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1940 - 9e BCC historique

Historique du

 9e Bataillon de Chars de Combat

Chars Renault R 35



Le 9e BCC est créé le 19 août 1939 à Verdun à partir du 1er Bataillon du 511e Régiment de Chars de Combat.

Cette nouvelle unité, équipée de 45 chars R 35, aux ordres du commandant Gauthier est rattachée administrativement au 511e Groupe de Bataillons de Chars de Combat (GBCC) et affectée à la IIIe armée.

Le 16 janvier 1940 le 9e BCC rejoint le 510e GBCC à la VIIe armée.

Avec cette grande unité il participe à l’expédition en territoire Hollandais dans le cadre du plan "Breda- Dyle".

Le 13 mai 1940, la VIIe Armée à partir de la région de Breda - Tilburg se replie vers le nord-est de la Belgique, entre en contact avec la 9e panzerdivision et retraite ensuite vers la France avec des éléments de la IXe Armée pour se positionner près du Quesnoy.

Le 16 mai, le général Giraud remplace le général Corap. La 9e Armée n’est plus, ses restes fusionnent avec la 7e Armée.

Le 9e BCC tout en combattant se dirige en direction du nord-ouest sur un axe Lens - Béthune.

Le 22 mai 1940, le Général Tarit, commandant la 1ère DINA depuis le 15 janvier 1940, regroupe les débris de sa division: 5e RTM, 28e RTT, 27e RTA, 54e et 254e RA et GRDI 91 auquel se joignent trois compagnies du 9e BCC.

Ce nouveau groupement tient Béthune et le 23 mai va prendre position derrière le Canal Le Hamel – Cornet - Malo.

Le 23 mai 1940, au court de ce repli près de Saint-Hilaire-Cottes une première escarmouche met aux prises un Kampfgruppe de Waffen SS et les derniers éléments de la colonne blindée composée de chars du 9e et 22e BCC.

Quelques kilomètres plus loin, pénétrant dans Aires sur Lys, les chars sont piégés en pleine ville où après un intense combat de rues de nombreux R 35 sont détruits. Seuls 11 chars échapperont au désastre (dont 5 seulement en état de combattre) et iront se positionner à Hazebrouk.

Le 24 mai 1940, les restes du 9e BCC stationnent à Rosendaël puis le 28 mai à la ferme Brandler où le bataillon partage ses cantonnements avec des éléments du 39e BCC.

Le 28 mai 1940, avant le départ de l’unité pour Malo-les-Bains pour un éventuel embarquement pour l’Angleterre, les chars sont sabotés.

Ce n’est que le 30 mai que les survivants du 9e bataillon de chars de combat embarquent pour Douvres sur "l'IMPETUEUSE".

A partir de Southampton ils seront dirigés ensuite sur Cherbourg le 1er juin 1940 sur le paquebot "BRUGES". A leur arrivée ils y retrouveront les éléments roues de leur bataillon qui avaient échappé à l’encerclement de la poche de Dunkerque.

Le 15 juin, ce sera Champagnac, le 21 Bergerac, le 23 Mouly puis Auch où le bataillon sera dissout.

1940 - 8e RC souvenirs

8e RÉGIMENT DE CUIRASSIERS

                 SOUVENIRS DE L'AUTOMITRAILLEUSE DE DÉCOUVERTE
                                          PANHARD 178 - N° 99828

  


                  

Je suis née en 1938 dans les usines Panhard et immatriculée sous le n° 99828.
Je fus affectée au 2e peloton du 3e escadron du 8e Régiment de Cuirassiers motorisés et Saint-Germain-en-Laye pour remplacer une A.M.D. LAFFLY-VINCENNES.
Après être passée à l’atelier du régiment où l’on me dessina une croix de Lorraine, insigne de la 2e Division Légère Mécanique, et un cœur vert bordé de blanc de chaque côté de mon blindage pour figurer le cœur du 2e peloton, le vert du 3e escadron, je fis la connaissance de mon premier équipage. Il était composé d’un chef de voiture, maréchal des logis Rezzi, d’un conducteur cuirassier Simonetti, d’un tireur cuirassier Bora et d’un inverseur cuirassier Sansonnet ? Ensemble nous fîmes de belles promenades dans la région de Saint-Germain-en-Laye, par exemple à Saint Nom la Bretèche, Feucherolles, les Alluets-le- Roi- Plaisir-Grignon.
J’ai participé avec quelques-unes de mes sœurs à l’inauguration de la place Hoche, à Versailles. J’ai fait partie d’une présentation de matériel à Satory devant tout un aréopage de ministres et de généraux et où le "présentateur" était un certain colonel de Gaulle. On m’a également présenté à la promotion 1938 de l'Ecole de Saint-Cyr. Le 14 juillet 1939, j’ai défilé fièrement sur les Champs Elysées avec tout le régiment et bien d’autres unités devant leurs Majestés le roi et la reine d’Angleterre et j’ai eu l’occasion de caresser légèrement et involontairement un cheval de la garde, qui ne fit même pas un écart. J’ai encore eu l’occasion de faire deux choses amusantes : la première un exercice d’embarquement sur wagon de chemin de fer ; la seconde une traversée de rivière sur un pont de bateaux installé par le Génie. Puis ce furent les grandes manœuvres du mois d’août 1939 où mon tireur a fait une magistrale démonstration de son flegme et de sa précision, tant à la cible fixe qu’à la cible mobile. Hélas, nous avons dû rentrer précipitamment au quartier avant la fin de ces manœuvres.
Sur la route des informations, nous arrivaient par bribes - j’entendais “Le Président du Conseil rencontre le Premier ministre britannique - la mobilisation n’est pas la guerre - Hitler ne bougera pas". A Saint-Germain, le quartier était en effervescence. Je repartis après quelques jours, mais sans mon chef de voiture qui avait été remplacé par le maréchal des logis Rosset, afin de lui permettre d’aider le sous-lieutenant Samson à organiser l’échelon B du 2e escadron. J’ai récupéré mon chef de voiture à Villeret, dans l'Aisne. Nous avons cantonné à Villeret-Nauroy­ Beaurepaire et, après un état d’alerte le 11 Novembre, à Vieux Rang. Puis, nous sommes arrivés à Louvroil près de Maubeuge et avons passé un hiver extrêmement rigoureux à Prisches. Le printemps est revenu et la drôle de guerre s’est achevée le 10 mai 1940, sans que quelque chose de notable soit à rapporter pendant cette période, sauf toutefois, un changement dans l’équipage. Après le départ de Simonetti pour une autre formation, Sansonnet a été promu conducteur et l’équipage a été complété par Ponsardin au poste d’inverseur, Bora restant au tir.

10 mai 1940, 4 heures, alerte, 5 heures 30, rassemblement des officiers et des chefs de voiture chez le capitaine Potier, commandant l’escadron. Les allemands sont entrés en Belgique et en Hollande depuis ce matin 3 heures. Tous les véhicules au chargement : armement, munitions, plein d’essence.
10h20 : rassemblement.
10h50 mission pour notre patrouille reconnais­sance et action retardatrice sur l’axe Liège Namur, tenir cinq jours.
11h00 départ, nous quittons Prisches. Le sous-lieutenant Samson en permission, c’est le capitaine Potier qui prend le commandement du détachement. Ce détachement est formé d’une première patrouille comprenant l’A.M.D. du maréchal des logis Salle, un groupe moto et l’A.M.D. du brigadier-chef Poupault, d’un groupe PC. comprenant la voiture radio du capitaine et trois agents de liaison moto, d’une deuxième patrouille comprenant moi-­même avec le maréchal des logis Roui, un groupe moto sous les ordres du sous-lieutenant de Feuillade et l’A.M.D. du brigadier-chef Vermet.
13h00 après être passé à Landrecies, Maroilles, Louvroil, Maubeuge, nous rentrons en Belgique. L’accueil est enthousiaste.
17h15, Gembloux, nous réquisitionnons un plein d’essence à une station service. Les stukas bombardent la gare et l’usine à gaz. Ça fait un bruit infernal de sirène et d’explosions. C’est, paraît-il, le baptême du feu et du feu y en a partout.

11 mai, pas de ravitaillement, le maréchal des logis achète des oranges, c’est tout ce qu’il y aura à manger et à boire pour l’équipage. Par contre, il ne manquera pas de cigarettes généreusement offertes par les habitants des pays traversés.
9h10, rassemblement, direction Liège.
13h00 Voroux, Goreux, à une dizaine de kilomètres de Liège, le capitaine me désigne pour faire une reconnaissance sur Liège accompagnée par le side-car du maréchal des logis Ropars. Nous voyons pour la première fois des cadavres, des civils, hommes femmes, enfants, ils sont là 7 ou 8, fauchés le long du talus. C’est la pagaille, armée belge, les civils refluent dans un désordre indescriptible. Des chevaux morts nous barrent la route, je passe dessus - quelle horreur- un gamin blessé pleure sur le cadavre de sa mère. Liège est bombardé presque sans discontinuer depuis 3h00 ce matin. Les allemands sont dans la ville. Nous les voyons. Ropars va rendre compte. Je fais demi tour. Nous sommes mitraillés par l’aviation. Pas de dégât. Retour à Voroux. On se replie. Je ne démarre pas. Un motard signale ma panne. La voiture radio du maréchal des logis Cochin vient me dépanner. A entrée d’Huy, dans la nuit, le capitaine me laisse aux ordres du 1er Dragons pour garder un pont qui doit sauter.

12 mai, le pont ne saute pas. Le Génie attend les ordres. L’ennemi est en face. Cinq tirs de 25 et trois rafales de mitrailleuse sur un véhicule léger qui fait demi-tour. Plus rien.

13 mai, 6h00, l‘équipage a passé une mauvaise nuit. Des éléments du 1er Dragons, du 8e Zouaves et dont ne sait trop quelles unités sont passées jusqu’à 3h00 du matin, plus ou moins mélangés aux civils qui fuient. Depuis plus rien ne passe. Calme plat. A 6h00 essai de démarrage, rien à faire, c’est la panne. Des coups de feu sont tirés derrière nous. Le pont est toujours là. Le Génie est parti. Les allemands ne se montrent pas. Les Dragons décrochent. Ils vont signaler ma panne. Pas de ravitaillement. Rien ne bouge. C’est angoissant. 14h00 l’A.M.D. du brigadier-chef Poupault arrive à notre hauteur. Il nous a fait peur, mais me prend en remorque. Nous décrochons.

14 mai, nous avons perdu notre détachement. Nous marchons en direction de Namur, 8h00, nous rencontrons le général Lacroix, commandant la 4e B.L.M. Le maréchal des logis lui rend compte des positions allemandes. Il nous envoie porter un pli au capitaine de La Barrière, 1er Dragons, à Courcelles. Le général nous apprend que le sous-lieutenant Samson a été tué. C’était notre chef de peloton.
9h00, nous sommes aux ordres du capitaine de La Barrière. On me répare (démarreur grippé).
10h00, chars allemands en vue, ils sont trois. Nous les stoppons. Il semble que l’ennemi ne cherche pas le combat.
17h00, les SOMUA nous relèvent.

15 mai, j’escorte un convoi du Génie. 17h00 garde au P.C. du général.

16 mai, au matin les chars allemands approchent, ordre de repli. Je retombe en panne. Réparation. Saleté de démarreur. Nous avons perdu la colonne. Direction Namur. Personne devant, personne derrière. Nous passons la nuit dans un bois. Pas de ravitaillement. Plus beaucoup d’essence.

17 mai, 3h00 du matin. Des chars Hotchkiss arrivent sur nous, heureusement que Bora n’a pas tiré. Nous mettons aux ordres d’un commandant du 29e Dragons.
10h00, nous approchons de Namur. Les belges nous tirent dessus. Nous agitons nos fanions. Le terrain est miné. Les allemands sont tout près. Les Hotchkiss et nous, tirons sur la lisière d’un bois à 200 mètres. La réplique est immédiate. Un char du 29e est touché. Nous restons à couvert tout en arrosant la lisière toutes les 10 mn.
14h10, rassemblement. 14h25, nous entrons dans Namur. Pas de 8e Cuirs. Toilette pour les hommes, plein d’essence pour moi, repas enfin pour eux. 16h00, trente chars allemands signalés dans Namur, paraît-il. Est-ce vrai ?

18 mai, nous sommes à nouveau aux ordres du capitaine de La Barrière, 1er Dragons. Nous quittons Namur, direction Wepion, Fraire, Chastres. Les allemands sont partout, il faut se battre, c’est dur.

19 mai, nous passons la frontière à Hestrud
17h05. Une voiture légère me fait signe de la suivre. C’est le colonel Mono. Enfin, nous retrouvons le 8e Cuirs à 19h20 au château de Berelles. Nous sommes aux ordres du lieutenant Du Bois Péan. Je marche mal.
22h00, Départ, je prends position à Louvroil.

20 mai, 6h20. Un char Hotchkiss arrive en renfort, je suis à défilement de tourelle à gauche de la rue. Le char se poste à droite. 7h05 un char allemand arrive face à nous à 25 m, canons et mitrailleuses crachent. Il est surpris. Il semble qu’il ne puisse manœuvrer. Feu. Feu. Lui tire sur le char Hotchkiss. Il n’a pas pu me voir. Vas-y Bora continue, il ne peut plus bouger. Des hommes tentent de sortir. Notre mitrailleuse arrose à tout va. Le char Hotchkiss en fait autant. Le calme revient. Combien de temps a duré le combat, je ne sais. Le lieutenant Caboat arrive en side-car, personne ne bouge. Il va jusqu’au char allemand, fait une rapide inspection et revient, au passage il lance "bon travail" et repart. Nous, nous restons. Un agent de liaison moto nous apprend que le maréchal des logis Cochin vient d’être tué. Il est midi.
11h30, repli. Direction Cambrai, Bavay est en flamme, Valenciennes, Saint-Amand, Orchies.
18h00, Douai. Réfugiés et troupes sont mélangés. C’est la pagaille. Je perds la colonne. Un sous-officier du 75e GRDI nous arrête. Il informe que les allemands sont dans Cambrai. Nous recherchons le détachement et ne pouvons guère avancer à cause des encombrements, c’est désolant. 7 km avant Cambrai rencontre avec le capitaine de Bourboulon et ses camions. Cambrai est prise. Nous retrouvons la colonne, direction le château de Gouy-sous­Bois. Il fait nuit.

21 mai, matin, direction Vitry en Artois. Je suis de garde sur un pont, sous les ordres du sous-lieutenant de Feuillade. Nous sommes bombardés, le terrain d’aviation est salement touché. Heureusement que mon plein a été fait avant le bombardement du terrain.

22 mai. Garde au PC. du colonel. RAS.

23 mai. Garde au PC. du colonel. RAS.

24 mai. Sainghin, l'équipage peut faire une espèce de repas et un peu de toilette. 21h30 reconnaissance sur Arras aux ordres du lieutenant Du Bois Péans. Arrêt à Bailleul, Sire, Bertoult.

25 mai. Reconnaissance sur Thelus, Neuville, St Vaast, Mont St-Eloi, Camblai Abbé. Les allemands sont dans Arras. Retour à Sainghin. Après-midi félicitations du général Blanchard. Pourquoi ? . . Le général Bougrain informe que l’armée du nord est encerclée. Passerons-nous à Cambrai ?

26 mai. 7h00. alerte. 7h30, départ direction nord et Cambrai ? 7h40, arrêt les chefs de voitures au lieutenant - itinéraire Carvin, Hénin, Liétard, Lens, La Bassée, Fourmies, Armentières, Ypres, qu’est-ce que ça veut dire ? - les belges ont demandé l’armistice.
9h40. Nous entrons à nouveau en Belgique. Lens et Armentières sont en flammes. A Ypres, nous allons en direction de Meenen. Arrêt à Geluveld. Il n’y a personne, tout est calme. Pour moi, reconnaissance sur Meenen. Voir et rendre compte. Il est 13h05.
A Geluwe contact avec les allemands. Canons, mitrailleuses. Ils se replient, nous continuons. Nous voyons à Meenen, une très importante colonne allemande qui se dirige en direction de Tourcoing. Des automitrailleuses, des camions, des motos, ils vont vite. Un temps mort, puis arrive un petit convoi. Nous tirons, ils n’ont pas l'air de nous localiser. Feu. Feu, deux automitrailleuses et trois motos semblent rester au tapis. Je décroche et vais rendre compte.
17h30, nous sommes attaqués. Le 1er Dragons est avec nous.
18h10, trois chars allemands se présentent à 350 m environ. Feu. On nous bombarde, un éclat fait une coupure au pouce droit de mon chef de voiture. Mon canon fait des coups au but à plusieurs reprises.
A la nuit, repli sur Ypres et direction la Bassée.

27 mai, nous avons passé la nuit à la Bassée. L’artillerie n’arrête pas de nous bombarder. Un obus tombe sur le PC. du colonel. Gobet est blessé aux jambes.
11h40, nous quittons la Bassée. L’aviation nous bombarde, mon aile avant droit est arrachée.
14h15, Vlamertinge. Nous sommes au contact Les allemands sont à 400 m. Mitrailleuse. Nous fonçons sur Poperinge.

29 mai. L’équipage et quelques soldats perdus font un méchoui dans un pré aux environs de Poperinge.
Un soldat anglais fait voir sa montre et dit bridge. Boum ! ... Nous nous dépêchons de passer. 14h00, nous avançons sur lsenberge. 15h05 les stukas nous attaquent. Trois blessés graves Garder, Plagnard et Ballet. Le camion des cantines est détruit. Adieu les affaires personnelles. Nous roulons de nuit vers Fumes. Ça bombarde de partout.

30 mai. La Panne (c’est un pays pas un gag). Des tas de véhicules sont abandonnés. Nous nous arrêtons. Toujours les stukas et les bombardements d’artillerie, ordre de saboter le matériel. La culasse du canon est démontée pour être jetée plus loin. Les mitrailleuses sont démontées, les pièces perdues dans les dunes. On me fait la vidange d’huile, tandis que mon moteur tourne. Je n’irai pas plus loin.
L’équipage s’éloigne et se dirige vers la mer. Malo, Dunkerque, peut-être ? . . . qui le sait. Ils ne se retournent pas mais je crois bien que plus d’un écrase une larme. Je vais mourir. Adieu.

                                                                                                                     A.M.D. 99823  

                       Pour copie conforme

Raymond Rezzi (ancien du 8e Cuirassiers)     

1940 - 8e BCC jmo

LES OPÉRATIONS DU

             8e BATAILLON DE CHARS DE COMBAT
                PENDANT LA PÉRIODE DU 13 MAI 1940 AU 25 JUIN 1940.

 

 


Le 8e bataillon de chars stationné au Camp de la Haute Moivre reçoit le 13 mai 1940 à 10 heures à l'ordre de se tenir prêt à faire mouvement.
Délais de préparation : 12 heures.
Le mouvement est prévu :
Par voie ferrée : Pour tous les chars, véhicules de commandement, tracteurs de ravitaillement et de dépannage, voitures de liaison, camions à vivres et bagages, cuisines roulantes.
Cinq trains pour le bataillon.
Par voie de terre : Les autres véhicules sur roues.
Les gares d'embarquement et itinéraires sont fixées le même jour à 19 heures.
 
Ordre de bataille à la date du 12 mai 1940

chef de bataillon GIRIER, commandant le bataillon.
 
État-major
chef d'état-major : Capitaine de Cugnac Dampierre.
officier adjoint technique : lieutenant Anglicheau.
officier de renseignements : lieutenant Souchon
officier des transmissions : sous-lieutenant Peschart d'Ambly.
officier des détails : sous-lieutenant Demangel
officier de liaison : sous-lieutenant Plattard.
médecin chef de service : médecin lieutenant Thuillier.
Section de commandement
adjudant chef Peche : radio, chef de la section de commandement.
sergent chef Fichaux : radio
sergent chef Teiturier : sous-officier conducteur
sergent chef Favier : sous-officier conducteur
sergent Droulers : secrétaire
sergent Kornmann : secrétaire.
1ère Compagnie
commandant de compagnie : lieutenant Dupont.
Section de commandement :
chef des transmissions : adjudant Gruselle, radio char commandement : sergent André, pilote char commandement : sergent Marteau.
adjoint au comptable : sergent Bitaudeau, sous-officier D.C.P. : sergent Esnault.
1ère section
a) officiers : lieutenant Hugot sous-lieutenant Adrian
b) sous-officiers : adjudant-chef Miclot sergent-chef Jambel sergent Mazue sergent Cadoux sergent Pestour
2e section
a) officiers : lieutenant Rosenwald sous-lieutenant Reveney aspirant Bridel
b) sous-officiers : sergent Lavaux sergent Baudy sergent Pizano sergent Delumeau
3e section
a) officiers : lieutenant Brayard sous-lieutenant Lutz
b) sous-officiers : sergent-chef Ott sergent Secroun sergent Roure sergent Erouret
section d'échelon
a) officiers : sous-lieutenant Le Corre lieutenant François
b) sous-officiers : adjudant Dick sergent-chef Trouillet sergent Girardot sergent Briva sergent Morisset
Caporaux-chefs : 13,      caporaux : 16,   chasseurs : 74
2e Compagnie
Commandant de la compagnie : capitaine Deyber
Section de commandement :
chef des transmissions : sergent chef Dijoux
radio char commandement : adjudant Poquet
adjoint au comptable : sergent Satinet
sous-officier D.C.A. : sergent Deschelles
1ère section
a) officiers : lieutenant Magrey  sous-lieutenant Ferrand  sous-lieutenant de Riberolles  
b) sous-officiers : sergent Champeil sergent Voineau  sergent Aubrie
2e section
a) officiers : lieutenant Bellanger  sous-lieutenant Guérin  sous-lieutenant Barthélémy
b) sous-officiers : sergent-chef Jeannod  sergent Bidesheim  sergent Ponsard  sergent Diederle  sergent Turbil
3e section
a) officiers : lieutenant Gandois  sous-lieutenant Spreux  
b) sous-officiers : sergent Letellier sergent Meritet  sergent Braillard
section d'échelon :
a) officiers : lieutenant Gros
b) sous-officiers : adjudant-chef Watrinet  adjudant Smouts  sergent chef Barthélémy  sergent Armatte  sergent Higelin  sergent Pivel  sergent Vedovati
Caporaux-chefs : 12      Caporaux : 21      Chasseurs : 73
3e Compagnie
commandant de compagnie : capitaine Poupard
Section de commandement
chef des transmissions : sergent chef Curabet
pilote char commandement : adjudant Roy
adjoint au comptable : sergent Chouchena
sous-officier D.C.A. : sergent chef Robert
1ère section
a) officiers : lieutenant Lamoine  sous-lieutenant Monier  sous-lieutenant Bordeaux  
b) sous-officiers : sergent Vieux Pernon  sergent Dumonteil  sergent Cuénin  
2e section
a) officiers : sous-lieutenant Bernard  sous-lieutenant Remy  sous-lieutenant Serpeau
b) sous-officiers : sergent Dohle  sergent Le Feuve  sergent Dupretz  sergent Cadet
3e section
a) officiers : lieutenant De Bretagne  sous-lieutenant Pucel  sous-lieutenant Beaugrand
b) sous-officiers : aspirant de Vigouroux d'Arvieu  adjudant-chef Ousset  sergent Mathieu
section d'échelon
a) officiers : lieutenant Caillat
b) sous-officiers : adjudant Dugeon  sergent-chef Gaunand  sergent Guyot  sergent Feret  sergent Vinckel
Caporaux-chefs : 21                caporaux : 20                 chasseurs : 71
Compagnie d'échelon
commandant de compagnie : capitaine Robin
adjoint au commandant de compagnie : capitaine Ledur
1ère section : adjudant Feugère  sergent Durand  sergent Falaise  sergent Rivoire  sergent Lamaison
2e section :  lieutenant Masson   sous-lieutenant Babel  adjudant-chef Folly  sergent-chef Chavanton  sergent-chef Guégan  sergent-chef Vivier  sergent Barlot  sergent Brousseau  sergent Droulin  sergent Bougain  sergent Cassard  sergent ThibaudSergent Bastian
3e section : sous-lieutenant Robert   sergent Wacker
4e section : lieutenant Nicolas   adjudant Vexo  sergent Charton   sergent Ducornet  sergent Naton
Caporaux-chefs : 9           caporaux : 19                  chasseurs : 118

Sommaire des opérations

I - 13 au 18 mai : embarquement, débarquement, protection du repli des véhicules de la D.C.R. en forêt de Signy et défense des ponts de l'Aisne, de Rethel, de l'Oise et du canal Crozat.
 
II - 19 mai : combats de Ham.
 
III - 20 au 23 mai : regroupement des éléments et reconstitutions des unités.
 
IV - 24 au 25 mai : attaque de la tête de pont de Péronne.
 
V - 26 mai au 4 juin : mouvement de rocade Est Ouest et inversement, au sud de la Somme, dans le but de faire face à des attaques ennemies d'éléments blindés, débouchant des ponts de la Somme.
 
VI - 4 juin : attaque de la tête de pont d'Abbeville.
 
VII - 6 au 9 juin : mission retardatrice : reconnaissance et engagements divers : défense des ponts de l'Oise, de Sommereux, d'Auchy la Montagne, d'Agnetz et de la forêt de Hetz.
 
VIII - 10 au 25 juin : défense des ponts de Mery et de Mériel.
Mission retardatrice entre Seine et Loire
mission retardatrice entre la Loire et le Cher, défense des ponts de Quincy et Mehun sur Yèvre.
Mission retardatrice entre le Cher et la Creuse.
 
IX - pertes :
 
I- PÉRIODE DU 13 AU 18 MAI 1940
Le bataillon fait mouvement dans les conditions suivantes :
a) Par voie de terre : la majeure partie des véhicules sur roues du bataillon, sous les ordres du capitaine Robin, quitte le camp le 13 à 20h30, rejoint à Chalons les véhicules de la demi-brigade commandés par le capitaine Herbert et par Reims, atteint Laon, le 14 au matin. La colonne s'arrête quelques heures à Puisieux, repart à 18 heures sur Rozoy et atteint la forêt de Signy où elle se groupe avec la colonne sur roues du 15e B.C.C.
L'ensemble de tous les éléments sur roues de la 2e D.C.r. se trouve alors sous les ordres du lieutenant colonel Colhen.
b) Par voie ferrée : les éléments à embarquer sont groupés en 5 rames comprenant chacune :
1ère rame : état-major de la 2e demi-brigade, état-major du 8e B.C.C., six camions, les véhicules radio et de liaison de la brigade et du bataillon, la section de remplacement et le char de commandement du 8e B.C.C.
Commandant du train : chef de bataillon Girier
Embarquement : gare de Suippes, le 14 mai à 4h30
2e rame : matériel de la 1ère compagnie : chars T.L.R. véhicules chenillés, camions à vivres et à bagages, les voitures de liaison.
Commandant du train : lieutenant Dupont.
Embarquement : gare de Suippes, le 14 mai à 16h30
3e rame : matériel de la 2e compagnie (même composition que la deuxième rame)
Commandant du train : capitaine Deyber
Embarquement : gare de Suippes, le 15 mai à 3h30
4e rame : matériel de la 3e compagnie (même composition que la deuxième rame)
Commandant du train : capitaine Poupart
Embarquement : gare de Suippes, le 15 mai à 9h30
5e rame : Tracteurs de dépannage, camions atelier, camions citernes et quelques véhicules spéciaux de la C.E.
Commandant du train : capitaine Ledur
Embarquement : gare de Châlons-sur-Marne le 15 mai à 14 heures.
6e rame : rame de ramassage : pour les 8e et 15e bataillons et état-major de la brigade.
Commandant du train : lieutenant Anglicheau.
Embarquement : gare de Châlons le 15 mai à 12 heures.
Les débarquements, sauf pour les 1ères et 2èmes rames, n'ont pas lieu aux gares assignées.
La première rame débarque en gare de Hirson le 15 mai sans incident. (5h30).
La deuxième rame (1ère compagnie) débarque en gare de Hirson le 15 à 16h30 et reçoit quelques coups de feu provenant des maisons voisines de la gare.
La troisième rame (2e compagnie) débarque en gare de la Capelle le 16 à 10 heures.
La quatrième rame (3e compagnie) débarque le 16 à 17 heures en gare de Saint-Quentin.
La cinquième rame (C.E.) débarque à Saint-Quentin le 16 à 18 heures.
Les éléments débarqués de la première rame rejoignent la grande forêt de Signy où sont déjà groupés les véhicules de la colonne Robin.
Ces éléments arrivent dans la forêt vers 10 heures.
En passant à Maranvez, vers neuf heures, un capitaine d'artillerie signale au chef de bataillon Girier que le sud de la forêt de Signy est tenu par l'ennemi depuis plusieurs heures.
À 11 heures, la partie nord de la forêt est bombardée.
Vers 15h30 des militaires et des civils qui se replient en direction du sud de signalent que le village de Liard, dont plusieurs maisons sont en flammes, est occupé par l'ennemi et que les éléments légers ont été vus au nord-est de la forêt vers le carrefour de la Guinguette, progressant en direction de Signy.
À la même heure la section Robert reçoit l'ordre de se porter sans délai au nord de Wassigny. Les faits relatifs à son engagement sont consignés dans le rapport du lieutenant Robert.
Les dispositions de défense de la forêt sont immédiatement prises :
trois groupes de six motocyclistes, armés de mitrailleuses et de mousquetons sont formés et reçoivent l'ordre d'aller sans délai se porter l'un au nord de la forêt (cote 251), l'autre sur la côte de Merlemant (cote 255). Le 3e sur la route de la Saboterie (cote 228) avec mission d'interdire l'accès de la forêt.
Deux pièces de 75 tractées faisant partie d'un groupe qui se replie vers le sud sont stoppées sur la demande du capitaine de Cugnac commandant l'ensemble des trois groupes émis en batterie sur la route de Signy est à Marlement (côte 228).
Deux chars ennemis se présentent sur la route et sont détruits par le tir de ses pièces. Leurs débris barre le passage au reste de la colonne blindée qui descendait sur Signy.
Le repli vers le sud de tous les éléments bivouaqués en forêt commence à 17h30, en direction des bois de Paddois (point de 1ère destination). Les éléments qui font mouvement par petits groupes de cinq ou six véhicules se heurtent durant toute la nuit à des colonnes ennemies, en particulier sur la route de nationale Liard - Mersornet.
Tous les groupes qui n'ont pu être touchés par le chef de bataillon au cours de la nuit reçoivent l'ordre de se porter au sud de L'Aisne, dans les bois du Châtelet, où sont rassemblés le 16 dans la matinée. Quelques véhicules ont été détruits dans des embuscades tendues par l'ennemi, où n'ont pas pu rejoindre ce dernier point. Après regroupement, le commandant Girier établit au cours de la nuit, son PC au Châtelet.
Les éléments de combat des 1ère, 2e et 3e compagnie sont employés le 16 mai, au fur et à mesure de leur débarquement, sur l'ordre d'autorités militaires locales, à la défense fragmentaire des issues de Vervins, de Guise, et des ponts de l'Oise entre Guise et La Fère.
Plusieurs chars des 1ère et 3e compagnies sont détachées de leur unité et reçoivent directement d'un officier d'état-major de la IXe Armée des missions isolées entre Vervins, Guise, Seboncourt et Andigny.
Le 17 mai, le reste de la 1ère et 3e compagnies assure la défense des ponts de l'Oise, entre Origny inclus et La Fère. La section Robert est à Rethel, où elle est employée à la défense des ponts de l'Aisne.
À neuf heures, le chef de bataillon prend contact avec les éléments encore groupés des 1ère et 3e compagnies qui poursuivaient leur mission de défense de l'Oise, il les reporte dans la soirée sur le canal Crozat.
Il n'aura désormais plus aucune nouvelle des éléments de combat de la 2e compagnie restés au bois d'Etaves et Bocquiau, avec une section de la 3e compagnie, ni des cinq chars de la 1ère compagnie, qui avaient reçu des missions isolées.
À 21 heures, les éléments regroupés du 8e bataillon quittent les ponts du Canal Crozat, et arrivent à Cuy, 7 km ouest de Noyon où ils stationnent le 18 mai.
Dans la nuit du 18 au 19, ils se portent vers Ham par Guiscard où les pleins (munitions et essence) sont complétés le 19 vers 3h30.

II - 19 MAI - COMBATS DE HAM
Un détachement comprenant :
7 chars B1 bis du 15e B.C.C.
5 chars B1 bis du 8e B.C.C. reçoit la double mission suivante :
1° dégager la ville de Ham
2° pousser en direction nord-est au sud de Saint-Quentin, sur la route de Ham à Saint-Quentin entre le canal Crozat au nord et la vallée de l'Oise au sud sur l'axe Ham, Ersigny, Urvillers, Itancourt, Neuville Saint-Laurent où elle doit s'installer défensivement et attendre l'infanterie chargée d'occuper ce point.
Le détachement quitte Cury le 19 mai à une heure, complète ses pleins à Guiscard entre 2h30 et 3h30 et arrive à Ham - sortie sud du village, à sept heures.
Le colonel Roche, commandant la brigade et le chef de bataillon Girier prennent contact avec le commandant du G.R.D.I. et le commandant du bataillon du 141e R.I. qui occupent le sud de la voie ferrée, Ham étant déjà aux mains de l'ennemi.
L'heure H est fixée à huit heures.
Pour l'attaque, la colonne est fractionnée en deux échelons.
1° échelon : une compagnie à 9 chars B1 bis, sous le commandement du capitaine Vaudremont,
2° échelon : une section réservée de 3 chars B1 bis commandée par le lieutenant Lamoine.
La compagnie de premier échelon démonte et traverse le barrage établi sur le pont du canal par le G.R.D.I. et capture une vingtaine d'Allemands.
La rue principale est barrée par des voitures garnies de mines.
Un passage est ménagé sur le trottoir, il est miné. Les équipages de tête détruit au canon et à la mitrailleuse, un certain nombre de mines, les prisonniers allemands enlèvent le reste.
L'ennemi met le feu aux voitures du barrage et les chars ne peuvent le franchir que vers 9h30. Dès leur débouché, ils sont pris à partie par un canon de 47 français et un 37 Allemand.
Ces deux pièces sont détruites par les chars de tête. Des grenades sont lancées les fenêtres. Les mitrailleuses des chars font cesser cet envoi.
Des antichars sont postés dans les rues latérales. La compagnie fait un circuit fermé pour nettoyer la ville et se regroupe. Le char de tête, à court de munitions, se fait relayer par le suivant. La compagnie repart suivi de quelques motocyclistes du G.R.D.I. Elle est à nouveau prise à partie par des antichars, en détruit cinq, plus un canon automoteur chenillé à long tube.
Un char B signale par radio que son radiateur est percé. Un autre, que son barbotin est endommagé. Deux autres sont également atteints.
Le char de tête est à nouveau relayé et la compagnie reprend sa progression dans les rues de Ham.
À la sortie nord-ouest du village, nouveau barrage battu par des antichars de gros calibre. Un antichars est détruit, des voitures de tourisme qui fuient sont prises en chasse à la mitrailleuse.
Le barrage subsiste ; les motocyclistes se replient : il est 12 heures.
L'essence et les munitions touchent à leur fin, l'infanterie n'a pu suivre et l'ordre de ralliement des chars à la P.R. est donné à midi. Un char du 15e B.C.C. est remorqué sur la P.R. par un char du 8e. Le retour s'effectue sans perte. Trois chars sont laissés en surveillance derrière le barrage français à 300 m au sud de la voie ferrée, les autres sont repliés sur Guiscard. L'un d'eux casse son barbotin gauche et est immobilisé à 1,5 km au sud de Ham, sur la route Ham - Guiscard.
Vers 18 heures, 24 bombardiers ennemis attaquent en piqué les chars maintenus au sud de la voie ferrée et, malgré la durée et la violence du bombardement, aucun dégât, ni aux matériels ni aux équipages.
L'incendie de Ham continue jusqu'au soir du 20 mai.
Le bombardement terminé, les chars et un canon de 75 en position à proximité détruisent un observatoire qui réglait les tirs de l'artillerie ennemie, celle-ci reprend dans l'après-midi du 19, le bombardement des chars postés et le continue le lendemain 20.
Dans l'après-midi du 20 mai, l'ordre est donné au commandant du G.R.D.I. de faire sauter le pont du canal qui est détruit, et les trois chars se replient, la nuit venue tandis que s'éteignait l'incendie de la ville.
La section Robert tient toujours à Rethel qu'elle ne quittera que le 22 mai.

III - PERIODE DU 21 AU 23 MAI
Les éléments des 8e et 15e bataillons sont regroupés au sud de la forêt de Compiègne où ils stationnent dans les bois du Roi, au sud de Crépy en Valois.
Le 8e bataillon reçoit en renfort en plus des éléments du 15e bataillon, les compagnies 347, 349 et 351.
Tous les éléments qui forment le bataillon de marche 8/15 quittent le bois du Roi le 22 mai pour Cury où ils arrivent le 23 mai vers quatre heures, sauf la 347e (chars B1) qui ne peut rejoindre.
Départ de Cury, le 23 mai à 20 heures.
Point de première destination : Roiglise où les ordres sont donnés dans le colonel commandant la 2e demi-brigade cuirassée pour la constitution de 3 groupements tactiques et pour les dispositions à prendre en vue des opérations projetées au sud de Péronne.
 
IV - PERIODE DU 24 AU 25 MAI 1940 - ATTAQUES AU SUD DE PERRONE
24 mai : combats de Villers Carbonnel - Pont les Brie
25 mai : combats de Licourt - Epenancourt
24 mai :
Un groupement tactique est constitué le 24 mai.
Il comprend :
L'état-major du 8e bataillon de chars.
Une compagnie de chars légers (2e compagnie du 40e bataillon).
Une section de chars B1 bis (349e compagnie).
Une compagnie de chasseurs portés (1ère compagnie du 17e B.C.P.), capitaine Bouff.
Un canon de 25, deux canons de 47 (batterie antichars divisionnaire).
Ce groupement a pour mission de s'emparer de Villers Carbonnel et de Pont les Brie, de détruire toutes les résistances qui s'opposeraient à sa progression et de permettre à l'infanterie de s'installer définitivement sur ces deux points importants.
La colonne est fractionnée comme suit :
une section de R 35
une section de B1 bis
deux sections de R 35 dont une avec pour mission de protéger au nord le débarquement des chasseurs à Villers Carbonnel.
une compagnie de chasseurs portés renforcée d'un canon de 25 et d'une section de canons de 47.
Le PC du bataillon avec deux chars B1 bis de commandement.
Une section de R 35 réservée.
Le déroulement des opérations s'effectue dans les conditions ci-après :
Départ à six heures.
Les éléments de tête abordent le dispositif ennemi à la sortie nord de Marchelepot à hauteur de la station à 7h30.
Progressant sur la route de Fresne - Mazancourt, la colonne réduit plusieurs centres de résistance (armes antichars et armes automatiques) en batterie aux lisières sud des bois à 800 m nord-ouest de Marchelepot, à la cote 90 et dans les bois à l'est de la route nationale Roy - Peronne à hauteur de Misery.
Plusieurs groupes ennemis fuient en hâte en direction nord, partie à pied, partie en camions et se dirigent vers Villers Carbonnel et Pont les Brie. Fresne-Mazaucourt est abordé à huit heures. Les éléments qui occupent le village sont rapidement maîtrisés.
À 8h30 Villers Carbonnel est atteint. Ce village est très fortement tenu : de nombreuses armes antichars et armes automatiques installées au grand carrefour de la route de Saint-Quentin sont anéanties. Les premiers éléments de chasseurs portés peuvent débarquer sans trop de difficultés aux lisières sud du village sous la protection de la section de chars R 35 qui a gagné les lisières nord et est.
Des observateurs du G.R.D.I. installés dans le clocher de Marchelepot signalent à 9h15 que des éléments ennemis importants partent du village de Berny et utilisent les couverts (buissons et chemins creux) entre Horguy Berny et Fresnes, pour progresser vers le sud.
Un violent tir des chars de commandement et de la section réservée de chars R 35 stoppe cette progression vers 9h30, l'ennemi reprend sa progression sur le même axe avec des éléments de plus en plus importants. Ceux de tête arrivent à moins de 300 m du PC du bataillon.
La section réservée appuyée par les feux des deux chars B1 bis de commandement est lancée en contre-attaque sur ces éléments. L'attaque ennemie est brisée. La plupart des assaillants sont tués sur place, le reste soit : un officier, trois sous-officiers et 24 hommes de troupe sont faits prisonniers.
À 10h45 les chars suivis des chasseurs portés débarqués à Villers Carbonnel, arrivent à Pont les Brie, anéantissent toutes les résistances et organisent la défense du village et du pont. Le colonel commandant le G.R.D.I. signale à 11 heures qu'un important îlot de résistance ennemi (150 hommes environ) s'organise dans le parc du château de Misery et tire sur Marchelepot.
À 11h15, quelques groupes qui cherchent à déboucher du parc du château de Misery, sont immédiatement pris sous le feu des chars PC et de la section réservée.
Les chasseurs portés installés à Pont les Brie sont relevés à 11h30 par des éléments d'infanterie transportés par les tracteurs disponibles de la compagnie de chasseurs.
Vers 11h45 l'Officier de renseignements du bataillon (lieutenant Plattard) signale que d'importants éléments d'infanterie ennemis transportés par camions, s'installent à Berny et dans les boqueteaux à l'est.
La menace à l'ouest s'accentuant, une section de chars de la compagnie réservée à la disposition du colonel commandant la 2e demi-brigade est demandée d'urgence ainsi qu'un tir d'artillerie sur le village de Berny et les boqueteaux à l'est de ce village.
Le nord de Villers Carbonnel est encore très fortement tenu par l'ennemi.
Vers 13h15 une très violente contre-attaque d'engins blindés ennemis accompagnés d'infanterie, débouche de l'ouest de Villers Carbonnel et menace la colonne d'encerclement.
Cette contre-attaque est stoppée par le feu des chars PC et de la section réservée en position à 400 m sud de Villers Carbonnel. Simultanément d'importants détachements continuent à débarquer dans le village de Berny et les bois au sud-est. La demande d'une section supplémentaire de chars R 35 de la compagnie réservée est renouvelée ainsi que celle concernant les tirs d'artillerie.
L'artillerie ennemie prend à partie le PC du bataillon et la section réservée, mais les tirs sont mal réglés et les dégâts sont nuls. La défense du pont d'Epenancourt étant assurée par l'infanterie.
Les deux sections de chars sont repliées aux abords immédiats de Villers Carbonnel à 14h30.
Ce village très sérieusement bombardé depuis midi, est en flammes.
Vers 15 heures les engins blindés ennemis (six repérés) qui était parvenus à progresser au sud des bois de Berny et qui menaçaient d'encerclement la colonne sont dispersés et refoulés vers le nord par le tir de nos chars.
Le nettoyage par les chasseurs des derniers éléments ennemis retranchés dans les caves de Villers Carbonnel est terminé.
A 16 heures la colonne est reformée en direction du sud avec mission de nettoyer Fresne-Mazancourt qui a été réoccupé par l'ennemi, ainsi que le château de Misery point de résistance important d'où partent depuis le matin des groupes ennemis qui cherchent à s'infiltrer.
Cette double opération réussit parfaitement :
à 17h10 Fresne-Mazancourt est nettoyé. Le château de Misery est pris. Les éléments ennemis qui le défendaient, fuient vers l'est, sont tués sur place ou fait prisonniers. Un certain nombre de ces derniers qu'il n'a pas été possible de dénombrer sont remis au 22e R.I. régiment de marche qui prend possession du château, du parc et des bois.
La colonne est ensuite dirigée sur Marchelepot où les appareils font leur plein.
Pertes en personnel et en matériel :
2 blessés
2 chars R 35 détruits.

25 MAI 1940 : COMBATS DE LICOURT - EPENANCOURT
Le groupement tactique, renforcée de la 2e compagnie du 17e B.C.P. (capitaine Paoli) reçoit l'ordre de reprendre la tête de pont d'Epenancourt.
La colonne est reformée dans le même dispositif que la veille, sa tête à Marchelepot.
Elle débouche de Marchelepot à 1 heure, le village de Licourt est atteint à 2 heures. Un dispositif de sécurité (1ère compagnie de chasseurs portés (capitaine Paoli)) est installé au nord de Licourt. Les chars arrivent au pont d'Epenancourt à 2h45 suivis de la 1ère compagnie de chasseurs portés (capitaine Bouff). Le pont est pris et la défense est immédiatement mise en place.
Peu de réaction de l'ennemi.
À 4h15 aucune nouvelle de la compagnie d'infanterie qui doit relever les chasseurs à Epenancourt. Les chasseurs pris sous un très violent bombardement d'artillerie et de mortiers et sous le feu de nombreuses armes automatiques, sont forcés de se replier sur Licourt.
Le village est organisé défensivement avec l'appoint d'une partie de la 3e compagnie du 117e régiment d'infanterie amenée par le commandant Gillis de l'état-major de la D.C.R.
A 10h30 le bombardement de Licourt continue causant des pertes sévères, notamment à la compagnie Paoli.
L'ordre de repli des chars sur Etalon - Bois d'Herly arrive au PC à 11 heures.
Pertes en personnel et en matériel :
personnel : 1 tué, 4 blessés.
Matériel : Néant
 
V - PERIODE DU 26 MAI AU 4 JUIN 1940
Le bataillon regroupé à Etalon - Bois d'Erly a pour mission d'assurer la défense des bois entre Etalon et Herly, contre des attaques venant du Nord ou de l'est.
À 21 heures, le départ pour Villers les Roye (PC du bataillon et 349e compagnie, capitaine Marcille), l'Echelle Saint Aubin (351e compagnie, capitaine Colosiez), Audechy (2 chars de commandement).
L'arrivée du bataillon à Villers les Roye a lieu le 27 mai à trois heures :
mission : garde des issues, sûreté habituelle.
Le 28 mai : stationnement dans les localités ci-dessus, même mission.
Départ à 21 heures pour Quiry le Sec (PC et 347e compagnie) et Esclainvillers (349e compagnie) où le bataillon arrive le 29 mai à quatre heures. Il en repart trois heures plus tard pour Bonneuil les Eaux, où il arrive vers 11 heures.
Mission : se mettre en situation d'attaquer tout blindé ennemi qui déboucherait du Nord.
La compagnie 348 (capitaine Legraverand) qui stationnent au Bois de l'Hôpital est mise à la disposition du bataillon 8/15.
Elle se porte dans l'après-midi du 29 dans les bois au sud de Querbigny.
Le 29 mai à 19 heures, départ pour Grivesnes (PC et 348e compagnie), Ainval - Septoutre (347e), Esclainvilers (349e).
Arrivée le même jour vers 23 heures. Stationnement dans les localités ci-dessus toute la journée du 30.
Mission : s'opposer à des attaques éventuelles en direction du Nord. Garde des issues, sûreté habituelle.
Le 31 mai à 23h30, départ de Grivesnes pour :
Laboissière : (PC et 348e compagnie)
Lignières : (347e compagnie)
Becquigny : (349e compagnie)
1er juin, stationnement dans les localités ci-dessus.
Mission habituelle.
À 21 heures, départ pour les bois à l'ouest de Taisnil.
Arrivée le 2 juin à trois heures. La journée du 2 est employée à la visite des appareils et de l'armement, au graissage et aux pleins.
2 juin à 20h45, départ pour les bois de la Cavette (nord de la Neslette). Arrivée à 23 heures.
3 juin, stationnement. Reconnaissances de terrain pays d'itinéraires par les cadres. Préparation du matériel, réglage des postes, ajustage des réseaux. Vérification des armes et des appareils de pointage.
Le lieutenant Dupont rejoint le bataillon vers 16 heures avec 6 chars B1 bis, provenant des ateliers de l'échelon.
Le bataillon quitte les bois de la Cavette à 21h30 et se porte sur ses positions de départ.
Point de première destination : Grébault - Mesnil où les pleins sont effectués entre le 23 heures et 24 heures.

VI - ATTAQUE DE LA TETE DE PONT D'ABBEVILLE (4 juin 1940)
Le bataillon est constitué à trois compagnies de chars B1 et B1 bis
Compagnies chars provenant de l'unité ci-dessous :
1ère Compagnie commandée par le lieutenant Dupont du 8e B.C.C.  
348e Compagnie commandée par le capitaine Fissiaux      
349e Compagnie commandée par le capitaine Marcille                          
1 char de commandement MARSEILLE n° 234                                 
DISPOSITIF :
1er échelon - à droite : la 348e compagnie Fissiaux, opère dans la zone est du ravin de Boencourt entre la route d'Abbeville à Rouen et le ravin.
à gauche : la compagnie Dupont, opère dans la zone boisée ouest du même ravin à travers le village de Bienfay et de Mesnil Trois Foetus.
2e échelon - la 349e compagnie Marcille, progresse à travers la zone est, dans les traces de la 348e compagnie.
Les compagnies atteignent leur positions de départ le 4 juin à trois heures :
Compagnie Dupont avec 7 chars,
Compagnie Fissiaux avec 7 chars,
Compagnie Marcille avec 6 chars,
et le char de commandement, soit 21 chars au total.
Elles débouchent à 3h20. Un brouillard intense amène des chars de la compagnie Dupont à dévier de leur axe de marche.
Ils partent en direction du nord-est.
Les trois compagnies franchissent peu après l'heure H (3h30) la ligne tenue par l'infanterie écossaise (152e brigade).
Les unités du premier échelon atteignent et dépassent vers 4h30 le premier objectif (O1) jalonné par :
Mesnil Trois Fœtus - Mont de Caubert.
À huit heures, les compagnies Bouff et Paoli du 17e B.C.P. progressent en direction de O1 avec une extrême difficulté.
La C.E. du capitaine Rebuffel du 17e B.C.P. progresse au fond du ravin de Boencourt est atteint le carrefour ouest du Mont de Caubert au nord du bois de Villers.
La compagnie Gelot du 17e B.C.P. atteint et occupe les lisières sud des vergers de Mesnil Trois Foetus.
Un des chars de la compagnie Dupont qui avait atteint la route nationale d'Abbeville rejoint sa compagnie vers six heures dans le ravin de Boencourt au sud-est de Mesnil Trois Foetus après avoir aidé la compagnie Rebuffel du 17e B.C.P. a progresser dans ce ravin où elle était bloquée par des feux provenant des lisières nord-ouest du bois de Villers et des crêtes nord du ravin.
Quatre chars seulement, 2 de la compagnie de droite de premier échelon (Fissiaux) et 2 de la compagnie de gauche (Dupont) atteignent et dépassent vers six heures le second objectif O2 jalonné par :
la crête militaire du Camp de César et la croupe à l'est de Yonval.
La compagnie Fissiaux perd 4 chars sur les mines entre la ligne ennemie et le premier objectif dans le goulot entre le bois de Villers et la route nationale à la naissance du ravin est ouest, 500 m au nord de Mareuil Caubert.
Ce ravin est fortement tenu par des antichars.
Les compagnies Bouff et Paoli du 17e B.C.P. s'installent vers 7h50 à proximité de cette ligne et de la côte 104, sur la route nationale.
La compagnie Dupont qui progresse sur la pente est du ravin central perd 4 chars par antichars de gros calibre, en batterie à la lisière ouest du bois de Villers et sur les pentes nord du ravin à hauteur de Mesnil Trois Fœtus et du Camp de César.
La compagnie Gelot du 17e B.C.P. atteint Mesnil Trois Fœtus vers 9h30, appuyée à droite par les Écossais.
La compagnie Marcille qui suit la compagnie Fissiaux en deuxième échelon peut éviter les champs de mines en les contournant par l'est vers la route d'Abbeville, mais elle perd 2 chars par antichars de gros calibre en batterie dans le ravin nord de Mareuil.
Les 6 chars B restants, progressent dès lors sans grande difficulté, dépassent le second objectif et nettoient les pentes nord-est de l'éperon du Camp de César, à l'est et les ravins transversaux de Yonval à l'ouest.
Les chars de droite sont néanmoins soumis à de violents tirs d'artillerie provenant de la rive droite de la Somme.
L'infanterie écossaise, par contre, ne peut déboucher, les bois de Villers étant encore tenus dans leur partie nord par plusieurs des armes antichars et automatiques.
D'autres armes antichars et automatiques ennemies viennent s'installer (ou se démasquent) sur la route nationale, à hauteur du ravin 500 m nord de Mareuil Caubert, leur feu ralentit la progression des chars d'accompagnement (dont plusieurs sautent sur des mines) et stoppent l'infanterie écossaise à droite.
Des groupes ennemis traversent le plateau du Mont Caubert et viennent installer sur les lisières est du bois de Villers des armes antichars et automatiques qui en renforcent la défense.
À partir de neuf heures les lisières sud de du bois de Villers, le ravin à l'est de Bienfay et les vergers sud de Mesnil Trois Fœtus sont violemment pris à partie par l'artillerie et l'aviation ennemie qui bombarde en piqué.
Les chasseurs des compagnies Bouff et Paoli déployés sur la parallèle Bienfay - Côte 104, sont également bombardés en piqué et mitraillés.
Non suivis par l'infanterie et les chars d'accompagnement, les deux chars B de la compagnie Fissiaux gagnent la lisière sud-est du bois de Villers tandis que les deux chars B de la compagnie Dupont se défilent dans le ravin à 200 m est de Bienfay, sur la route de Mareuil. Au cours de ces mouvements, l'un des 2 chars de la compagnie Marcille qui regagne également le bois de Villers est immobilisé à proximité de la lisière du nord-est du bois de Villers par une quinzaine de coups d'antichars.
Un char B de la compagnie Dupont saute sur une mine à 150 m des vergers sud de Mesnil Trois Foetus, après avoir détruit 6 antichars en action dans ces vergers. Son équipage reste en char jusqu'à 22 heures en tenant sous le feu de son canon de 47 et de ses mitrailleuses, l'infanterie ennemie qui ne peut déboucher des vergers.
Les éléments de combat sont ralliés aux lisières sud du bois de Villers vers neuf heures. Un char de la compagnie Fissiaux resté en panne avant la P.D. rejoint la P.R. par ses propres moyens.
Tous les éléments quittent le bois de Villers vers 18 heures et sont rassemblés dans les bois à l'est de Grébault-Mesnil.
Le bataillon arrive au bois de La Cavette entre 23 heures et 24 heures.
Pertes.
Personnel :
Tués : 1 aspirant, 2 hommes de troupe
Disparus : 2 officiers, 1 sous-officier, 6 hommes de troupe.
Matériel :

Compagnie Quittent la P.D Détruits par  regagnent la P.R.
    antichars mines panne de terrain incendie  
Fissiaux 7 1 4     2
Dupont 7 3   1 1 2
Marcille 6 3 1 1   1
Commandement 1         1
Total : 21 7 5 2 1 6

  
5 juin 1940 - le bataillon quitte Neslette pour Sommereux vers 16 heures. Un char B en panne à Marseille en Beauvaisis est remorqué par l'élément avancé d'atelier.
Arrivée à Sommereux vers 23h30.
 
VII - PERIODE DU 6 AU 9 JUIN 1940
 
Le 6 juin, stationnement à Sommereux, même mission, garde des issues - sûreté habituelle.
Dans l'après-midi, un groupe de six chars Somua et de cinq chars Hotchkiss commandé par le capitaine Leger du 7e cuirassiers, vient renforcer le bataillon.
Deux reconnaissances (chars B et chars légers) sont effectuées sur Poix, l'une dans la route nationale Grandvilliers - Poix, l'autre par Thieulloy - Saulchon - Poix.
Ces reconnaissances identifient une Panzerdivision bivouaquée dans les bois ouest de Poix. Une section de canons de 47, protégée par trois chars B est mis en batterie sur la croupe sud du village.
La journée se passe sans incident notable.
Le 7 juin, à 20 heures le bataillon reçoit l'ordre de se replier sur Auchy la Montagne.
Une patrouille de trois chars (1 Somua, 2 Hotchkiss) est envoyée au carrefour Le Hamel, route Grandvilliers - Crèvecoeur pour protéger vers l'ouest le repli du 17e Bataillon de Chasseurs Portés pendant que les autres chars en position au sud du village de Sommereux assurent le décrochage de la colonne.
Le bataillon arrive à Auchy la Montagne vers 23h30.
Le 8 juin, une reconnaissance de trois chars (1 Somua, 2 Hotchkiss) est poussée vers la route Crèvecoeur à Francastel où avait été signalée la présence d'engins blindés ennemis.
Le bataillon quitte Auchy la Montagne à 20h30, lorsque la sortie sud du village les éléments de tête (chars et véhicules du PC) sont accrochés par des automitrailleuses et des chars ennemis.
Automitrailleuses et chars sont détruits, mais le convoi sur roues (véhicules du PC du bataillon) pris sous le feu, perd :
Un tué, deux blessés graves et cinq blessés légers.
La voiture médicale et les deux voitures de liaison du bataillon sont criblées de balles.
 
VIII - PERIODE DU 10 AU 25 JUIN 1940
 
Le bataillon quitte Fronville à 10 heures le 10 juin, franchit l'Oise à 12 heures et arrive vers 15 heures à Mériel où il reçoit la mission d'organiser la défense des ponts de Mériel et de Mery, en liaison avec le 27e B.C.C. et le 17e B.C.P.
Même stationnement et même mission.
Le 11 juin, les services du Génie font sauter les ponts entre 19 et 20 heures et le bataillon se porte sur Bièvres, en contournant Paris par l'ouest.
Un char Somua en panne au Petit Clamart, qui n'a pu être ni réparé, ni remorqué, est détruit.
Le 12 juin, arrivée à Bièvres vers cinq heures. Stationnement, puis départ pour Montmirault à 16 heures.
Un char Somua en panne à Verrières, n'a pu être ni réparé, ni remorqué. Il est détruit.
Le 13 juin, stationnement à Montmirault. Départ pour Janville à 13 heures, arrivée à Janville à 23 heures.
Mission : assurer la garde des issues.
Un Somua et un Hotchkiss en panne entre La Ferté Allais et Etampes n'ont pu être ni réparés, ni remorqués. Ils sont détruits.
Stationnement à Janville le 15 juin, même mission, départ à 21 heures et arrivée à Bazoches les Gallerandes à 23h30.
Même mission qu'à Janville, sûreté habituelle.
Stationnement à Bazoches les Gallerandes.
Le 16 juin : départ pour Gruy à 20 heures, le bataillon étant en arrière garde de la colonne est de la D.C.R.
Vers 22 heures, la tête de colonne du bataillon se heurte à un barrage ennemi de flanc garde, à ……. (Antichars et armes automatiques). L'itinéraire est détourné vers l'ouest, la colonne franchie la Loire au Pont de Mer, le 17 juin à 10 heures et atteint Gruy à 13 heures.
Départ de Gruy pour Cerbois le 18 juin à quatre heures, passage du Cher à La Chatre, et arrivée à Cerbois (Cher) à 16 heures. Stationnement et bivouac. Mission : défense des bois à l'est de Cerbois.
18 juin : même stationnement, bivouac et même mission que la veille.
Départ de Cerbois le 19 juin à 22h30. Un char Hotchkiss en panne mécanique a été détruit.
Arrivée à Lys Saint Georges le 20 juin à 7h30. Un char Hotchkiss et un char Somua en panne mécanique grave sont détruits.
Départ de Lys Saint Georges (Indre) le même jour à 20h45.
Arrivée à Villard le 21 juin à trois heures.
Départ de Villard le 22 juin à 21 heures.
Arrivée à Chauverne-Neyre le 23 juin à cinq heures. Stationnement, bivouac à Chauverne-Neyre.
Le 22 juin : stationnement, bivouac à Chauverne-Neyre.
Le 25 juin : stationnement, bivouac à Chauverne-Neyre.
 
ARMISTICE
Le bataillon est dissous le 8 juillet 1940 à Bourganeuf (Creuse) par le commandant de la 2e D.C.R. par ordre n° 4475/3.

1940 - 7e BCC 3e compagnie


RELATION DÉTAILLÉE

DU COMBAT DE LA 3e COMPAGNIE DU

7e BATAILLON DE CHARS LÉGERS


à CHEMERY (Ardennes) le 14 MAI 1940

 

 par David Lehmann

 

 
Le 13 mai 1940 à 17 heures, le 7e B.C.L. en position d'attente depuis trois jours aux ALLEUX (près du CHENE POPULEUX en Argonne) recevait l'ordre de ne porter dans les bois sud de SEDAN en vue "éventuellement", de contre-attaquer si l'ennemi réussissait à franchir LA MEUSE. Ce que ne disait pas l'ordre c'est que cette éventualité était un fait accompli depuis quelques heures.
Le mouvement des chars a commencé dès la tombée de la nuit en utilisant la route nationale VOUZIERS-SEDAN, seul itinéraire possible. Les compagnies sont mises en route dans l'ordre 1-2-3. Cette progression dans la nuit, qui aurait du demander trois heures au maximum se prolongea jusqu'au lendemain matin 6 heures. Une panique effroyable, à la nouvelle que les Allemands avaient franchi LA MEUSE avait jeté pêle-mêle sur les chemins, populations civiles, équipages militaires désemparés, convois, etc ..... Toute cette cohue se repliait sur VOUZIERS en encombrant la route d'un triple et même quadruple courant. Tandis que les chars légers du 7e B.C.L. se frayaient péniblement un passage vers le nord.
A 5 heures du matin, la 3e Compagnie est en entier au Bois du Mont Dieu :(13 chars et un élément avancé de son échelon sur roues). Elle est loin d'avoir atteint son point de destination (il est vrai que les Boches y sont depuis la veille), les équipages sont exténuée par 8 heures d'un pénible pilotage nocturne. La route s'est un peu dégagée mais il fait jour et les avions ennemie commencent leur ronde. Déjà le camouflage est entrepris quand le capitaine MIGNOTTE commandant la compagnie reçoit l'ordre de se mettre à la disposition de la 55e division d'infanterie pour contre-attaquer en direction de SEDAN dès le lever du jour. Le rendez-vous fixé est CHÉMERY (6 km plus au Nord) avant 4 heures du matin. Il est 4 heures 45 !
Plus personne ne songe à la fatigue. Les hommes comme les gradés sont furieux du retard qu'ils ont du subir. Le combat est engagé sans eux ! Ils ont raté leur baptême du feu ! Du moins ils le croient.
Tandis que le commandant de compagnie fonce en moto à CHEMERY au P.C. de la division, le lieutenant adjoint (lieutenant HERAUD reforme la colonne de chars et reprend la route. On se moque bien du camouflage anti-aérien, il faut arriver. Malheur à la "401 Peugeot" d'un artilleur endimanché, elle refuse d'appuyer à droite pour ne pas égratigner sa belle carrosserie aux ronces qui débordent. La colonne de chars est passée …… la "401" n'a plus d'aile gauche et son conducteur vocifère au milieu de la route.
A CHEMERY la division est déjà partie et c'est un officier envoyé par le commandant GIORDANI (commandant du 7e B.C.L.) qui met le commandant de la 3e compagnie au courant de sa mission. Elle est à la fois simple et tragique et peut s'exprimer ainsi :
"La situation empire d'heure en heure. Les Boches ont franchi la MEUSE avec "quelques" éléments transportés sur camions et autos. Il faut barrer la route SEDAN-VOUZIERS, la nettoyer de tout ennemi et si possible pousser jusqu'à SEDAN. A tout le moins résister sur place jusqu'à l'arrivée de renforts qu'on ne doit pas espérer avant ce soir. Il reste très peu d'infanterie, aucune artillerie et aucune aviation pour aider l'action des chars qui ne devront compter que sur eux. La 3e Compagnie agira seule pour barrer l'axe routier SEDAN-VOUZIERS et la vallée de LA BAR. Le succès réside à sa rapidité d'intervention. Les deux autres compagnies du bataillon seront à 3 km plus à l'est pour tenir les débouchés des bois.
La colonne de chars n'étant pas encore arrivée, le commandant de compagnie en profite pour reconnaître le terrain d'action et voir sur quelle infanterie il peut compter. Il s'engage, toujours en moto, la route de SEDAN. Quelques fantassins sont à la sortie Nord de CHEMERY avec un chef de bataillon et un sous-lieutenant. Ne pouvant croire que ce soit là la seule infanterie destinée à la défense de la vallée le capitaine de chars poursuit sa route vers le nord à la recherche de son infanterie. Près de 2 km sont parcourus sans rencontrer âme qui vive. Le silence devient inquiétant. Revenant à CHEMERY le capitaine de chars y retrouve le chef de bataillon d'infanterie qui l'informe que c'est bien son bataillon qui doit progresser "en marche d'approche" vers SEDAN. Il ajoute qu'il dispose en tout à peine de l'effectif d'une compagnie. Contemplant la poignée d'hommes, l'officier de chars n'est pas bien sûr qu'il ne se vante.
Les fantassins qui sont là sont exténués. Ils ont du se replier dans la nuit en proie aux sinistres rumeurs que répand "une cinquième colonne" très active et dont on ne se méfie pas encore suffisamment. Deux jours de bombardements aériens ont brisé les nerfs de ces hommes qui n'avaient jamais vu le feu. Il n'y a que deux chargeurs par F.M., pas une grenade, un seul canon de 25mm servi par des coloniaux venus d'une compagnie divisionnaire.
Tout ceci n'impressionne nullement le capitaine de chars qui a confiance dans son matériel : 13 chars F.C.M. de 12 tonnes. Le carburant gasoil garantit encore 12 heures de marche malgré les 8 heures de la nuit précédente. La dotation en munitions est complète. Beaucoup d'obus explosifs mais 12 obus de rupture seulement. Qu'importe, ces obus sont inutiles puisque aucun blindé n'est signalé comme ayant passé la MEUSE.
Un coup d'œil sur la carte indique un étranglement de la vallée à 1200 mètres au nord de CHEMERY. A cet endroit la rivière LA BAR borde la route et constitue un obstacle presque absolu dans la partie ouest de la vallée. Sur son rebord est la route est dominée par un talus boisé qui se soude à la hauteur du bois de NAUMAY ; sur ce flanc de la vallée il ne saurait y avoir que des infiltrations d'éléments à pied. L'intention du chef des chars est d'atteindre ce point favorable le plus vite possible pour ne pas être tourné. Ensuite on verra.
La colonne de chars dirigée par le lieutenant HERAUD en tête dans le char de commandement, arrive à 6 heures 10 à la sortie nord de CHEMERY. Les minutes sont précieuses, impossible de donner des ordres détaillés, il faut gagner l'ennemi de vitesse. Une seule tactique possible : le capitaine, dans son char, fera manœuvrer la compagnie au fanion. La section de tête est celle du sous-lieutenant PAGES ; elle demeurera en tête et progressera sur l'axe de la route, le lieutenant HERAUD préviendra au passage les autres chefs de section de se conformer à l'attitude du capitaine
La compagnie s'ébranle, la char PAGES sur la route, le char du capitaine ayant déboîté sur la gauche est entre LA BAR et la route. Les autres sections sont encore dans CHEMERY mais déjà ramassées et prêtes à s'élancer. Quelques fantassins sont tapis au bord de la route et dans les broussailles qui bordent la rivière ; la présence des chars les rassure un peu, mais ils sentent leur faiblesse numérique et n'ont pas l'air d'avoir grande envie de progresser. Les chars ont parcouru quelques centaines de mètres quand éclate le premier coup de canon. C'est une pièce anti-char boche dissimulée sur le rebord est de la route qui vient de se dévoiler et ouvre le feu sur le char de PAGES (cette pièce ne s'était pas révélée quand le capitaine était passé à côté au cours de sa reconnaissance en moto une demi-heure plus tôt). Instant de surprise et d'émoi. Tous les chars s'arrêtent : c'est le baptême du feu terrestre !
Mais ce flottement ne dure pas. Tandis que la section PAGES riposte sur l'engin ennemi, le capitaine s'élance dans la prairie en ordonnant en bataille avec son fanion. La section du sous-lieutenant LACROIX voit le signal et s'engage sur les traces du char de commandement, mais la section de l'aspirant LOISEAU n'a pas vu le petit fanion blanc et vert. Elle reste sur la route derrière la section PAGES empêchant le débouché de la section du sous-lieutenant LEVITTE. Le commandant de compagnie revient en arrière et se plaçant près des sections LEVITTE et LOISEAU il recommence le signal en bataille. Le lieutenant LEVITTE se rendant compte de l'appel qui lui adresse son commandent de compagnie bondit littéralement avec son char qui vient se placer à côté le celui du capitaine et entre en liaison à voix. La section LOISEAU procède par imitation et quand le char de commandement reprend la tête il est suivi par la compagnie déployée. Le char de PAGES n'a pas cessé de subir le feu de l'ennemi pendant cette manœuvre. Un obus lui a brisé une chenille et toute cette section est bloquée sur la route.
A ce moment une deuxième pièce anti-char se révèle un peu plus loin dans le fossé de la route. Mais cette fois la compagnie de chars est lancée et les deux engins ennemis sont détruits en très peu de temps par la concentration de feux des chars. Beaucoup de coups ont frappé le blindage des "F.C.M.", aucun n'a perforé. Les équipages prennent conscience de leur puissance et c'est la ruée vers le goulet. Quelques éléments ennemis ont été aperçus, ils sont massacrés ou disparaissent dans les carrières et dans les bois. L'étranglement de la vallée est atteint.
Avant de poursuivre plus loin, il faudrait quelques éléments d'infanterie pour tenir ce passage. Or l'infanterie est restée à CHEMERY, se contentant d'accompagner les chars de ses vœux !
Manœuvrant au fanion, la compagnie revient en arrière pour reprendre le contact. Vieille réminiscence de l'Ecole des chars : "L'infanterie ne suit pas. Que fait-on ?"
Assis sur sa porte de tourelle, pour bien montrer que tout danger était écarté, le capitaine exhorte quelques fantassins à le suivre et c'est ainsi que les chars repartent en avant en ramenant une dizaine d'hommes. Sitôt le goulet dépassé on aperçoit à 600 mètres, dans le fond de la vallée, le village de CONNAGE un peu à l'ouest de la route nationale.
Tout le terrain entre CHEMERY et le goulet étant déblayé le capitaine engage son char au-delà de l'étranglement et se porte sur CONNAGE suivi des sections LOISEAU et LACROIX. La section LEVITTE qui longeait le cours de LA BAR s'est embourbée dans un marigot. La section PAGES dont le char de tête n'a pu être encore réparé est toujours immobilisée sur la route un peu au Nord de CHEMERY.
Le mouvement sur CONNAGE s'exécute sans incident. Le village et ses abords sud ont été évacués par les Allemands. Toujours commandés au fanion les chars reviennent en arrière du goulet ; au cours de ce déplacement ils reçoivent quelques obus lancés par une batterie anti-char qui vient de s'installer sur la hauteur à l'est de CONNAGE. Un de ces projectiles a mis le feu à la bâche du char du sergent LE TALLEC ; cette bâche, pliée, était arrimée sur le côté du blindage, la rapidité d'intervention n'ayant pas permis de la retirer avant le combat. Dans l'ardeur de la lutte l'équipage ne s'est aperçu de rien et le feu risque de se communiquer au réservoir de gasoil. Le capitaine descendant de son appareil se porte vers le char en danger réussit à décrocher la bâche enflammée.
Aucun coup de feu ne retentit, ce que voyant le sous-lieutenant LACROIX sort du char à son tour et vient prendre les ordres de son chef pour la suite de l'affaire.
A ce moment six chars sont réunis aux abords de l'embranchement de route dans un angle mort qui lui permet d'échapper aux vues et aux coups de la batterie anti-char. Celui du sous-lieutenant LACROIX et ses deux chars subordonnés (sergent CORBEIL, et caporal-chef TIRACHE), deux chars de la section LOISEAU (celui du sergent LE TALLEC et celui du sergent BOITARD), enfin le char du capitaine. Le char de l'aspirant LOISEAU s'est embourbé dans un marigot aux abords de CONNAGE.
La section LEVITTE essaye de se dépanner et malgré le tir la batterie anti-char, on voit le lieutenant, à pied, dirigeant la manœuvre pour tenter de sortir du marigot le dernier char qui s'y trouve encore.
Les ordres donnés par le commandant de compagnie sont les suivants :
"La section LACROIX progressera en tête sur l'axe de la route.
Ligne à atteindre :
1. la route CONNAGE - BULSON,
2. les lisières de CHEHERY.

"Le sergent LE TALLEC prendra le commandement de la section LOISEAU (réduite à deux chars) et progressera à gauche et légèrement en retrait de la section LACROIX.

"Le capitaine se placera au centre du dispositif au mieux des circonstances. Se tenir prêt à obéir au fanion du commandant de compagnie.
"La section LEVITTE ne pouvant être atteinte par les ordres sera considérée comme momentanément en réserve. Le commandant de Compagnie est sur que le lieutenant LEVITTE dont l'ardeur est proverbiale le rejoindra dès que ce lui sera possible."
Tout ceci a demandé cinq minutes à peine et déjà LACROIX a bondi dans son char et démarre. Il vient de s'ébranler quand au détour de la route, à une centaine de mètres à peine, un char boche apparaît et s'immobilise. C'est un engin de 30 à 40 tonnes qui encombre la plus grande partie de la route. Le sous-lieutenant LACROIX se précipite littéralement sur lui, s'arrête à 15 mètres et commence un feu nourri. Il a été suivi instantanément par un de ses chars (celui du sergent CORBEIL) et par celui du sergent LE TALLEC
La capitaine est encore à pied en dehors de son char, il arrête les deux autres appareils qui commençaient à s'ébranler et donne au sergent BOITARD et au caporal-chef TIRACHE qui les commandent, l'ordre de rester en arrière à 300 mètres environ pour appuyer de leurs feux les chars de tête. Puis il monte dans son appareil et va se placer à côté du char de LACROIX.
Le combat chars contre chars commence. Mais la lutte est inégale. De notre côté six chars légers de 12 tonnes armés chacun d'une mitrailleuse et d'un canon de 37 modèle 1916, c'est-à-dire un canon inapte à la lutte contre blindés.
Du côté allemand trois chars de 35 tonnes à 15 ou 20 mètres en face de nos quatre appareils de tête ; un peu en arrière sur la route, sur la hauteur et dans le fond de la vallée, une nuée d'autres chars ennemis.
L'approvisionnement en obus de rupture (12 obus par char) est bientôt épuisé. Le tir continue à obus explosifs. Ceux-ci aveuglent les chars allemands qui ne ripostent qu'avec une extrême lenteur. Beaucoup de leur obus ricochent sur nos blindages, mais ceux d'entre eux qui arrivent de plein fouet les traversent. C'est ainsi que le mécanicien LINTANFF est grièvement blessé. Un peu plus tard c'est le tour du sous-lieutenant LACROIX. Touché à la poitrine il jaillit ensanglanté de son char et s'effondre inanimé dans le fossé de la route. Son mécanicien le chasseur ROCHELLE prend sa place dans la tourelle, car le feu de ce char recommence presque aussitôt. Un peu plus tard, c'est le silence : ROCHELLE, sans doute touché à son tour, n'a plus été revu.
Le combat se prolonge. Un char allemand est en flammes. C'est alors que l'ennemi met en oeuvre un canon plus important (calibre 75 et même 105 pour certains chars) placé dans l'axe de chaque appareil. Ces projectiles tirés à bout portant sont extrêmement meurtriers. C'est d'abord le char de CORBEIL qui est éventré à l'avant ; le mécanicien LINTANFF qui, un obus de 37 logé à la base du cou continuait de passer les munitions à son chef de char, a le ventre ouvert. Imperturbable, CORBEIL continue à tirer. Un second coup lui détériore son arme. Il sort alors de son char et s'abrite tant bien que mal dans le fossé de la route.
Le char du sergent LE TALLEC reçoit un obus dans la chambre du moteur et s'enflamme. Pendant plusieurs minutes l'équipage continue à tirer, puis la chaleur devant intenable, à son tour il est obligé d'évacuer. Le sergent et son mécanicien (le chasseur AUDOIRE) s'échappent au plus fort de la bagarre et courant vers les buissons qui bordent LA BAR, ils regagnent CHEMERY où ils sont recueillis par le lieutenant HERAUD qui de loin, assiste au combat.
Des quatre chars de tête, seul celui du commandement est encore en état de tirer. Deux obus de rupture ont pénétré dans la tourelle, mais par miracle l'équipage est indemne. Le capitaine prescrit à son mécanicien de faire demi-tour sur place, de manière à avoir une plus grande protection en se couvrant de toute l'épaisseur du moteur. Le canon dirigé vers l'arrière continue à tirer. Le demi-tour vient à peine d'être achevé qu'un gros obus (sans doute du 105) arrache la chenille gauche et déplace le char de plusieurs mètres. Se rendant compte qu'il ne pourra tenir longtemps le commandant de compagnie ordonne à son mécanicien (chasseur HEINRICH) d'évacuer en profitant d'un feu nourri qu'il déclenchera pour aveugler l'ennemi. Le chasseur HEINRICH devra prévenir au passage les deux chars arrière (sergent BOITARD et caporal-chef TIRACHE) de se replier sur CHEMERY pour se mettre aux ordres du lieutenant HERAUD. D'ailleurs le char de BOITARD est momentanément hors de combat, son chef ayant été intoxiqué par les gaz provenant du tir de la mitrailleuse. Quant à celui de TIRACHE il ne se déplace que péniblement un galet de son train de roulement ayant été arraché par un obus anti-char. Le char du capitaine après un tir répété et violent se tait ; l'arme est enrayée. Les Allemands croyant tout fini cessent le tir et pendant de longues minutes c'est le silence de part et d'autre. La culasse du canon du capitaine est débloquée, l'arme est de nouveau prête à tirer. Il reste une trentaine d'obus.
Enfin un char boche s'ébranle et fait quelques mètres lentement. Le char français reprend son tir et l'ennemi s'immobilise. La pétarade reprend. le char de LE TALLEC qui continue à brûler protège en partie par sa masse celui du capitaine. Les Allemands dont les chars marchent à l'essence n'osent pas en approcher pour prendre dans l'axe de leur gros canon le dernier char français et seuls les obus de rupture lancés des tourelles crépitent sur le blindage du char léger.
Les derniers obus du char de commandement sont épuisés. Jusqu'à CHEMERY le terrain est vide d'amis. Tous les autres survivants semblent avoir réussi à rejoindre. Le commandant de compagnie sort de son char par la porte avant sans aucune précaution : il est exténué et s'attend à tout. Surprise ! les chars allemands cessent le feu. Le sergent CORBEIL qui était toujours dissimulé derrière son talus court vers son chef, l'aide à se relever et l'entraîne vers la hauteur, vers les bois. Une heure plus tard ils arrivaient à CHEMERY où le lieutenant HERAUD et le lieutenant CHASSEDIEU, chef de la section d'échelon les accueillent.
Ces deux officiers ont déployé une activité fructueuse pendant toute la matinée. Tandis que CHASSEDIEU se porte lui-même avec deux dépanneurs auprès des chars de PAGES pour tenter de les réparer, le lieutenant HERAUD avec d'autres dépanneurs et quelques motocyclistes faisant le coup de feu contre des éléments ennemis qui ont progressé par la rive Ouest de LA BAR (Zone de l'Armée voisine) les empêche de s'emparer des lisières de CHEMERY. Grâce à leur action trois chars seront récupérés et les équipages qui ont pu sortir des appareils détruits rentrent dans nos lignes.
La 1ère et la 2e Compagnie du 7e B.C.L. qui avaient reçu une mission à peu près analogue un peu plus à l'Est dans la Région BULSON-MAISONCELLE avaient connu le même destin. Elles avaient bloqué l'avance ennemie mais étaient aux trois-quarts détruites.
L'ennemi ne pouvant croire que ces chars légers, qui les ont tenus en haleine toute la matinée, sont seuls dans ce secteur, n'ose pas poursuivre avant de s'être réorganisé. Il occupe le reste de la journée à rassembler des forces nouvelles pour prononcer une attaque en force. Mais le soir du 14 mai vers 18 heures la 3e Division Cuirassée et les premiers éléments de la 3e Division d'Infanterie Motorisée arrivent au MONT DIEU où ils libèrent définitivement ce qui reste de chars. Quand l'attaque se déclenche le 15, la défense est solidement organisée et les Allemands subissent de lourdes pertes. La route de VOUZIERS est bien barrée.
C'est au bois du MONT DIEU, là où l'ordre de s'engager avait touché la Compagnie que les survivants se regroupent. Il manque :
· 4 chefs de section,
· 3 chefs de char,
· 7 mécaniciens,
soit 14 hommes sur les 26 qui composaient les équipages.

Le 15 mai, en fin de matinée, une heureuse surprise était réservée à la compagnie. Le sous-lieutenant LEVITTE réussissait à rentrer dans nos lignes avec deux de ses mécaniciens, les chasseurs ARNAUD (mécanicien de WHERLE) et GICQUEL. Ils avaient échappé aux patrouilles boches bien que transportant un blessé grave, le sergent WERHLE qui devait mourir dans les bras de son lieutenant au cours de la journée.
La magnifique résistance des chars a enthousiasmé le commandement. La radio officielle célèbre cet exploit et tous les journaux de France le relatent dans les termes suivants :
L'HEROISME D'UN BATAILLON DE CHARS LEGERS FRANÇAIS
PARIS - 25 mai .- La bataille qui se poursuit dans le Nord est faite d'innombrables traits de dévouement et de courage de nos officiers et de nos soldats de toutes armes.
Les 13 et 14 mai, à l'un des moments les plus critiques la lutte, quand notre infanterie, malgré tout son acharnement, semblait devoir succomber sous la masse des avions et des engins blindés de l'ennemi, un bataillon de chars légers français joua un rôle capital. La moitié des effectifs de ce bataillon, les trois quarts de ses chars sont restés sur le terrain. C'est grâce à l'esprit de sacrifice de chacun que la mission a été remplie.
Comment choisir entre tant d'actes d'héroïsme ? .....
Le capitaine M…… son char en panne, continue à tirer pour couvrir le repli de son mécanicien. Quand ses munitions sont épuisées, il dirige le retrait de ses chars dans un ordre parfait freinant puissamment l'avance ennemie.
Pendant un engagement contre les chars lourds allemands, le lieutenant L…… part à l'assaut en flèche ; son char touché prend feu. On aperçoit L…… au moment où il arrache son mécanicien aux flammes avant de tomber mortellement blessé.
Et voici peut-être l'épisode le plus étonnant de cette épopée d'un coin du champ de bataille.
Le sous-lieutenant L…… à la fin d'une contre-attaque acharnée, voit plusieurs de ses chars touchés par des obus de fort calibre, immobilisés ; le sien, en particulier, était traversé de part en part par un projectile. Ses camarades furent tués et il fut porté disparu.
Le lendemain, à midi, à la popote, alors que chacun évoquait le souvenir de ce brave officier, ses camarades le virent, avec stupeur, apparaître. Son manteau de cuir déchiré, couvert de boue, il avait l'air d'un revenant de l'autre monde, et chacun se précipitait pour connaître son aventure.
Quand son char fut percé, par un projectile de gros calibre, il sortit, sous le feu, emportant dans ses bras son mécanicien qui avait le ventre ouvert et le bras droit cassé.
En cours de route, il ramena avec lui trois autres de ses mécaniciens et, comme le petit groupe cherchait à rejoindre nos lignes, il tomba soudain au milieu d'un parc allemand.
C'est alors que les quatre soldats valides et le blessé se cachèrent dans une rivière, entrant dans l'eau profondément et se dissimulant sous les racines d'un saule. Chaque fois que les boches passaient, nos Français plongeaient la tête dans la rivière.
"Nous avons attendu ainsi une heure" dit le sous-lieutenant L……
"Nous les entendions; ils parlaient, fumaient et gibernaient tout autour de nous.
".... Si nous avions eu un fusil-mitrailleur, nous les descendions, mais nous n'en avions pas. Nous avions le blessé avec nous. Il commençait à râler entre mes bras ; j'ai vu ses yeux ne révulser ; j'ai compris qu'il était mort ; je l'ai lâché et l'ai laissé partir au fil de l'eau.
Noue sommes resté là jusqu'au soir. A la nuit, nous sommes sortis de la rivière, cherchant à rejoindre nos lignes à travers le parc des "Fritz". Ce ne fut que le matin, au petit jour, que j'ai pu rejoindre nos lignes et que nous fûmes recueillis par des camarades ".
On imagine la joie, l'émotion, avec laquelle les camarades sous-lieutenant rayèrent son nom et ceux des trois mécaniciens de la liste des disparus.
La 3e Compagnie est généreusement récompensée par le général HUNTZINGER commandant la IIe Armée. Une proposition de citation collective à l'ordre de l'Armée est transmise dans ces termes au G.Q.G. :
3e COMPAGNIE DU 7e B.C.L.
"Unité ardente et manœuvrière qui, sous le valeureux commandement de son chef, a réalisé à tous les échelons un splendide acte de bravoure en s'opposant efficacement le 14 mai dans la région CHEMERY, CHEHERY, BULSON, à la progression d'une unité blindée ennemie d'une puissance offensive et défensive supérieure. Mérite, comme l'A.S. 321 dont elle a brillamment continué les traditions, la citation à l'ordre de l'Armée et l'attribution de la Croix de Guerre.
En outre, les récompenses individuelles suivantes sont décernées :
· 4 croix de Chevalier de la Légion d'Honneur
· 3 médailles militaires
· 21 croix de guerre dont 6 avec palme.
Plusieurs de ces décorations le sont hélas à titre posthume
La 3e compagnie du 7e B.C.L. est hors de combat. Elle ne sera pas reconstituée. Ses débris, avec ceux des 1ère et 2e compagnies entrent dans la composition d'une compagnie de marche qui continuera à se battre brillamment jusqu'à la fin de la campagne et vaudra au 7e Bataillon de Chars Légers une deuxième citation à l'ordre de l'Armée.

 

1940 - 7e BCC

 

HISTORIQUE DU

7e BATAILLON DE CHARS LÉGERS

 

 CAMPAGNE DE FRANCE 1939‑1940

 I. FORMATION DU BATAILLON.

Issu du 1er bataillon du 503e R.C.C, qui tenait garnison à Versailles, le 7e bataillon fut constitué le 25 août. Dès le début de la mobilisation, l'ardeur de chacun laissait prévoir de beaux jours pour l'unité. Bataillon " très parisien " qui s'était signalé en temps de paix par des défilés impeccables, il devait plus tard prouver au feu que la brillante tenue antérieure est une condition nécessaire de " propreté morale " et que la " discipline char " est créatrice des plus beaux gestes. Le 503e R.C.C. n'avait‑il pas pour devise : " Du chic et du cran ". Commandé par un homme éminent, le 7e bataillon allait être à l'image de son chef, le commandant Giordani. Dût la modestie de notre chef en souffrir, il est indispensable de tracer ici les traits les plus remarquables de sa forte personnalité. Comment dépeindre le guerrier plus exactement que par le texte de cette magnifique citation, rédigée par le général Freydenberg, commandant la 2e armée :
"Chef de bataillon de grande valeur dont le bataillon de chars légers s'est couvert de gloire à chacun de ces engagements.
Déjà cité à l'Ordre de l'armée avec cette unité d'élite à la suite des combats devant Chémery et Bulson, a de nouveau donné, au cours des engagements du 10 juin, la pleine mesure de ses brillantes qualités de chef. "
Enveloppé de sa grande pèlerine, toujours le képi sur la tête, le commandant Giordani était, par son cran, un vivant exemple pour sa troupe, un entraîneur d'hommes exceptionnel. Il faut l'avoir vu le 10 juin, pour stimuler l'élan de l'infanterie, quitter, le stick à la main, debout sur la route, devant les chars, la base de départ de l'attaque, pour juger à sa mesure son absolu mépris du danger.
L'homme n'était pas moins admirable que le guerrier. Sachent maintenir une ferme discipline, il adorait ses chasseurs. Tous ses efforts étaient animés du même but : l'intérêt du bataillon. Prenant à tout instant ses responsabilités, défendant ses subordonnés avec une énergie farouche doublée d'une diplomatie habile, il avait su s'attirer la sympathie unanime et le dévouement absolu de tous. Le 7e bataillon n'était pas une unité quelconque, c'était le bataillon Giordani.

II. SÉJOUR DU BATAILLON AUX LOGES-EN‑JOSAS.

La mobilisation du bataillon fut terminée le 30 août, c'est‑à‑dire quatre jours avant la déclaration de guerre. Après avoir été passé en revue par le colonel Buisson, commandant le 503e R.C.C., puis par le colonel Welwert qui était à la tête de la brigade de chars, le bataillon se portait, dès le samedi 2 septembre, jour de la mobilisation générale, aux Loges‑en‑Jossas. Le cantonnement, distant de Versailles d'environ 15 kilomètres, avait un quadruple avantage :
‑ il permettait aux différentes unités de se souder, et à l'ensemble de prendre corps ;
‑ il dégageait le quartier de Satory au moment de l'afflux des réservistes ;
‑ il mettait éventuellement le bataillon à l'abri d'une attaque brusquée de l'aviation ennemie sur la région parisienne ;
- cependant, il ne rompait pas brutalement les relations avec la ville des Rois.
Lorsque fut déclarée la guerre, le dimanche 3 septembre, à 17 heures le bataillon était encadré de la façon suivante :

 

 

Chef de bataillon : commandant Giordani ;
Capitaine chef d'état‑major : capitaine Valude ;
Adjoint technique : lieutenant Jacquemont ;
Officier de renseignements : lieutenant Delorme ;
Officier des détails: lieutenant Drouart ;
Médecin : lieutenant Fleury.

Compagnie d'échelon.
Capitaine Raphel.
Lieutenant Erny.
Lieutenant Mourgeon.
Lieutenant Brun

1ère compagnie
capitaine Waitzenegger.
Lieutenant David.
Sous‑lieutenant Wallart,
Sous‑lieutenant Ayoun.
Sous‑lieutenant Tillot.
Aspirant Sauty.

2e compagnie.
Lieutenant Join‑Lambert.
Lieutenant Héraud.
Lieutenant Leclair.
Sous‑lieutenant Danne.
Sous-lieutenant Loiseau
Sous‑lieutenant Briens.

 

3e compagnie.
Capitaine Chazalmartin.
Lieutenant Fromond.
Lieutenant Durleman.
Lieutenant Chassedieu,  Sous‑lieutenant Lewitte.
Sous-lieutenant Lacroix.
Aspirant Cassier

Le stationnement du bataillon aux Loges‑en‑Jossas fut mis à profit par les compagnies pour aménager les véhicules et régler définitivement les derniers détails avec le dépôt 503 et le centre mobilisateur. La 3e compagnie se distingua tout particulièrement en adoptant Mme la vicomtesse de Maublanc, marraine, qui se montra très généreuse envers les chasseurs du capitaine Chazalmartin. Le premier cadeau fut un chien magnifique qui devait perpétuer le souvenir du légendaire " Totoche ".

Le 5 septembre, avant‑veille du départ aux armées, le 7e bataillon eut l'honneur d'être passé en revue par son ancien colonel, le général Stehlé, directeur de l'infanterie, accompagné du colonel Perré, l'animateur de l'arme des chars. Le bataillon prouvera plus tard au combat qu'il savait être digne d'une semblable preuve d'estime.

Le 6 septembre, dans la cour du château des Loges, le commandant Giordani passa lui‑même son bataillon en revue et le fit défiler devant le commandant Cornic, ancien chef d'état-major qui, lors de la convocation verticale d'avril, avait su s'attirer la sympathie de tous.
Le fanion du bataillon fut présenté officiellement à ceux qui allaient avoir l'honneur de défendre sa gloire. Chacun fit intérieurement serment de se battre avec l'énergie la plus farouche pour l'embellir de nouvelles citations, afin de le léguer un jour, plus brillant encore, aux futures générations.

III. DÉPART DU BATAILLON POUR LA ZONE DES ARMÉES

Le mouvement du bataillon pour la zone des armées commença le 7 septembre dès 6 heures du matin.
Il s'effectua en deux fractions :
A) Mouvement sur route pour la compagnie d'échelon et les éléments sur roues des compagnies de combat ;
B) Mouvement par voie de fer pour les chars et certains véhicules indispensable à la vie immédiate des éléments chenillés.
A) Mouvement sur route.
La colonne faisant mouvement par voie de terre était aux ordres du capitaine Raphel, commandant la compagnie d'échelon, Le 7 septembre à 6 heures, elle me mit en route, scindée en deux fractions :
‑ véhicules légers aux ordres du lieutenant Mourgeon ;
‑ véhicules lourds aux ordres du lieutenant Brun.
Les étapes parcourues furent les suivantes :

7 septembre : Loges‑en-Josas, Fontenay‑Trésigny.

8 septembre : Fontenay‑Trésigny, Les Essarts (près Sézanne).

9 septembre : Les Essarts, Courtisois (près Châlons‑sur‑Marne).
A Courtisois, le détachement fut rejoint par le lieutenant Jacquemont, qui, parti en reconnaissance avec le commandant Giordani, était porteur de l'ordre de mouvement fixant Milly et Murvaux comme cantonnement du bataillon dans la zone de concentration.

10 septembre : mouvement de Courtisois à Milly et Murvaux par le carrefour de Mazagran (ouest de Vouziers).
B) Mouvement par voie de fer.
Le bataillon disposait de deux trains. Embarquement quai de Satory le 8 septembre :
‑ le premier à 3h30 ;
‑ le deuxième à 17h30.
Sur le premier train furent embarqués les chars et certains véhicules des 1ères et 2e compagnies. Le détachement était sous les ordres du capitaine Waitzenegger, commandant la 1ère compagnie.
Sur le deuxième train furent embarqués les chars et certains véhicules de la 3e compagnie ainsi que plusieurs éléments lourds de la compa­gnie d'échelon, dont la remorque caterpillar et les trois tracteurs remorqueurs. Le capitaine Chazalmartin commandait le détachement.
Le capitaine Valude, chef d'état-major du bataillon, après avoir assisté à l'embarquement des deux détachements, devait rejoindre le soir même le commandant Giordani sur la base de concentration et rendre compte des incidents.
Le commandant, parti le 7 au matin, a assisté à l'étape du détachement faisant mouvement par voie de terre et vérifié son installation à Fontenay‑Trésigny. Le 3, il a rejoint la base de concentration pour préparer le cantonnement des unités.
Le premier détachement débarqua en gare de Stenay dans la nuit du 9 au 10 septembre, le deuxième au début de l'après-midi du 10 ; ils se rendirent par voie de terre à Milly et Murvaux ou le bataillon fut regroupé.
Le bataillon était à la disposition de la 2e armée­ (général Huntzinger), laquelle était composée en majeure partie de troupes de la région parisienne.
Le commandant des chars de l'armée était le général Bourguignon, qui avait été autrefois lieutenant colonel au 503e R.C.C.
Le 7e bataillon formait avec le 3e bataillon (ex 2e bataillon du 503e R.C.C.), le G.B.C. 503 sous les ordres du lieutenant‑colonel Fleury.

IV. CANTONNEMENT A MILLY‑SUR‑BRADON ET MURVAUX.

Dès le dimanche 10 septembre au matin, les unités commencèrent leur installation dans leurs cantonnements respectifs. Tandis que Milly abri­tait le P.C, du bataillon et la compagnie d'échelon, les compagnies de combat s'étaient vu partager le village de Murvaux. Distants l'un de l'autre de 4 kilomètres, les deux villages, construits au bas de la forêt de Woëvre, allaient abriter le bataillon un peu plus de deux mois. La population, froide au premier abord, se montra très rapi­dement accueillante.
Dans le cantonnement, les unités poursuivirent leur instruction. Un champ de tir fut aménagé au sud-est de Murvaux qui permit ainsi aux équipages de conserver leur entraînement.
De son côté le matériel fut l'objet d'un soin particulier, et, grâce à un clairvoyant ravitaillement en pièces de rechange, les chars furent mis au point et les camions aménagés.
Un certain nombre de reconnaissances d'emploi et d'exercice en salle complétèrent, d'autre part, l'instruction des cadres.
Si la valeur du combattant est fonction de son degré d'instruction militaire, elle l'est encore davantage de sa préparation morale. Aussi, toutes les compagnies firent‑elles des prodiges pour aménager chacune une coopérative où les hommes pouvaient se réunir, écrire en toute tranquillité et acheter à bon prix différente articles de nécessité courante.
Gérés par la troupe, sous la direction d'un officier, ces organismes obtinrent un vif succès, d'autant plus que les bénéfices permirent de venir en aide aux chasseurs nécessiteux.

Le 11 novembre allait donner au bataillon l'occasion de montrer que son séjour dans la zone des armées ne lui avait rien enlevé des brillantes qualités qui, dès le temps de paix avaient fait sa réputation. Admis à l'honneur de défiler devant le général Huntzinger, commandant d'armée, et un certain nombre d'officier, des Etats‑Unis, dans le cimetière américain de Romagne‑sous‑Montfaucon, en hommage aux 14 000 tombes qui bordent de part et d'autre l'immense nécropole de nos alliés de la grande Guerre, il eut à cœur de présenter une revue digne de ses traditions.
Cependant le chef de bataillon reste à Tronville jusqu'à la fin de bataillon se vit récompenser par l'attribution du cantonnement de Verdun, comme quartier d'hiver.

Dès le 12 novembre chacun se mit donc en devoir de préparer le départ. Nombreux étaient ceux dont le cœur était bien gros de quitter la région de la ville de Stenay, dont l'horloge possède un magnifique carillon qui précède la sonnerie des heures en jouant des airs variés. De si sincères amitiés, une solide sympathie avaient réuni civils et soldats à Milly et à Morvaux. Aussi, le 7e bataillon conservera-t-il longtemps le très doux souvenir des premiers jours de guerre vécus au sein de ce charmant "coin de Meuse".

V. CANTONNEMENT A VERDUN.

Le 19 novembre consacrera le départ du bataillon pour Verdun.
Le nouveau cantonnement allait présenter un triple avantage :
‑ il permettait à la troupe de s'installer confortablement au quartier Villars, dans la belle caserne du 6e régiment de cuirassiers ;
‑ la ville de Verdun offrait de grandes commodités d'approvisionnement et facilitait les départs en permission ;
elle offrait au matériel un abri précieux pour la durée de l'hiver, ainsi que l'entretien et les diverses réparations en seraient facilités, d'autant plus que la proximité immédiate du parc de chars d'armée rendait possible l'échange et la perception des diverses pièces usées ou cassées.
D'autre part le terrain de manœuvres de la Chaume et le champ de tir de Douaumont permirent de poursuivre l'instruction des unités. Enfin l'établissement d'une " Carte char ", de la région donna aux cadres l'occasion d'étudier les terrains particuliers favorables à l'action des blindés dans la zone de l'armée.
Ainsi, mieux qu'à Milly et Morveux, le bataillon fut‑il à même de poursuivre une instruction complète : morale, pratique et tactique.
Quatre mois durant le bataillon restera dans la glorieuse ville de François Chevert, L'immortelle cité qui du 21 février 1916 au 1er février 1917, fit connaître à la France un esprit de croisade, épuisant les forces ennemies comme le fait une blessure qui ne se ferme pas, inculqua à chacun le souffle du devoir et sa vaillance fit écho dans les cœurs des gars des chars.
Préparation morale particulièrement efficace que de revivre l'héroïsme du passé sur la terre riche et endeuillée du sang des pères.
Malheureusement, dès le début de l'arrivée à Verdun, plusieurs départs vinrent attrister notre unité.
Les capitaines, Raphel et Chazalmartin, appelés à suivre le cours d'état-major, quittèrent le bataillon, unanimement regrettés. Ils restèrent de cœur avec le 7e, qui, de son côté, est fier de les avoir comptés dans sa trop brève histoire. L'impulsion que ces deux officiers avaient donné à leurs compagnies respectives, resplendira d'un vif éclat le jour de leur premier engagement, et, à ce titre, se justifie la mention que leur donne cet historique.
Le lieutenant Drouard, officier des détails, qui avait guidé avec bienveillance et méthode les comptables des unité dans la mise sur pied de la comptabilité du bataillon et rendu à ce titre de précieux services, était affecté à l'état‑major des chars de l'armée.
Le lieutenant Mourgeon, officier d'approvisionnement, qui par son activité jamais en défaut avait procuré au bataillon tout ce qui lui était nécessaire, dans une période difficile d'organisation, était rappelé à l’intérieur ; sachant prévoir et réaliser avec le sourire, il laisse à tous le souvenir d'un camarade dévoué et d'un animateur infatigable.
Quelques jours plus tard, le lieutenant Jacquemond, adjoint technique, dut rejoindre le dépôt de chars 502 à Angoulême. Ayant organisé son service avec une clairvoyance exceptionnelle, son départ fut unanimement regretté.
Quelque temps après, l'arrivée d'un certain nombre d'officiers combla en partie les vides.
Le capitaine Mignotte prit le commandement de la 3e compagnie. Officier breveté d'état‑major, il s'avérera au combat brillant entraîneur d'hommes.
Le sous‑lieutenant Jolly, jeune "bazar" venant de l'École, fut affecté à la 1ère compagnie, ainsi que l'aspirant Crémieux‑Bach. Le sous‑lieutenant Pagés et l'aspirant Loiseau furent affectés à la 3e compagnie.
Régulière et continue, telle fut la caractéristique de la vie du bataillon à Verdun. Malgré la rigueur de l'hiver, tout le matériel, grâce à des soins vigilants, fut conservé en parfait état de marche. Aussi, dès le début d'avril. le 7e bataillon fut il appelé au camp de Mourmelon pour l'instruction des troupes de passage

VI. PÉRIODE D'INSTRUCTION AU CAMP DE MOURMELON.

Depuis le débat de la campagne, le 7e bataillon se trouvait en réserve générale de la 2e armée. Par note n° 1829/1 chars S. de l'Inspection des chars, en date du 28 mars, il fut, tout en conservant sa destination tactique, "détaché en permanence au camp de Mourmelon pour participer :
1° Aux exercices en commun, infanterie‑chars, avec les D.I. qui se succédaient au camp à la cadence d'une par semaine ;
2° Aux exercices du cours des chefs de bataillon d'infanterie ;
3° Aux manœuvres des division cuirassées."
Dès lors commence pour les différentes unités une période d'instruction intensive qui s’avérera infiniment profitable. Les régiments d'infanterie se succèdent chaque semaine et mettent tour à tour au point leurs troupes en vue du combat de chars. Le 7e bataillon se dépense sans compter. Il présente chaque jour sur le terrain le maximum d'appareils. Ses équipages consolident leur cohésion. Les différentes unités se soudent davantage. Après la vie de garnison de Verdun, les manœuvres intensives du camp retrempent les hommes dans l'action et les préparent directement aux combats prochains. L'entraînement physique se développe opportunément. seul le matériel souffre un peu des exercices incessants. Les pièces de rechange sont difficiles à trouver. Les équipes de réparation travaillent jour et nuit de façon à satisfaire les besoins des régiments d'infanterie qui utilisent chacun au maximum leur semaine de manœuvres successives avec le 7e bataillon.
Au cours de ce séjour le bataillon eut le plaisir de retrouver son ancien commandant de régiment au 503, le colonel Buisson, qui commandait l'infanterie de la 3e division.
Trois dates marquent tout particulièrement ce cantonnement :
- le 9 avril, le colonel Buisson fit au bataillon l'honneur de le passer en revue prouvant ainsi sa sympathie pour l'ex. 1er bataillon du 503e R.C.C. ;
- le 14 avril, le général Brocard, commandant la 3e D.C.r., qui avait commandé autrefois le bataillon, de 1937 à 1939, eut également à cœur de se le faire présenter ;
- le 18 avril, fut exécutée, en liaison avec le 3e régiment de tirailleurs marocains, commandé par le colonel Desré, une manœuvre particulièrement réussie devant le général Touchon, commandant l'armée de réserve et ancien commandant de l'Ecole des chars.
Le bataillon poursuivait ainsi de façon intensive son instruction lorsqu’il fut surpris, le 10 mai, par l'attaque aérienne brusquée du camp de Mourmelon.
Alerté le même jour, à 10h30, alors qu'une compagnie travaillait encore sur le terrain, il reçut l'ordre de se porter immédiatement dans la région de Vouziers et se vit attribuer le cantonnement des Alleux.
Au début de l'après‑midi, le commandant Giordani, qui était en permission, rejoignit le bataillon.
 
VII. CANTONNEMENT DES ALLEUX.

Tandis qu'à 10 heures les échelons sur roues s'ébranlent, les chars des 1ères et 2e compagnies embarquent par voie ferrée ; ceux de la 3e compagnie doivent embarquer un peu plus tard.
Les échelons sur roues arrivent en fin d'après-midi aux Alleux (9 kilomètres nord de Vouziers) et les compagnies commencent à s’installer.
Tandis que les véhicules emplissent les granges des fermes, des emplacements camouflés sont préparés pour accueillir les chars dont le premier train est attendu à Vouziers au début de la nuit.
Celle-ci est très avancée quand les chars des compagnies Waitzenegger et Join-Lambert arrivent en gare de Vouziers. Ils sont aussitôt dirigés sur les positions d'attente préparées et quand le jour me lève il ne reste aucune trace de leur passage. L'aube du 11 mai se lève sans que le régulateur de Vouziers puisse donner des nouvelles du second train. Le capitaine Mignotte s'inquiète de ses chars et fait plusieurs fois la navette entre les Alleux et Vouziers.
A 9 heures un premier renseignement : le train portant les chars de la 3e compagnie a été bombardé en gare de Mourmelon, mais on ne signale aucun dégât ni dans le matériel ni dans le personnel. A 10 heures le régulateur fait savoir que la voie ayant été coupée par une bombe, le train a été dérouté par un itinéraire excentré et arrivera vers 13 heures. A 13h30, le convoi entre en gare ; le commandant de la 3e compagnie pousse un soupir de soulagement quand le lieutenant Chassedieu, commandant le train, lui annonce que personnel et matériel sont au complet. En vingt et une minutes, tout est débarqué et les chars, sons la menace d'apparition d'avions ennemis (la gare de Vouziers ayant été bombardée dans la matinée), gagnent la position d'attente individuellement, L'itinéraire a été soigneusement jalonné et les appareils disparaissent sous la futaie sans avoir été repérés.
Chacun travaille avec ardeur et joie pour mettre le matériel au point pour l'engagement que le survol incessant de la région par les avions allemands laisse prévoir imminent. Les bombardements se succèdent à la cadence de trois par jour. Aussi chacun vécut-il dans la fièvre. L'avance ennemie en Belgique devenait inquiétante. Ses forces menaçaient Sedan.

Le 13 mai à 16 heures, par ordre n° L‑1242 du général Bourguignon, com­mandant les chars de la 1ère armée, le 7e bataillon fut mis à la disposition du Xe corps d'armée.
Le même jour, à 17h30, par note n° 1504 de l'Etat-Major, 3e Bureau, du Xe C. A., le bataillon reçut l'ordre de se porter dans le bois de Haye qui se trouve entre Bulson et Chémery, à environ 7 kilomètres sud de Sedan.
Aussitôt le chef de bataillon prescrit aux unités de se tenir prêtes à faire mouvement à la tombée de la nuit et aux commandants de compagnie de venir le plus tôt possible au P.C. du bataillon pour partir en reconnaissance.
La nouvelle est accueillie avec calme. Tout le monde est prêt. Les petites réparations en cours sont achevées, les dernières mises au point sont faites tandis que le chef de bataillon et les commandants de compa­gnie partent pour le bois de Haye. A La Blanche‑Maison, munis des der­nières instructions du commandant Giordani, les trois capitaines se sépa­rent pour déterminer le point exact où leur compagnie ‑ du moins ils le croient ‑ va attendre le moment de combattre. Le temps est magnifique, le muguet foisonne dans le sous-bois où les roulantes de l'infanterie en ligne préparent le repas du soir. Il est 18h30. C'est le calme avant la tempête.
A 20 heures, le commandant et les capitaines son de retour aux Alleux. Tout est prêt pour le départ.

VIII. ENGAGEMENT DU 7e BATAILLON LE 14 MAI A CHEMERY‑BULSON

A) Mouvement du bataillon.
Dès 20h30, la 1ère compagnie s'est mise en marche, suivie respectivement à 15 minutes par les 2e et 3e compagnies.
L'itinéraire suivi empruntait la Route nationale 77 par le Chesne - Tannay ‑ Chémery.
Ce déplacement fut effectué dans des conditions particulièrement pénibles.
A partir du Chesne jusqu'à Tannay la route était encombrée par de très nombreux véhicules automobiles venant du nord et appartenant à l'artillerie. Les chars ont beaucoup de peine à passer.
Au delà de Tannay la situation devait empirer. Le chef de bataillon qui, accompagné de son officier de renseignements, le lieutenant Delorme, avait devancé la colonne chars, s'arrête à environ 200 mètres de la sortie nord de Tannay pour voir passer ses compagnies. Ne les voyant pas arriver, il essaie de retourner en arrière pour se rendre compte des conditions dans lesquelles s'effectue la marche ; les colonnes suivent avec peine.
Aux environs de 23 heures, le chef de bataillon, commandant le 7e bataillon, est rejoint par le capitaine Valude qui lui transmet, de la part du G.B.C. 503, l'ordre suivant :
"Le 7e bataillon s'arrêtera sur la ligne Chémery ‑ Maisoncelle, liaison à prendre avec le général Lafontaine, dont le P.C. est à Chémery."
Dès lors le commandant Giordani se dirige sur Chémery où il est mis au courant de la situation. Il a dû se frayer la route lui‑même, les éléments d'artillerie et d'infanterie l'ayant encombrée de toutes parts avec leurs voitures et leurs chevaux. Ce n’est qu'au bout de trois heures trente de marche, qu’assisté du lieutenant Delorme, il arrive au P.C. du général Lafonfaine qui le met au courant de la situation.
L'ennemi, après avoir franchi la Meuse, s'est emparé hier soir des hauteurs sud de Sedan. A la tombée de la nuit il avait atteint la ligne Bulson ‑ Chémery. La 55e division ne dispose plus que d'un régiment d'infanterie (le 213e), à effectifs réduits, et de 2 batteries d'artillerie.
Dans le but de rejeter l'ennemi dans la Meuse, ou tout au moins de l'empêcher de s'emparer du massif du bois de Mont‑Dieu (car les réserves ne pourront arriver sur cette position avant le 14 au soir, leur contre‑attaque est prévue pour le 14 au lever du jour. Elle sera menée, à droite, par le 205e R.I. et le 4e bataillon de chars et, à gauche, par le 213e R.I., appuyé par le 7e bataillon de chars.
L'attaque comportera trois phases :
1° S'emparer des hauteurs boisées au sud de la route Bulson – Chémery ;
2° S'emparer des hauteurs des bois de la Marffée et de la Croix-­Piot ;
3° La Meuse.
Mais, comme le 205e R.I. et le 4e bataillon de chars ne sont pas encore annoncés et qu'ils risquent de ne pas arriver à temps pour prendre part à l'attaque et que, d'autre part, on ne peut retarder l'heure H de crainte d'être devancés par l'ennemi, le 213e régiment d'infanterie et le 7e bataillon attaqueront seuls sur tout le front au cours de la première phase pour s'emparer le plus tôt possible des hauteurs boisées au sud­-ouest de Bulson.
Aussitôt le chef de bataillon envoie un motocycliste porter aux com­mandants de compagnie l'ordre de le rejoindre immédiatement et de pousser leurs chars le plus avant possible de façon à être à Chémery avant 4 heures.
Peu après, les 1ères et 2e compagnies envoient un agent de liaison rendre compte qu'elles ont atteint les lisières nord du bois du Mont‑Dieu ; Il est 3h30.
Aucune nouvelle de la 3e compagnie, qui a été coupée des deux autres par une cohue indescriptible. La route est complètement obstruée par des équipages de fuyards et des voitures de réfugiés civils. Mais elle arrivera quand même à temps, grâce à la ténacité de ses équipages. Quittant une route impossible, c'est la progression dans la nuit noire à travers les clôtures, les haies, les fossés. Il est 4h30, à la pointe du jour, quand elle atteint le bois du Mont‑Dieu, où le capitaine Mignotte reçoit l'ordre du chef de bataillon. Laissant le soin au lieutenant Héraud, son adjoint, d'amener coûte que coûte la colonne de chars à Chémery dans le plus court délai, le commandant de la 3e compagnie bondit à moto à Chémerv où il reçoit les ordres du commandant Giordani et prend contact avec le colonel Labarthe, commandant le 213e R.I.
Les compagnies de combat ont donc mis plus de cinq heures pour effectuer les cinq kilomètres qui séparent Tannay de Chémery. Plusieurs officiers, revolver au poing, ont dû frayer constamment le passage de leurs appareils au milieu des chevaux et des voitures de troupe se repliant dans le désordre le plus complet.
B) Combat du bataillon.
1° Mission et dispositif d’attaque du bataillon.
Partant de la ligne Chemery ‑Maisoncelle le 7e bataillon, en liaison avec le 213e R.I., attaquera à 5 heures, en vue de s’emparer des hauteurs boisées au sud de la route Bulson ‑ Chémery.
Le dispositif du bataillon au départ de l'attaque est le suivant :
UNITE    3e COMPAGNIE    1ère COMPAGNIE    2e COMPAGNIE
Zone des P.D.    
Sur la route de Chemery-Chehery à la sortie N.O. du village de Chehery
Ravin de la Nacelle (au N.E. de Chémery  Vergers bordant au nord Maisoncelle et Villers.
Heure de départ : 5 heures.
(L'heure H a été retardée pour permettre aux bataillons d'infanterie de se ravitailler en munitions. Ceux‑ci ne disposent cependant que de très peu de cartouches ; leurs effectifs sont en outre, fort réduits et leur dotation en armes antichars nulle.)
Dans le cas où le 205e R.I. et le 4e bataillon de chars seraient arrivés avant l'heure H, ils prendront leur place dans le secteur de droite, le bataillon du 213e et la 2e compagnie de chars du 7e bataillon passant en réserve derrière le groupement du centre.
2° Déroulement du combat.
En fait, l'attaque ne débouche qu'à 6h20. Jusqu'à 7 heures, la progression s'effectue sans trop de difficultés.
a) Premier bond.
3e Compagnie.
A l'ouest, la 3e compagnie progresse à cheval sur la route Chémery - Chéhéry. Le temps ayant manqué pour donner des instructions aux chefs de sections, le capitaine fait manœuvrer sa compagnie au fanion. Il faut gagner l'ennemi de vitesse. La section du sous‑lieutenant Pagés est arrivée en tête ; elle y demeure et reçoit l'ordre de progresser sur l'axe de la route.
Les autres sections sont encore dans Chémery, mais déjà ramassées, et prêtes à s’élancer. Le lieutenant Héraud doit prévenir le sous‑lieutenant Lacroix, chef de la 3e section, et l'aspirant Loiseau, chef de la 2e section, de se déployer en bataille de part et d'autre de la section Pagés en se conformant à l'attitude du capitaine. La 4e section, commandée par le sous‑lieutenant Levitte, suivra en réserve à quelque distance, prête à intervenir en cas de besoin.
Les premiers chars ont parcouru quelques centaines de mètres quand ils sont pris à partie par une pièce antichars située prés de la route à 500 mètre, au nord de Chémery. Instant de surprise et d'émoi. Tous les chars s'arrêtent, c'est le baptême du feu terrestre.
Mais le flottement ne dure pas, Tandis que la section Pagès riposte sur l'engin ennemi, le capitaine s'élance dans la prairie en ordonnant en bataille avec son fanion. La section Lacroix voit le signal et s'engage sur les traces du char de commandement, mais la section Loiseau n'a pas vu le petit fanion vert et blanc. Elle reste sur la route derrière la section Pages empêchant le débouché de la section Levitte.
Le commandant de compagnie revient en arrière et se plaçant près des sections Levitte et Loiseau il recommence le signal en bataille. Le lieutenant Levitte se rendant compte de l'appel que lui adresse son chef bondit littéralement avec son char et vient se placer à côté de celui du capitaine et entre en liaison à voix. Il reçoit l'ordre de se tenir à gauche et de couvrir le flanc le long de la rivière La Bar. La section Loiseau procède par imitation et quand le char de commandement reprend la tête il est suivi par la compagnie déployée. Le char de Pagès n'a pas cessé de subir le feu de l'ennemi pendant cette manœuvre. Un obus lui a brisé une che­nille et toute la section est bloquée sur la route. Un autre obus a atteint un char subordonné blessant le chef de char, le caporal‑chef Jacquesson, en provoquant la chute des épiscopes.
A ce moment une deuxième pièce antichars se révèle un peu plus loin dans le fossé de la route. Mais cette fois la compagnie est lancée et les deux engins ennemis sont détruits en très peu de temps par la concentra­tion de feux des chars. Les lisières sud et ouest du bois de Naumont sont neutralisées et tout le terrain jusqu'à l'embranchement de la route de Connage, est bientôt vide d'ennemis. Mais les quelques fantassins qui composent l'infanterie n'ont pas suivi et les chars doivent revenir en arrière pour tenter de les entraîner. Assis sur sa porte de tourelle pour bien montrer que tout danger est écarté, le capitaine Mignotte exhorte les fantassins à le suivre et c'est ainsi que quelques hommes du bataillon d'infanterie se portent vers le bois de Naumont et les haies qui bordent la Bar.
1ère compagnie.
Au centre est, les deux sections (1ère et 2e) du premier échelon de la 1ère compagnie ont atteint la cote 703 et Blanche‑Maison après avoir détruit 7 mitrailleuses ennemies.
2e compagnie
A l'est, les quatre sections de la compagnie, ayant débouché en ligne dans l'ordre de la droite à gauche : 1ère, 2e, 3e, 4e, se sont portées sur la crête du Fond‑Dagot. Aucune arme ennemie n'a été rencontrée au cours de cette progression et cependant, en dépit de plusieurs tentatives des chars revenant en arrière chercher l'infanterie d'accompagnement, celle‑ci n'a pas pénétré dans le bois qui domine la crête.
A 7 heures, la ligne atteinte par le bataillon de chars passe donc de l’ouest à l’est, par :
les lisières sud-ouest du bois de Naumont (3e compagnie) ;
le bois de Blanche-Maison et la côte 304 (1ère compagnie) ;
la crête du Fond‑Dagot (2e compagnie).
La ligne occupée par l'infanterie est sensiblement la même, sauf à l'est, où le 1/213 n'a pas pénétré dans le bois du Fond‑Dagot.
b) Deuxième bond.
3e compagnie.
A l'ouest, pendant que la section Levitte continue le long de la Bar, la couverture du flanc gauche, le capitaine Mignotte se porte en tète des 2e et 3e sections sur le village de Connage. La section Pagès éprouvée par le feu des engins antichars essaie de réparer des avaries aidée en cela par le lieutenant Chassedieu, chef de la section d'échelon, qui, sans attendre que le feu se soit tu s'est porté bien en avant de l'infanterie pour tenter le dépannage du char de Pagès.
Les lisières sud du village de Connage sont rapidement atteintes.
Les fantassins ennemis ont reflué et n’opposent plus aucune résistance.
Une batterie ennemie antichars est installée sur le mamelon immédiatement au nord‑est de Connage. Les chars qui sont aux lisières du village échappant à son tir mais la section Levitte plus en arrière le long de la Bar est durement éprouvée. Le char du chef de section, touché au persiennage, est immobilisé. Les deux chars subordonnés se portent à son secours et essayent de le remorquer malgré la vive canonnade de la batterie allemande.
Aucun élément d'infanterie n'a suivi les chars à Connage et, une fois de plus, il faut revenir en arrière pour prendre le contact.
Le char de l'aspirant Loiseau, touché par un obus au moment où il retournait pour prendre la liaison est mis en difficulté et s’embourbe au bord de la Bar, il ne reparaîtra plus et son équipage (mécanicien Cambier), incapable d'évacuer tellement le tir de la batterie est violent, sera fait prisonnier.
Six chars se retrouvent en arrière de l'étranglement de la vallée, là ­où la Bar vient frôler la route. La section Lacroix est au complet. Deux chars de la section Loiseau ont suivi le capitaine (ceux des sergents Le Tallec et Boitard). La bâche du char de Le Tallec, arrimée sur le côté de l'appareil, a été enflammée par un projectile. Dans l'ardeur de la lutte l’équipage ne s'est aperçu de rien et le feu risque de se communiquer au réservoir de gasoil. Le capitaine, voyant le danger, descend de son char, se porte vers l'appareil menacé et réussit à arracher la bâche enflammée. Aucun coup de feu ne se manifeste. Le terrain masque la batterie antichars. (ce que voyant, le sous‑lieutenant Lacroix sort à son tour de son appareil et vient prendre les ordres de son chef pour la suite de l'affaire.
Le sergent Le Tallec l'imite aussitôt,
Un peu en arrière et sur la gauche on voit le sous‑lieutenant Levitte à pied, dirigeant le dépannage de son char malgré les obus de la batterie antichars et même ceux des batteries terrestres qui commencent à donner de la voix.
Les ordres donnés par le capitaine Mignotte sont les suivants :
La section Lacroix progressera en tête sur l'axe de la route. Lignes à atteindre :
1° la route Connage – Bulson ;
2° les lisières de Chéhéry.
Le sergent Le Tallec prendra le commandement de la section Loi­seau (réduite à 2 chars) et progressera à gauche et légèrement en retrait de la section Lacroix.
Le capitaine se placera au centre du dispositif au mieux des cir­constances. Se tenir prêt à obéir au fanion du commandant de compagnie.
La section Levitte ne pouvant être atteinte par les ordres sera considérée comme momentanément en réserve. Le capitaine est sûr que le sous‑lieutenant Levitte, dont l'ardeur est proverbiale, le rejoindra dès que cela lui sera possible.
Tout ceci a demandé cinq minutes à peine et déjà Lacroix a bondi dans son char et démarre. Il vient de s'ébranler quand au détour de la route, à une centaine de mètres, un char ennemi apparaît et s'immobilise. C'est un engin d'environ 35 tonnes qui encombre la plus grande partie de la route. Le sous‑lieutenant Lacroix se précipite sur lui, s'arrête à 15 mètres et commence un feu nourri. Il est suivi immédiatement par un de ses chars, celui du sergent Corbeil, et par celui du sergent Le Tallec.
Le capitaine est encore en dehors de son char sur la route ; il arrête les deux autres appareils qui commençaient à s'ébranler et donne au caporal-chef Tirache (de la section Loiseau) et au sergent Boitard l'ordre de rester en arrière à 300 mètres environ pour appuyer de leurs feux les chars de tête. Puis il monte dans son appareil et va se placer à côté du char de Lacroix.
Le combat chars contre chars commence. Mais la lutte est inégale. De notre côté, six chars légers de 12 tonnes ; du côté allemand trois chars de 35 tonnes sont maintenant en avant et d'autres ne cessent de se déployer un peu en arrière. Le feu est ouvert de part et d'autre. Nos chars ne disposent chacun que de douze obus de rupture qui sont bientôt épuisés. Le tir continue à obus explosif. Ceux-ci aveuglent les chars allemands qui ne ripostent qu’avec une extrême lenteur. De nombreux obus ricochent sur le blindage des F.C.M., mais ceux qui arrivent de plein fouet le percent. C’est ainsi que le mécanicien Lintanff est grièvement blessé, un peu plus tard, c'est le tour, du sous‑lieutenant Lacroix.
Le combat se prolonge. Un char allemand est en flammes. L'ennemi met alors en oeuvre un canon plus important (calibre 75 environ) pointé dans l'axe de l'appareil. Ces projectiles tirés à bout portant sont extrêmement meurtriers. C'est d'abord le char de Corbeil qui est éventré à l'avant ; le mécanicien Lintanff qui, un obus de 37 logé à la base du cou continuait de passer les munitions à son chef de char, a le ventre ouvert et succombe. Imperturbable, le sergent Corbeil continue à tirer. Un second coup lui détériore son arme. Il sort alors de son char et s'abrite tant bien que mal dans le fossé de la route. Le char du sergent Le Tallec reçoit un obus dans la chambre du moteur et s’enflamme. Pendant plusieurs minutes l’équipage continue à tirer, puis la chaleur devenant intenable, il est obligé d’évacuer. Le Tallec et son mécanicien, le chasseur Audoire, s'échappent au plus fort de la bagarre et courant vers les buissons qui bordent la Bar, ils regagnent Chémery où ils sont recueillis par le lieu­tenant Héraud qui de loin assiste au combat.
Des quatre chars de tête, celui de commandement est seul encore en état de tirer. Deux obus de rupture ont pénétré dans la chambre du personnel, mais par miracle l'équipage est indemne. Le capitaine Mignotte prescrit à son mécanicien de faire demi‑tour sur place, à la fois pour avoir mie plus grande protection en se couvrant de toute la masse du moteur et pour être prêt à rompre méthodiquement un combat sans espoir. Le demi‑tour vient à peine d’être achevé qu'un gros obus arrache la chenille gauche et déplace le char de plusieurs mètres. Se rendant compte qu'il ne pourra tenir longtemps, le commandant de la 3e compagnie ordonne à son mécanicien, le chasseur Heinrich, d'évacuer en profitant d'un feu nourri qu'il déclenchera pour aveugler l'ennemi. Les deux chars restés en arrière se replient alors sur Chémery ; le char de Boitard est d'ailleurs momentanément hors de combat, son chef ayant été intoxiqué par les gaz de la mitrailleuse ; quand à celui de Tirache il ne se déplace que péniblement, un galet de son train de roulement droit ayant été arraché par un obus.
Après un instant d'accalmie le char français et les chars allemands reprennent le tir. Le char de Le Tallec brûle avec intensité et protège en partie par ma masse celui du capitaine. Les Allemands, dont les chars marchent à l'essence n'osent pas en approcher pour prendre dans l'axe de leurs gros canons le dernier char français et seuls les obus lancés des tourelles crépitent sur le blindage du char léger. Les derniers obus du char de commandement sont épuisés ; jusqu’à Chémery le terrain est vide d'amis. Tous les autres survivants semblent avoir réussi à rejoindre. Le capitaine Mignotte sort de son char par la porte avant sans aucune précaution : il est exténué et s’attend à tout. Surprise, les chars ennemis cessent le feu. Le sergent Corbeil, qui était toujours dissimulé derrière son talus, court vers son chef et l'entraîne vers la hauteur, vers le bois.
Une heure plus tard ils réussissaient à rentrer dans nos lignes.
Pendant que se déroulait cette action, la section Levitte (mécanicien Gicquel) tentait en vain de se dépanner. Un gros obus touche l'appareil de droite et en blesse mortellement le chef, le sergent-chef Werhle (mécanicien Arnaud). Le char de gauche commandé par le sergent Froussard, qui a reçu de son chef l'ordre de se replier, s'enlise dans un marécage, pendant que le sous-lieutenant Levitte, aidé de deux mécaniciens, les chasseurs Arnaud et Gicquel, essaye de ramener Werhle. Pris sous le feu ennemi, ils sont obligés de se jeter dans la Bar, où ils abandonnent le corps du malheureux sous-officier qui vient d'expirer. Ils restent toute la journée dans l'eau et rejoignent le bataillon le lendemain après avoir traversé les lignes allemandes durant la nuit.
Les pertes ont été sévères. Sur treize chars engagés, trois seulement rentrent dans nos lignes. Il manque :
le char de commandement ;
deux chars de la 1ère section ;
deux chars de la 2e section ;
deux chars de la 3e section ;
les trois chars de la 4e section.
1ère compagnie
Au centre est, la 1ère soutient une lutte non moins héroïque. Les 1ère et 2e sections se sont portées respectivement à l'ouest de la crête 322 et aux lisières sud des bois de Haye. Prises à partie par des chars enne­mis, lourds et légers, embossés aux lisières sud‑est du bois de Haye et par des armes antichars situées au nord de la cote 322, elles engagent le combat. La 1ère section (aspirant Crémieux-Bach) qui est plus à l'est, supporte presque tout le choc. Elle immobilise deux chars allemands. Pendant que les sections de deuxième échelon qui, essayant d'entraîner l'infanterie, se sont portées, guidées par le commandant de compagnie, sur le bois de Blanche‑Maison, d'où elles débouchent, la 2e section (adjudant-chef Pierre) engage le combat contre les autres chars alle­mands qui avancent aux lisières sud‑est du bois de Haye.
Deux appareils sont touchés, mais le char de droite voit à deux reprises sa tourelle percée par des projectiles ; le chef de char, caporal Bruneval, est tué ; le mécanicien, chasseur Trouilloud, grièvement blessé, surmontant héroïquement ses souffrances, ramènera dans nos lignes son char et son chef, renouvelant un des exploits légendaires des anciens de l'artillerie d'assaut. La 2e section se replie jusqu'au bois de Blanche-Maison où, avec les 3e et 4e sections, elle résistera jusqu'à 10h30. Aucun char de la 1ère section, durement atteinte, n'a pu se replier.
Aux environs de 10h15, les éléments restants de la 1ère compagnie, sur l'ordre du chef de bataillon commandant le 7e, se sont repliés sur Artaise‑le-Vivier. A la traversée du village de Maisoncelle, occupé par les Allemands, ils ont été pris à partie par des armes antichars et des chars de types différents, venus par la route de Chémery, un obus a traversé le masque du char de tête.
Sur les treize chars engagés, quatre seulement sont revenus de la bataille :
‑ un de la 4e section ;
‑ deux de la 2e section (l'un avait la tourelle bloquée par un projectile) ;
- un de la 3e section.
2e compagnie
A l'est, l'engagement de la 2e compagnie est aussi violent. Pendant que la 1ère section protège le flanc droit en direction de Bulson, les 2e, 3e et 4e sections se portent à l'assaut de la cote 322, neuf chars conduits par le commandant de compagnie ont quitté leur position de départ.
Dès le débouché, six chars ennemis de modèles différents sont aper­çus à la sortie de Bulson. Pris à partie par le seul groupe de 75 en position à Maisoncelle qui devait soutenir l'attaque de la division par du tir à vue, les appareils allemands se sont ralliés au nord de la crête 322, l’un d’eux a brûlé presque aussitôt. Le chef de la 3e section, lieutenant Leclair, se rue en avant pour livrer le duel, il franchit la crête 322 et quelques secondes après, son char, porte de tourelle ouverte, est vu en train de brûler.
C'est alors que s'engage une lutte sans merci entre, d'une part les neuf chars restants qui, conduits par le commandant de compagnie sont à défilement de tourelle au sud de la crête 322 et, d'autre part, les cinq chars, vraisemblablement des PzKW III, qui sont de l'autre côté. Nos chars se guidant sur les déplacements de l'antenne des engins ennemis, s'avancent pour tirer, puis se reportent à défilement de tourelle, ainsi se prolonge la lutte.
La masse des chars ennemis est ainsi immobilisée. Sous les effets des coups de chacun de nos obus de rupture, ils reculent mais ne paraissent cependant pas sérieusement atteints.
Plusieurs de nos chars sont cependant frappés par les projectiles ennemis. L'un d'eux dessouda la toiture de la tourelle du commandant de compagnie, un autre s'enfonça dans le blindage sans le perforer.
Vers 10h30, la compagnie reçoit l'ordre de se replier sur Artaise-le-Vivier.
Au passage de Maisoncelle, elle est prise à partie par des chars allemands, qui, venant de Chémery, lui barrent le passage.
Voyant Artaise également occupé par l'ennemi, la 2e compagnie se replie sur le bois de Raucourt et de là gagne les bois de Mont Dieu. Des treize chars engagés, trois seulement ont pu regagner la position de ralliement.
Comme à l'ouest, l'infanterie d'accompagnement n'a nullement essayé de profiter de la progression des chars, bien que de nombreuses résistances aient été neutralisées sur la crête 322.
3° Après le combat.
Vers 13 heures les chars restants sont regroupés dans le bois de Mont‑Dieu et constituent une compagnie de marche à deux sections sous les ordres du capitaine Mignotte, commandant la 3e compagnie. Cette unité reçoit mission, en s'embossant aux lisières nord du bois de Mont Dieu, de s'opposer à la progression de l'ennemi sur l'axe Chémery ‑ Tannay, jusqu'à l'arrivée de la 3e D.I.M. et de la 3e D.C.r.
Heureusement l'ennemi fortement impressionné par la résistance acharnée de la matinée n'ose pas exploiter son succès.
A 21 heures, la compagnie est libérée et rejoint le bataillon qui se regroupe à Olisy.
Ainsi le 7e bataillon avait atteint son but, l'ennemi, malgré son écrasante supériorité (3 Panzerdivisionnen : 1ère au centre, 2e à l’ouest et 10e à l'est) n'avait pu s'emparer du massif du bois de Mont‑Dieu - Stonne.
En lisant les rapports allemands on se rend encore mieux, compte des résultats obtenus par l'héroïque contre‑attaque du 7e bataillon.
Voilà en quels termes le commandant d'état-major de Kielmansegg, chef du 3e bureau de la 1ère Panzerdivision, dans un article paru dans Die Wehrmacht, du 21 mai 1941, relate les combats de cette journée :
« Si, dans la Meuse, c'est aujourd'hui la grande journée de la D.C.A., sur le front c'est la journée des blindés. Nous recevons sans cesse de nouveaux rapports qui signalent l’arrivée des renforts ennemis et des concentrations de blindés et c'est avec impatience que notre division aura attendu le moment de l'arrivée de nos blindés sur la rive sud de la Meuse, où ils sont prêts à entrer en action. Nous avons maintenant deux fronts, l'un vers l'ouest derrière lequel se rassemblent les éléments qui doivent avancer dans cette direction, et l'autre vers le sud, pour repousser les attaques ennemies qui se déclencheraient et même se déclenchent déjà. L'attaque vers l'ouest trouve devant elle, comme premier obstacle, le canal des Ardennes, dont le tracé est en direction nord-est. D'ailleurs, cette attaque ne peut commencer, tant que la situation au sud restera aussi peu claire qu'elle l'est pour l'instant.
Là, de furieuses contre-attaques ont commencé. Nos pionniers défendent péniblement, mais avec succès, contre des forces blindées enne­mies le nœud important de Chémery, où la route s'infléchit vers l'ouest, en passant sur le pont encore intact du canal. La pointe de nos chars de combat se heurte, à Bulson, à des blindés français qui attaquent. C'est le premier vrai combat, chars contre chars, de cette guerre. Quelle en sera l'issue ? Après deux heures d'une lutte opiniâtre, les français évacuent le terrain, ayant perdu vingt chars. Un régiment d'infanterie, le n°.., auquel on fait interrompre son action contre une partie qui tient encore de la ligne principale de résistance sur la Meuse, arrive et continue l'attaque vers le sud, parvient engageant jusqu'à ses dernières forces, à avancer de 8 kilomètres en direction du sud en dépit de contre-attaques françaises, mais n'atteint pas, toutefois, son véritable objectif, qui était l'ensemble des hauteurs de Stonne. La pos­session de cette dernière position est très importante, elle doit garantir le flanc de mouvement que nous projetons vers l'est, tandis qu'aux mains des Français elle représenterait précisément une menace cons­tante et considérable contre ce mouvement. Il n'est pas possible même avec des éléments de reconnaissance, de pénétrer dans le bois de Mont-Dieu, au nord de Stonne, ni dans les bois de Raucourt, tant il y a là de blindés français. Le soir, le régiment qui, à part les blindés, a eu la plus lourde tâche de la journée, constitue un front défensif vers le bois de Stonne. »

IX. DÉFENSE DE LA POSITION DE VONCQ.

Constitution d’une compagnie de marche.
La journée du 15 est employée à remettre de l'ordre dans les unités. Tandis que le P.C. du bataillon et les compagnies de combat restent à Olisy, la compagnie d'échelon va s’installer à 30 kilomètres plus au sud, dans les villages de Laval et de Wargemoulin pour travailler dans de meilleures conditions, à la remise en état du matériel.
Le 16, à 11h50, le bataillon est mis à la disposition de la 71e division d'infanterie, puis, à 16h15, il passe aux ordres de la 36e D.I. avec mission d'étayer la défense de l'Aisne à hauteur d'Attigny.
Un détachement est constitué sous les ordres du lieutenant Rougier. Il comprend cinq chars endommagés mais encore capables d'un effort, formant deux sections commandées par les lieutenants Chassedieu et Jolly. A la tombée de la nuit il est dirigé sur Chuffilly pour appuyer le 18e R.I. dans la défense des ponts d'Attigny.
Le lendemain ce détachement est mis à la disposition du 57e R.I. qui défend le canal des Ardennes entre Voncq et le Chesne. Les chars sont embossés à la lisière nord-ouest du bois de Voncq, face à l'ennemi dont les lignes sont visibles à quelques centaines de mètres.
Pendant ce temps, à l'arrière, les réparations s'activent et bientôt le bataillon peut mettre en ligne onze, puis seize appareils. Une compagnie de marche est alors formée le 27 mai, sous les ordres du capitaine Mignotte.
La vie de cette compagnie est très pénible ; aussi, un système de relève est organisé, et les hommes qui descendent des lignes vont au repos à Laval et Wargemoulin.
Cette solution qui incorporait les chars dans les rangs même des premières lignes de l'infanterie rendit de grands services aux troupes de la 36e D.I., donnant confiance au fantassin, lui assurant une collaboration immédiate des chars ; elle eut, par contre, l'inconvénient de fatiguer considérablement le matériel qui ne pouvait être entretenu que d'une façon rudimentaire.
Aussi, le 1er juin, la division ayant a peu près terminé son installation défensive, cette compagnie fut‑elle, à la demande du chef de bataillon, regroupée en position d'attente à Chestres. Sa mission était dès lors ­envisagée de la façon suivante :
1° Appuyer des contre attaques rapidement montées en vue de rejeter l'ennemi sur le canal de l'Aisne, si celui-ci réussissait à créer de petites têtes de pont au sud de la ligne d'eau, soit à l'est de l'Aisne, soit entre Semuy et Attigny ;
2° Appuyer des attaques à objectif limité, soit dons la clairière des Alleux, soit dans le couloir Quatre‑Champs – Noirval - Châtillon.
Durant cette période, le bataillon dut encore fournir un détachement de 10 équipages F.T. qui, aux ordres du sous‑lieutenant Jollv, furent mis à la disposition du G.B.C. 503. Un jour particulièrement glorieux marque cependant le séjour du bataillon à Olizy. Le 2 juin, en effet, eut lieu une brillante prise d’armes au cours de laquelle furent remises par les généraux Bourguignon, commandant les chars de l'armée, et Buisson, commandant la 3e D.C.r., les récompenses valeureusement gagnés au combat du 14 mai (6 légions d’honneur, 8 médailles militaires et 92 croix de guerre).
Ainsi, presque un mois durant, le bataillon ne connut-il aucun repos. Pendant que les éléments combattants étaient en ligne la compagnie d'échelon travaillait jour et nuit à Wargemoulin, pour remettre en état le maximum de chars récupérés à la suite du combat du 14 mai.

X. 7e BATAILLON A LA DISPOSITION DE LA 3e D.C.r.

C'est au milieu de cette fièvre, que le 7 juin, par ordre n° 17956/3 du corps d'armée colonial, le 7e bataillon fut mis à la disposition de la 3e division cuirassée, dont le P.C. devait s'installer à Sémide.
Le bataillon fit mouvement dans la nuit du 7 au 8 juin, pour se porter en position d'attente dans les bois de la Femme‑Enterrée (ravin nord de la route Contreuve - Sémide) cependant que le P.C. du bataillon s'installait au village de Contreuve.
La compagnie d’échelon et les éléments sur roues des compagnies de combat restèrent à Laval et Wargemoulin où était installé l'atelier.
Dès le 9 juin, en fin de matinée, le bataillon fut alerté pour faire une contre-attaque entre Suippes et Retourne. Les cadres effectuèrent aussitôt leurs reconnaissances, car l'opération devait avoir lieu dès le lendemain à l'aube.
Chacun faisait aux appareils les derniers préparatifs lorsque, le soir même, à 23 heures, arriva un ordre urgent du corps d'armée colo­nial, mettant immédiatement le bataillon à la disposition de la 36e D.I. dont le P.C. était installé à Vouziers.
Ainsi, axé sur la contre‑attaque en liaison avec la 3e D.C.r., le 7e bataillon allait, dans la fièvre des préparatifs, recevoir une mission très délicate : contre attaquer en moins de cinq heures à 20 kilomètres de là, dans une zone inconnue et sans avoir encore pris contact avec les troupes au profit desquelles il allait travailler. Aucun obstacle n'allait cependant l’arrêter. Quand une troupe veut se battre, elle en trouve toujours les moyens. Les équipages du bataillon allaient en don­ner la preuve éclatante.

XI. ENGAGEMENT DU 10 JUIN DANS LA REGION VRIZY ‑ ROCHE AU NORD DE VOUZIERS.

Lorsque, le 9 juin, à 23h15, le commandant du 7e B.C.C. reçut l'ordre :
‑ de se rendre au P.C. de la 36e D.I. ;
‑ de mettre immédiatement ses éléments combattants en marche sur Vouziers, le bataillon comprenait : 16 chars répartis en six sections de combat :
- deux sections de la 2e compagnie (sections à 3 chars) ;
‑ deux sections de la 3e compagnie (sections à 3 chars) ;
‑ deux sections de la 1ère compagnie (sections à 2 chars), groupées en une compagnie de marche sous le commandement du capitaine Join-Lambert.
La compagnie se mit en marche sur Vouziers à 23h45 pendant que le chef de bataillon se rendait au P.C, de la 36e D.I. à Vouziers où il arrive à 0h30.
Mis au courant de la situation par le général commandant la 36e D.I., il reçut l'ordre de contre‑attaquer en liaison avec le 3e batail­lon du 5e R.I.C., les éléments ennemis qui, la veille, avaient franchi l'Aisne à Semuy et avaient atteint les bois de Vrizy, et de se porter le plus rapidement possible au P.C. du bataillon à Vrizy pour régler les détails de l'opération. Une contre‑attaque parallèle eu direction de Voncq devait être conduite avec l'appui du 4e bataillon de chars sur la rive droite de l'Aisne. L'opération combinée du 5e R.I.C. et du 7e bataillon de chars devait s'effectuer en trois bonds :
Premier bond : lisières nord du village de Roche, cote 105 ;
Deuxième bond : cotes 133 – 126 ;
Troisième bond : boucle de l'Aisne entre lisières est d'Attigny et lisières ouest de Semuy.
a) Marche d'approche.
Pendant que le commandant, accompagné du capitaine Join‑Lambert, se rendait au P.C. du bataillon d'infanterie, le lieutenant Delorme, adjoint au chef de bataillon, fut envoyé à la rencontre de la colonne de chars pour la guider. Sous un très violent tir d'artillerie, il la conduisit depuis Vouziers jusqu'à Vrizy. Un appareil (section Cassier) fut immobilisé par un obus. A 2h30, après cette marche pénible, les chars entraient dans Vrizy en flammes.
b) Déroutement du combat.
a) Dispositif au départ de la contre-attaque.
1° échelon.
A droite, en appui de la 2e compagnie du 3/5e R.I.C.
‑ section Levitte ;
‑ section Bavard.
A gauche, en appui de la 9e compagnie du /5e R.I.C.
‑ section Danne ;
‑ section Bauchneckt.
2° échelon.
Section Pierre.
Mission
1° Nettoyer les boqueteaux nord de la côte 122 ;
2° Progresser ensuite sur l'axe Roche ‑ Rilly, en situation d'intervenir à tout instant, soit sur la gauche, soit sur la droite.
La 5e section Cassier, réduite à deux appareils au départ, ne possède plus qu'un seul char, l'autre ayant été immobilisé sur la route au sud de Vrizy. L'appareil restant sera monté par le capitaine Join-Lambert
Servitude. ‑ Le ruisseau La Loire étant infranchissable, les chars passeront tous sur le pont sud de Roche (route Roche - Vrizy) imposant ainsi aux appareils un détour long et dangereux.
b) Le déroulement du combat.
Au cours de la marche d'approche depuis Vrizy, jusqu'à la base de départ (cote 112 ‑ chemin allant de la cote 112 à la côte 104) quelques résistances ennemies sont réduites. A 4h15, toutes liaisons prises avec les unités d'infanterie, les chars débouchent de la route, traversant les bois du marais de Loisy.
Premier bond : O1 - lisière nord du village de Roche, cote 105.
Favorisés par le brouillard, les chars avancent rapidement, neutra­lisant les résistances ennemies. Un avion ennemi suit à très basse altitude notre progression, la jalonnant par des fusées. Aussi, lorsque l'infanterie s'installe sur l'objectif, un violent tir d'artillerie est déclenché par les Allemands. La liaison infanterie-chars est cepen­dant assurée et sur l'ordre du chef de bataillon, la progression reprise en direction de O2 malgré un bombardement intensif. Le sous-lieutenant Levitte et son mécanicien Arnaud sont tués à Roche.
Deuxième bond : O2 - côtes 122‑126.
A l'est. ‑ Peu après le départ, la progression des chars est gênée par de nombreux coups de feux semblant provenir du plateau de Voncq. Les boqueteaux au nord de la cote 105 sont cependant neutralisés et occupés. Les îlots de résistance du 18e R.I. encerclés depuis la veille à la ferme Fontenille sont dégagés par nos appareils. Mais en dépit de plusieurs tentatives des chars, l'infanterie ne parvient pas à déboucher des bois de la côte 105. A chaque tentative elle était aussitôt clouée au sol par des tirs violents d'armes automatiques venant de Voncq où l'attaque du 4e bataillon ne semblait pas réussir. Prises sous le tir de l'artillerie, les deux sections de chars opérant dans cette région ont quatre appareils touchés et immobilisés.
A l'ouest. ‑ Les deux sections de chars suivies par l'infanterie progressent jusqu'à la cote 133 et les bois environnants qu'elles neutralisent et occupent. Cinq appareils sur six sont touchés, soit par des armes antichar, soit par l'artillerie. Deux ont une chenille coupée, un autre reçoit un obus dans le moteur, deux autres sont immobilisés par le tir de l'artillerie. Apprenant vers 9 heures, que l'attaque parallèle du 4e bataillon de chars sur Voncq avait complètement échoué, que l'ennemi s'était infiltré dans les marais de Loisy, et, qu'enfin, malgré l'interven­tion de la section du 2e échelon, il était impossible de nettoyer le bois par suite de l'absence de troupe d'infanterie en réserve, les trois chars restants sont envoyés en D.C.B. à la cote 113 avec mission :
1° De rétablir la liaison avec la division ;
2° De protéger le dégagement du bataillon.
Le rétablissement de la liaison avec la division fut pénible; sur les trois chars, un seul, celui du capitaine, réussit à traverser les lignes ennemies et à rendre compte de la situation au général commandant la 36e D.I.
Quelques instants après, le bataillon, à son tour, rejoignait nos lignes.
Les éléments restants du 7e bataillon furent regroupés vers 15 heures dans la région de Vouziers.

XII. MOUVEMENT DE REPLI DU BATAILLON.

Dès le 10 juin au soir, le 7e bataillon n'ayant plus que quatre chars, d'ailleurs incapables de combattre, reçut l'ordre de se regrouper à Laval Wargemoulin on cantonnaient déjà la compagnie d'échelon et les éléments sur roues des compagnies de combat et de gagner le lendemain le cantonnement de Brizeaux, au sud de la forêt de l'Argonne.

Journée du 11 juin.
Mouvement depuis Laval et Wargemoulin jusqu'à Brizeaux.
Le mouvement, pour échapper aux bombardements de l'aviation, s'effectue en onze rames de véhicules, se déplaçant à quinze minutes d'intervalle l'une de l'autre.
a) Itinéraire. suivi par les véhicules sur roues : La Croix-en-Champagne, Auve, Saint‑Maud-sur Auvee, Gizaucourt, Braux‑SaintRémy, Villers.en-Argonne, Passavant, Brizeaux.
b) Itinéraire suivi par les véhicules sur chenilles : Laval, Hares, Valmy, Gizaucourt, Braux-Saint-Rémy, Brizeaux.
Le mouvement est terminé à 17 heures sans incident.

Journée du 12 Juin.
La journée du 12 juin est mise à profit pour remettre de l'ordre dans les unités et vérifier le chargement des véhicules.
Dans l'après-midi les événements se précipitent.
A 13 heures, le bataillon reçoit du G.B.C. l'ordre d'envoyer un camion d'essence ravitailler les unités du 67e bataillon en panne sur la route Sainte‑Menehould - Suippes.
A 19 heures, le G.B.C. envoie l'ordre de se replier sur Loisey et convoque le commandant au P.C.
En arrivant, le chef de bataillon apprend que :
1° Les Allemands ont franchi la Marne à Chalons, dans l'après­-midi, et marchent à toute vitesse sur Vitry‑le‑François ;
2° Le P.C. de l'armée s'est replié de Verdun à Chaumont ;
3° Le P.C. du corps d'armée va se replier également.
A 2 heures, le général commandant les chars de l'armée prescrit au 7e bataillon de verser ses chars au parc de chars d'armée (élément avancé à Saint-Mihiel) et de se tenir prêt à faire mouvement pour aller percevoir d'autres appareils à l'arrière.
A ce moment le bataillon se trouve en mouvement à destination de Loisey, tous les chars étant indisponibles devront être transportés par camions ; il faudra faire deux voyages. Comme le cantonnement de Loisey est à proximité de Tronville où se trouvait le parc de chars d'armée (élément lourd), le commandent prescrit aux différentes rames de pousser jusqu'à Tronville, d'y verser les chars au parc d'armée et de se tenir prêtes à faire mouvement vers le sud.
En même temps il adresse au général commandant les chars de l'armée le compte-rendu suivant :
"En exécution de votre ordre du 12 juin, à 17 heures, les chars restants du bataillon étant tous indisponibles, seront versés au parc de chars et embarqués avec lui sur le train. Les événements survenus après la réception de votre note m'ont incité à ne pas retenir près du parc le personnel n'ayant plus de chars. Je resterai au parc jusqu'à ce que les derniers appareils soient arrivés et embarqués. Les compagnies de combat et la compagnie d'échelon sont dirigés d'urgence sur les environs de Chaumont (compagnie échelon à Andelot, compagnies de combat à Saint‑Blin)."
Signé : Giordani
Le regroupement à Tronville s'exécute assez péniblement, à cause de l'encombrement des routes ; ce n'est que le 13 juin, à 5 heures, que les derniers détachements arrivent à destination.

Journée du 13 juin.
Les camions porte‑chars, après avoir déchargé les premiers appareils en gare de Tronville, sont partis chercher les autres à Brizeaux ; leur retour est prévu pour 11 heures.
Le commandant donne l'ordre de laisser au parc des chars d'armée, sous le commandement du lieutenant Wallart, le détachement chargé de l'embarquement des chars ; la compagnie d'échelon fera mouvement à destination d'Andelot par l'itinéraire Ligny, Villers-le-Sec, Dammarie, Montiers, Efrincourt, Germay, Epizon, Busson : les compagnies de combat gagneront Saint-Blin, par Ligny-en-Barrois, Ménancourt, Mevilliers, Biencourt, Saudron, Aifontaine, Lezeville, Germay, Morionvillers, Chambroncourt, Leurville, Orquevaux, Humberville.
Cependant le chef de bataillon de reste à Tronville jusqu'à la fin de l'embarquement. A 13 heures, l'embarquement terminé, il rejoint le gros du bataillon, vérifie l'installation des unités et leur prescrit de se reposer après avoir refait les pleins des véhicules.
Puis, dans la soirée, il se rend au PC. du général commandant les chars de l'armée, à la lisière du bois de Château‑Villain (15 kilomètres sud de Chaumont) ; il y apprend que les Allemands ont dépassé Vitry-le-François et reçoit l'ordre de poursuivre, dès le lendemain matin 14, le mouvement de repli et de s'installer dans la région sud du P.C.
Revenu aussitôt à Andelot, il donne ses instructions pour le mouvement du lendemain..

Journée du 14 juin..
Le bataillon ira cantonner à Villiers et Leffonds (20 kilomètres sud de Chaumont). Départ de la première rame à 7 heures. Vers 9 heures, alors que les derniers éléments quittent le cantonnement d'Andrieu, le commandant apprend que les Allemands, suivant la vallée de la Marne, marchent sur Chaumont et ont atteint Joinville à 30 kilomètres nord­-ouest d'Andelot. Au même moment, des avions italiens viennent bombarder le cantonnement.
Le commandant Giordani donne aussitôt aux unités l'ordre de presser le mouvement, d'éviter Chaumont bombardé et de passer à l'est de la ville. Puis il se rend, sans tarder au P.C. du général commandant les chars de l'armée. Là il apprend que le P.C. se déplace et reçoit l'ordre de gagner Autun. Revenu à Leffonds, le commandant réunit les capi­taines et leur explique la situation. Il décide alors, étant donné les événements, de ne pas s'arrêter à Villiers‑I,effonds et de porter d'un seul bond les unités au sud de la route de Langres, Châtillon‑sur-Seine. Il fixe comme cantonnement : Minot, pour la compagnie d'échelon et le P.C. du bataillon ; Saint‑Broing‑les‑Moines pour les compagnies de combat. Arrivé à 22 heures, le bataillon reprend, dès 3 heures du matin, la route du sud, en vue de gagner Autun en passant par Précy‑sous‑Thil.

Journée du 15 juin.
Parties à 3 heures, les unités arrivent à l'entrée d'Autun vers 10 heures. Le commandant les y a précédées, a pris contact avec le commandant de la place d'Autun et fixé les cantonnements :
P.C. du bataillon et compagnie d'échelon : Grande-Verrière ;
Compagnies de combat : Saint‑Lerger‑sous‑Bois.
Dans la soirée un ordre du général Bourguignon, commandant les chars de l'armée prescrit que les éléments de chars doivent franchir la Loire le plus tôt possible et se regrouper à Souvigny. Cet ordre est aussitôt transmis aux unités ; le mouvement commencera le lendemain dès l'aube.

Journée du 16 juin .
Parti à 4h30, le bataillon arrive à Souvigny vers midi. Mouvement pénible à cause de l'encombrement des routes.
Dans la soirée, le 67e bataillon (commandant Valleteau), le parc d'engins blindé n° 4 (commandant Peyglet) et le parc d'engins blindés n° 2 (commandant Giraud) arrivent également à Souvigny.
Le commandant Giordani prend le commandement de l'ensemble.

Journée du 17 juin.
Dans la matinée du 17, le commandant apprend que les Allemands ont passé la Loire à La Charité‑sur‑Loire et reçoit l'ordre de se replier sur la région d'Auzances (30 kilomètres nord-est d'Aubusson). Départ : 11 heures pour la première rame. Ordre de marche : 7e, 67e, P E.B. n° 4 et P.E.B. n° 2.

Journée du 18 juin.
Dans la nuit du 17 au 18, le commandant Giordani reçoit un officier de liaison du général inspecteur des chars (capitaine Vernies), qui lui prescrit de continuer le mouvement vers le sud-ouest, premier cantonne­ment à Saint‑Léonard-de‑Noblat (22 kilomètres est de Limoges).
Départ : 5 heures; arrivée à Saint‑Léonard vers 11 heures.
Dans l'après-midi le commandant se rend au camp de La Courtine, à l'état-major du général inspecteur des chars où il reçoit l'ordre de se porter dans la région sud de Confolens et de se mettre à la disposition du colonel Baron, chargé du regroupement des différents éléments de chars.

Journée du 19 juin.
Départ à 5 heures pour la région de la Rochefoucauld, stationnement des unités :
P.C. du 7e bataillon, 2e et 3e compagnies et compagnie d'échelon : Coulgens ;
1ère compagnie : Jauldes ;
67e bataillon : Aurillac ;
P.E.B. n° 4 : Ledeffents ;
P.E.B. n° 2 : Taponnat.

Journée du 20 juin.
Ayant pris contact avec le colonel Baron, le commandant Giordani reçoit l'ordre de gagner Frayssinet-en-Gelat.
Départ : 11 heures pour le premier élément. Arrivée à Frayssinet vers 20 heures.
Itinéraire : Montbron, Rougnac, Ribérac, Mussidan, Bergerac, Montpasier, Villefranche-de‑Périgord ; Frayssinet-en‑Gelat.
Répartition des cantonnements :
7e : Freyssinet ;
67e : Les Fagettes ;
4e P.E.B. : Sabiac ;
2e P.E.B. : Cougoulac.

Journées des 21, 22 et 23 juin.
Repos. Les unités font reposer les hommes, graisser et réparer le matériel. Le 23, le commandant Giordani reçoit l'ordre de porter son groupement dans la région de Fargues, sud de Marmande.

Journée du 24 juin.
Départ à 4 heures.
Mouvement terminé à 11 heures.
Itinéraire : Fumel, Libos, Villeneuve, Sainte‑Livrade, Aiguillon, Anzex, Fargues.
Répartition de ces cantonnements :
7e bataillon : Fargues ;
67e bataillon et P.E.B, n° 2 : Caubeyre ;
P.E.B. n° 4 : Saint Julien.
Le 17e bataillon, rattaché au groupement, rejoint dans l'après-midi son cantonnement à Saint‑Léon.
Dans la soirée le groupement reçoit l'ordre de se porter le plus tôt possible dans la région ouest d'Auch.
Départ à 21h30.
Itinéraire : Nérac, Condom, Auch, Gimont, Nouga, Roulet.
Répartition des cantonnements :
7e bataillon et P.E. B. n° 4 : Puycasquier ;
17e bataillon : Marsan ;
67e bataillon et P.E. B. n° 2 : Tourrenquets, Mirepoix.

Journée du 25 juin.
Installation au cantonnement.
Nouvelle de la signature de l'armistice.

Journée du 26 juin.
Stationnement à Puycasquier. Les P.E B. n° 2 et 4 rejoignent le P.E.B. n° 101 à Lefousseret.

Journée du 27 Juin.
Le groupement va cantonner :
7e bataillon : Montbrun ;
67e bataillon : Saint‑Paul ;
17e bataillon : Caubiac‑Thil.
En outre, le 4e bataillon de chars ayant rejoint le cantonnement de Levignac, le commandement du groupement de chars sera désormais assuré par le chef de bataillon de Saint-Sernin.
Le chef de bataillon Giordani est affecté à l'Ecole des chars, comme directeur de l'instruction militaire, à compter du 1er juillet 1940. Mais l'Ecole est installée tout près, à Fleurance et le commandant Giordani peut, tout en assurant le service de l'École, continuer de s'occuper du bataillon jusqu'à sa dissolution le 31 juillet.
Encadrement du bataillon à l'arrivée à Montbrun.
Chef de bataillon : commandant Giordani.
Officier adjoint et officier de renseignements : lieutenant Delorme.
Officier adjoint technique : lieutenant Riens.
Officier des détails : sous‑lieutenant Tillot
Officier des transmissions : lieutenant Rougier.
Médecin : lieutenant médecin Fleury.
1ère compagnie.
Lieutenant David.    Sous‑lieutenant Ayoun.    Sous‑lieutenant Pierre.
2e compagnie.
Capitaine Join‑Lambert    Lieutenant Fromond    Sous-lieutenant Danne
3e compagnie.
Capitaine Mignotte     Lieutenant Héraud     
Compagnie d'échelon.
Capitaine Valude    Lieutenant Erny     Lieutenant Wallar    Lieutenant Durlrman.

CANTONNEMENT A MONBRUN ET DISSOLUTION DU BATAILLON.

Du 28 juin au 31 juillet, le bataillon cantonne dans les condition suivantes :
Etat‑major et compagnie d'échelon du bataillon : Montbrun ;
1ère compagnie : Garac ;
2e compagnie : Vignaux ;
3e compagnie : Encausse.
Une compagnie de marche est formée dès le début de juillet et mise à la disparition du bataillon Valleteau, en vue de constituer un escadron de cuirassiers. C'est le seul événement marquant de cette période d'un mois où le 7e bataillon reçut de la population civile un accueil particulièrement chaleureux. La tenue disciplinée du bataillon fut appréciée de tous, ainsi qu'a tenu à le témoigner officiellement, M. le comte de Pins, maire de Montbrun.
Dès le 16 juillet toutes mesures furent prises en vue de reverser progressivement les différents matériels au parc d'arrondissement d'Auch.

Le 31 juillet, à 24 heures, consacra la dissolution du 7e bataillon par le colonel commandant l'arrondissement d'Auch, assisté de M. l'in­tendant du département du Gers.
Ainsi prit fin l'histoire de ce magnifique bataillon dont la caractéristique a été de ramener intact tout le matériel non détruit au combat et d'avoir pu porter présent tout le personnel non disparu aux engagements du 14 mai ou du 10 juin.

CONCLUSION.

Engagé deux fois au cours de la campagne, le 7e bataillon de chars légers s'est couvert de gloire au cours de chacun de ses combats.
Le 14 mai ayant appris au P.C. de la 55e D.I. que le dispositif de la division qui tenait le secteur était rompu et que, pour enrayer coûte que coûte la progression d'une Panzerdivision, il fallait contre-attaquer, à tout prix, le plus tôt possible, le 7e bataillon de chars légers n'a pas hésité à se sacrifier.
Appuyé par le 213e R.I., à effectifs très réduits, médiocrement armé et approvisionné, il s'élance seul sur un front de 5 kilomètres et, ayant progressé sur plus de 2 kilomètres, résiste pendant quatre heures à la ruée des engins ennemis.
Un seul groupe de 75 tirant à vue le soutient. Et cependant, à aucun moment, il ne refuse le sacrifice qui lui est demandé.
Certains équipages (lieutenant Leclair, aspirant Crémieux-Bach) se jetèrent littéralement sur l'ennemi. Battu dans cette lutte inégale, par l'armement plus puis­sant de l'ennemi, le bataillon ne rompit le combat qu'à bout de forces, et de munitions, ayant perdu dans la bataille 50 % du personnel engagé et 70 % de ses appareils. Le cran des équipages partant au combat, instruits du sacrifice que l'on attendait d'eux, n'a pas faibli un seul instant. Contenant seul quatre heures durant l'assaut des engins ennemis sur un front de division, il a permis à la 3e D.I.M. et à la 3e D.C.r. d'arriver et de s'installer défensivement. C'est une nouvelle page à la gloire de l'armée qu'a écrite de son sang, le 14 mai 1940, le 7e bataillon de chars légers.

Le 10 juin, réduit à une compagnie et encore grâce au tour de force réalisé ‑ pour remettre en état le matériel éclopé ‑ par ses ouvriers, ses dépanneurs et ses équipages, c'est avec la même ardeur, avec la même foi, qu'il se lance à nouveau dans la bataille après une marche d'approche de plus de 12 kilomètres sous un très violent bombardement d'artillerie, qu'il bondit à l'assaut du dispositif ennemi ; en moins de deux heures, malgré le bombardement intensif de 62 avions et de l'artillerie, il reconquiert les objectifs assignés sur une profondeur de 7 kilomètres. La brutale réaction de l'ennemi ne réussit pas un seul instant, à émousser le cran de ses équipages qui font à nouveau l'admiration du fantassin. Par son mordant. il arrête la vague ennemie qui déferle sur Vouziers, et retarde de vingt-quatre heures son avance.
Fidèle à sa devise "Seigneur suis" dont les caractères sont gravés en lettres d'or sur son insigne frappé aux armes de Paris, il a de son sang gagné son titre de Seigneur à la bataille.
Officiers, sous‑officiers, caporaux et chasseurs du 7e bataillon de chars légers, restez fidèles au souvenir de votre magnifique unité. Vous en avez fait un bataillon d'élite. Votre foi en lui perpétuera le vivant exemple de votre force.
Vivent les chars !
Vive le 7e bataillon de chars légers

 

  1. 1940 - 6e RC
  2. 1940 - 6e BCC
  3. 1940 - 5e BCC
  4. 1940 - 4e RC jmo

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