syrie...
C'est ainsi que le 68ème BCC passa au travers des dramatiques événements de 1940 et 1941 sans jamais y prendre part, laissant à son homologue le 63ème BCC le triste privilège de se faire massacrer pour la défense du mandat français.
 
Sources : Archives du SHAT Vincennes.
  1. 1940 - 67e BCC jmo
  2. 1940 - 51e BCC jmo
  3. 1940 - 50e BCC jmo
  4. 1940 - 49e BCC jmo

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