36e BATAILLON DE CHARS DE COMBAT
Commandement
Etat major
(6 officiers, 1 sous-officier, 33 hommes, 3 véhicules de liaison , 2 camions , 1 remorque, 2 motos)
Compagnie d'échelon
(2 officiers)
- Section de services (4 sous-officiers , 34 hommes, 2 véhicules de liaison , 1 camionnette, 5 camions, 1 remorque, 1 moto),
- Section de réparation (1 officier, 4 sous-officiers, 32 hommes, 1 véhicule de liaison, 3 camionnettes, 1 camion, 4 tracteurs lourds à roues, 3 tracteurs chenillés, 3 remorques à 4 roues, 1 moto)
- Section d'Atelier (1 officier, 2 sous-officiers, 34 hommes, 1 véhicule de liaison, 2 camionnettes , 2 camions, 1 remorque à 4 roues, 1 moto)
- Section logistique (1 officier, 5 sous-officiers, 26 hommes, 1 véhicule de liaison, 3 camionnettes, 9 camions, 2 remorques, 1 moto)
3 compagnies
- Section de Commandement (1 officier, 3 sous-officiers, 23 hommes, 1 FT canon, 3 véhicules de liaison dont un avec mitrailleuse AA, 1 moto, 1 moto avec 1 mitrailleuse AA, 3 MG)
- 3 Sections de 5 FT (1 officier, 2 sous-officiers, 17 hommes , 3 FT canon , 2 FT mitrailleuse)
- 1 Section de réserve de 5 FT (1 officier, 7 sous officiers, 35 hommes, 3 FT canon, 2 FT mitrailleuse, 1 camion de munitions, 1 camion citerne de 2500 litres, 1 camion de vivres, 1 camion de 5t de matériel, 5 remorques pour char, 1 remorque)
Le 36e bataillon se trouva fin mai en première ligne, plaçant à la suite d'innombrables trajets nocturnes ces trois compagnies de combat sur l’Ailette. Les vieux FT - dont certains portaient des traces de balles et d’éclats d'obus datant de 14/18 - cahotant, crachant le feu dans des crépuscules meurtriers, secoués sous le souffle des bombes, décimés par une artillerie meurtrière, ensevelis dans les grottes du Soissonnais, allaient mourir vaillamment, sur les positions avancées de la 87e D.I., de la 7e D.I. et de la 28e D.I.
Trois compagnies de FT devant trois divisions ! Ames des morts de 14/18, âmes de nos camarades tombés sur l’Ailette, au Chemin des Dames, à la Malmaison, dans ces plaines fertiles et nues, dans ces ravins plongeant vers l’Aisne, je conçois que le repos ne vous ait pas gagné, à voir les conditions qui nous menèrent à la mort, avec un matériel périmé.
Le 5 juin, au matin, les FT reçoivent le feu ennemi sur tout le front. Durant quatre jours, toutes les sections de combat s'effritent, puis les sections d'échelon engagées dans le combat. Quand il n'y a plus de chars, les restes du bataillon s'organisent en point d'appui, avec deux mitrailleuses, 1 FM et le pistolet des officiers et des hommes.
Dans toutes les compagnies de combat, à la compagnie d'échelon, à l'état-major et à la section de commandement, un moral de fer conduit chacun. Les équipages savent que leurs engins les désignent aux coups sans les protéger. Peu importe : c'est l'aspirant Simonet patrouillant seul sur l’Ailette, sans appui de feux, tué d'une balle dans la tête à travers sa tourelle, traversée comme une motte de beurre. C'est l'adjudant chef Cazelles et son mécanicien Bousquet qui foncent sur l'ennemi, crachent la mitraille, font prisonniers un officier et 15 hommes. Cazelles, le bras en sang ne s'occupe pas de sa grave blessure, mais écrit au chef de bataillon pour lui signaler l'emplacement de sa remorque à essence !
C'est le sergent Dubois qui a son tourelleau arraché par un obus, sa lunette déréglée par le choc et qui, les yeux brûlés de poudre, continue le combat dans son char découronné. C'est le sergent chef Cattin de la compagnie d'échelon qui remet une A.M.R. en état alors qu'elle était abandonnée et qui fonce sur l'ennemi dans les blés, le torse hors de la tourelle pour mieux voir son champ de tir. Une balle lui fracasse la main, son mécanicien paye sans doute de sa vie leur héroïsme commun et il rampe épuisé, sauvant sa mitrailleuse au long des haies et des fossés. C'est le sergent Boivert qui, dans un H 39 récupéré, maintient l'ennemi et rejoint le bataillon avec un engin criblé de coups.
C'est la section Sindy qui brûle en une journée toutes ses munitions, réapprovisionne de nuit dans une carrière et refait un feu d’enfer le lendemain.
C'est le lieutenant Gander et le caporal-chef de Vaublanc, l’un tué et l’autre grièvement blessé en phase de Vailly sur Aisne.
C'est le sergent Ritter qui, appelé à prendre le commandement de la 3e section de la 2e compagnie, n'a plus qu'un seul char ; avec son FT qu’il pousse à fond, il perce les lignes ennemies, dégage un PC et ramène un capitaine blessé du 17e R.I.A.
Le chasseur Caudeyras mécanicien, saute de son char incendié, s'accroche à l'infanterie et mène le combat, revolver au poing, suivi bientôt par d'autres équipages.
Le motocycliste Dronneau joue avec la mort au Chemin des Dames.
Et, pendant que les chars flambaient, tombaient épuisés, que les équipages farouches défiaient la mort avec gaieté, on pouvait voir les officiers de l'état-major, le chef de bataillon au contact.
Le 8 juin au soir, le bataillon a perdu en tués, blessés, disparus : 115 officiers, sous-officiers et chasseurs.
Six chefs de sections sur neuf ont disparu, deux officiers sont tués, un grièvement blessé, l'adjudant chef blessé et évacué ;
50 % de l'effectif des sous-officiers est perdu ;
Les 63 chars FT sont détruits. Le H 39 récupéré après un véritable raid de nuit, rejoignit seul les débris du bataillon, réorganisés et tenus fermement en mains par le chef de bataillon.
La tragique odyssée du 36e BCC illustre cette vérité qu’en 1940 ceux des chars avaient le coeur bien placé.
C'est pourquoi les survivants du bataillon lèvent la tête, jaloux de leurs morts, fiers de leurs souffrances, l'espoir au coeur, l'espoir de la renaissance de leur arme qui ira avec la renaissance de la patrie. Le 36e BCC prend place au nom dans nombre des bataillons glorieux. Il reste des larmes de rage dans nos voix, mais elles seront plus claires pour reprendre, en des jours meilleurs, le refrain des chars.
Sources : Archives du SHAT Vincennes.