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                          3ème Bataillon de Chars Légers


                                                      " Sans Varier "

 

 

 

 par Thierry Faucheret
 
En août 1939, lors de la mobilisation générale, le Centre Mobilisateur 503 (Versailles / Satory), issus du 503ème Régiment de Chars de Combat, mit sur pied le Groupe de Bataillons de Chars (GBC) 503 composé de deux bataillons de chars légers (B.C.C.) :
- Le 7ème B.C.L. (chars FCM 36), à partir du 1er bataillon du 503ème R.C.C.
- Le 3ème B.C.L. (chars R 35), à partir du 2ème Bataillon du 503ème R.C.C.

Origine du 3ème B.C.L. :

Le 503ème Régiment d'Artillerie Spéciale (RAS) fut formé en 1918. Il comprenait alors les 7ème BCL (AS ou compagnies 319, 320 et 321), 8ème BCL (AS ou compagnies 322, 323 et 324), et 9ème BCL (AS ou compagnies 325, 326 et 327). En 1920, il devint le 503ème RCC et rejoignit Versailles / Satory avec ses trois bataillons de chars Renault FT. En 1921, il perdit le 9ème BCL. En 1922, les deux bataillons du 503ème RCC reçurent l'appellation de I et II/503 RCC mais conservèrent les traditions des 7ème et 8ème BCL. En 1936, le I/508 RCC de Lunéville, équipé de R 35 et ayant les traditions du 3ème BCL, permuta avec le II/503 qui rejoignit Lunéville pour y être équipé de chars B1 bis. Le II/503 qui devint le nouveau I/508 formera le 8ème BCC de la 2ème DCR. En 1937, le I/503 reçut ses FCM 36. Au cours du mois d'août 1939, le I/503ème RCC (1ère - 2ème et 3ème compagnies - AS 319, 320 et 321) devint le 7ème BCL, et le II/503ème RCC (4ème - 5ème et 6ème compagnies - AS 307, 308 et 309) le 3ème BCL.

La drôle de guerre :

A la mobilisation, le 3ème BCL reçut certes des cadres de réserve et des militaires du rang disponibles mais il perdit aussi quelques cadres et chasseurs d'active qui rejoignirent des formations mises sur pied dans le CM 503 ou le CM 513 (Rouen). Il perçut des véhicules de réquisition pour compléter son parc automobile. Un petit déficit subsista en armement individuel, en matériel de campement et en vêtements de combat. Pour mieux assurer sa sécurité, notamment contre les attaques aériennes, le 3ème BCL quitta le Quartier de Satory vers la fin du mois d'août et alla cantonner dans le parc du château de Montigny-le-Bretonneux, distant d'une dizaine de kilomètres au sud-ouest, à proximité de la gare de Trappes et de la route de Paris à Rambouillet.
Au début du mois de septembre, après la déclaration de guerre à l'Allemagne, le 3ème BCL fit mouvement vers l'est de la France, les chars sur plate-forme ferroviaires, les véhicules à roues par la route. Au bout de deux ou trois jours, il s'installa dans la région de Mouzay, au château de Charmois, à trois kilomètres au sud de Stenay. Il y resta immobile jusqu'à la fin du mois d'octobre, qui fut particulièrement pluvieux. Les seules activités concernèrent l'entretien du matériel qui souffrait beaucoup dans la boue, les travaux de terrassement divers (construction d'abris, de cahutes, de chemins de rondins, etc.), l'installation de postes de DCA (mitrailleuses Hotchkiss) et l'aide aux agriculteurs locaux (battages, arrachages de pommes de terre, etc.).
Dans le courant du mois de novembre, le 3ème BCL fut transféré près de Verdun, à Haudainville, dans les casernes Obleck et Niel, où les chars et les véhicules à roues purent être mis à l'abri des intempéries, de même que le personnel, encore que le chauffage était loin de donner toute satisfaction.
Fin mars et courant avril, le bataillon participa à des exercices avec des unités d'infanterie de la 1ère Division d'Infanterie Coloniale (DIC), sur le terrain militaire de Verdun (fort de la Chaume, etc.) et dans la région de Montfaucon, Romagne-sous-Montfaucon et Eclisfontaine. Il revint ensuite dans ses cantonnements à Haudainville.

Combats sur la Meuse :

Le 10 mai 1940, lors de l'offensive allemande, le 3ème BCL se porta, par la route, dans le bois du Chênois, entre Mouzay et Baalon. Le 11 mai, il y subit des bombardements aériens. Le 12 mai, il fit mouvement, toujours par la route, vers Damvillers, à trente kilomètres au sud de Stenay. Dans la nuit du 13 au 14 mai, alors que les allemands avaient réussi à franchir la Meuse à Sedan, il reçut l'ordre de rejoindre Laneuville-sur-Meuse et de se mettre à la disposition de la 1ère DIC. Le matériel et le personnel du bataillon étaient quelque peu fatigués par les marches et les contre-marches des jours précédents (une centaine de kilomètres sur routes et chemins le plus souvent de nuit). Dans la soirée du 14 mai, le 3ème BCL tenait Beaumont-en-Argonne (douze kilomètres au nord-oust de Stenay). Sa compagnie d'échelon (CE) était déployée à Villers-devant-Dun. L'infanterie de la 1ère DIC contrôlait les hauteurs ouest et nord-ouest de Beaumont-en-Argonne.

Le 15 mai à l'aube, le 3ème BCL avait rejoint une position d'attente bien camouflée sur les lisières nord du bois de Commorgnières. Au cours de la matinée, l'infanterie de la 1ère DIC progressait sur la direction Beaumont-en-Argonne, Yoncq. Vers midi, elle se heurta à des chars allemands qui avaient franchi le ruisseau de Yoncq. Le 3ème BCL reçu l'ordre de la soutenir. Vers 15 heures, la 1ère compagnie aborda la ferme de la Thibaudine. La 2ème compagnie atteignit la ferme de la Harnoterie. La 3ème compagnie était en réserve sur les hauteurs est de Beaumont-en-Argonne, avec l'infanterie coloniale de deuxième échelon. Les chars allemands se replièrent sur les hauteurs boisées à l'ouest du ruisseau de Yoncq et s'y postèrent. L'artillerie allemande effectuait alors de violents bombardements sur le premier échelon de l'infanterie coloniale et des chars. Un peu plus tard, la 3ème compagnie du 3ème BCL reçut l'ordre de se porter sur les hauteurs est de Yoncq, en accompagnement d'infanterie, puis de poursuivre vers Pourron. En fin de journée, elle tenait, en liaison avec les fantassins, la croupe à l'ouest de cette localité, tandis que les 1ère et 2ème compagnies revenaient sur Beaumont-en-Argonne pour en assurer la couverture. Cette première journée de combat s'achevait donc "au niveau local" sur une situation satisfaisante.

Dans la nuit du 15 au 16 mai, le 3ème BCL se vit confier la mission de s'opposer à de possibles infiltrations en direction de Buzancy, en contrôlant le triangle : ferme de la Petite Forêt, ferme des Tuileries, lisières nord du bois de Pont Gérache. Aux premières heures de la matinée, les 1ère et 2ème compagnies furent envoyées vers la ferme de la Maison Blanche pour faire face à des infiltrations en direction de Buzancy. Vers midi, la 1ère compagnie fut ramenée vers le bois de Pont Gérache, la 3ème compagnie tenant la ferme de la Petite Forêt. Dans la nuit, la 2ème compagnie effectua une reconnaissance sur l'axe ferme de la Maison Blanche, Pont Gaudron.

La matinée du 17 mai fut calme. Dans l'après-midi, l'infanterie allemande, soutenue par des chars et appuyée par l'artillerie, attaqua les positions françaises. Les 1ère et 3ème compagnies du 3ème BCL contre-attaquèrent trois fois et subirent des pertes. Ces deux compagnies formèrent alors une compagnie de marche ou de manœuvre (CM) aux ordres du capitaine commandant la 1ère compagnie. La 2ème compagnie quitta la ferme de la Maison Blanche et fut dirigée vers le bois de Sommauthe, à la disposition de la 6ème DIC. Au bout de deux jours de combat, quinze chars du bataillon étaient en réparation, en panne de terrain ou détruits. Deux d'entre eux avaient sauté sur des mines françaises. Un officier de char fut tué dans sa tourelle par un tir de canon antichar de 25 des coloniaux.

Le 18 mai dans la matinée, la CM mena l'attaque de l'infanterie de la 1ère DIC sur la direction Chapelle Saint Jean Batiste, ferme de la Harnoterie, tandis que la 2ème compagnie fit de même avec celle de la 6ème DIC, en vue d'atteindre la ferme de la Thibaudine (et fond de Gravier, un ravin à l'ouest de la ferme de la Maison Blanche) et La Bagnole. L'artillerie allemande réussit à dissocier les chars des fantassins qui restèrent en arrière et épuisèrent inutilement leurs munitions. L'attaque allemande fut brisée mais les chars ne purent pas tenir les objectifs atteints sans infanterie. La CM et la 2ème compagnie décrochèrent et reprirent leurs positions de départ. Plusieurs chars embourbés durent être abandonnés après avoir été incendiés.

Le 19 mai ; la CM et la 2ème compagnie restèrent sur leurs positions, en bouchons antichars et en protection de l'infanterie.

Du 20 au 29 mai, ces deux unités poursuivirent leur mission de couverture sur la direction générale de Buzancy, dans les bois à deux kilomètres au sud de Beaumont-en-Argonne et dans ceux à trois kilomètres au nord de Sommauthe, repoussant, avec l'infanterie coloniale, quelques attaques ou infiltrations, et subissant parfois de très violents tirs d'artillerie, notamment le 26 mai dans la soirée où plusieurs victimes furent à déplorer à la CM.

Le 30 mai, la CM passa en réserve du Corps d'Armée à Nouart. LA 2ème compagnie quitta la 6ème DIC et rejoignit la 1ère DIC. Du 30 mai au 7 juin, la situation fut calme. On en profita pour remettre en état le matériel. A cette date, l'action du 3ème BCL sur la Meuse cessa. Elle avait coûté cinq officiers (deux tués et trois blessés), six sous-officiers (deux tués et quatre blessés) et dix-sept chasseurs (trois tués et quatorze blessés). Dix chars avaient été détruits ou abandonnés. Six avaient été évacués sur le Parc d'Engins Blindés.

Combats entre l'Aisne et la Marne :

Le 8 juin, le 3ème BCL fut mis à la disposition de la IVème Armée. Il fit mouvement par la route vers Machault, soit une étape de quatre-vingt kilomètres. La CM fut affectée à la 14ème DI, qui était commandée par le Général de Lattre de Tassigny et dont le PC se trouvait à Caurroy, dix-huit kilomètres au sud-est de Rethel, et la 2ème compagnie à la 2ème DI, dont le PC était à Warmeriville, Quinze kilomètres au nord-est de Reims. Le PC du 3ème BCL s'installa à Bétheniville et la CE à Saint-hilaire le Grand.

Le 9 juin, la CM fut répartie entre le 35ème RI (une section) et la 3ème DBCP (trois sections). Cette dernière unité fut chargée de dégager le village de Thuny-Trugny et de rétablir le dispositif sur l'Aisne. A cet effet, elle avait été renforcée par deux pelotons du 25ème GRDI et par une section de Chasseurs à Pied, soit au total neuf chars et soixante hommes. A la première tentative, en début de journée, les Chasseurs et les Cavaliers ne suivirent pas les chars. Pourtant on s'aperçut que les allemands avaient reflué. La seconde tentative réussit pleinement. Le dispositif sur l'Aisne fut rétabli entre Thuny-Trugny et Seuil.

Le 10 juin, la 14ème DI, soutenue par la CM, maintint ses positions sur l'Aisne. Elle fit même de nombreux prisonniers (environ une centaine). La 2ème compagnie du 3ème BCL, au sein de la 2ème DI et en soutien du 11ème GRDI, surveillait La Retourne à partir des hauteurs boisées de Neuflize. Au début de la matinée, des chars allemands furent signalés sur la crête au nord de Neuflize. Ils avaient réussi à forcer nos positions sur l'Aisne à l'ouest de Rethel. Neuflize fut rapidement investie par les Allemands. Une section de la 2ème compagnie y effectua une reconnaissance en force pour dégager les fantassins pris au piège. Après le repli de cette section, la 2ème compagnie couvrit le décrochage du GRDI vers Warmeriville.

Dans la nuit du 10 au 11 juin, le repli général au sud de la Suippe et de l'Aisne fut ordonné à la 2ème et à la 14ème DI. La 2ème compagnie quitta la 2ème DI et rejoignit Vaudétré à 16 kilomètres au nord-est de Reims. La CM resta aux ordres de la 14ème DI. Le 11 juin, la CM participa à la défense de l'Arnes puis, dans la journée, quitta la 14ème DI et gagna Saint-hillaire le Grand où elle retrouva la 2ème compagnie, la CE et le PC du 3ème BCL. Les deux compagnies ne comptaient plus qu'une dizaine de chars. Elles furent fondue en une seule Compagnie de Marche ou de Manœuvre, mise à la disposition du Corps d'Armée, en fait la 14ème DI, et plus précisément du 152ème RI.

Le 12 juin, cette nouvelle CM tenta de ralentir, notamment à hauteur de la pyramide sur la Voie Romaine à deux kilomètres au nord de Mourmelon-le-Petit, l'ennemi qui progressait sur la direction Saint-Hillaire le Grand, Châlons-en-Champagne. En fin de journée, le PC du bataillon, la CE et la CM finirent par se retrouver à Blacy, sur les lisières ouest de Vitry-le-François.

Le 13 juin, la CM dut aller vers Coole, au nord de cette ville, pour protéger le repli des unités ayant pu franchir la Marne, notamment au pont de Pogny, en direction générale du sud-ouest. Le PC du bataillon et la CE poursuivirent en direction de Troyes. A partir de ce moment, les éléments de combat chenillés et les éléments sur roue du 3ème BCL furent définitivement dissociés.
Les combats sur l'Aisne et la Marne coûtèrent un officier (blessé), un sous-officier (blessé) et deux chasseurs (un tué et un blessé). Trois chars furent détruits et un évacué vers le PEB.

Retraite vers le sud-ouest :

Entre le 14 et le 16 juin, la CM retraita sur l'axe Vitry-le-François, Troyes, Montbard, ville près de laquelle elle dut se rendre aux Allemands, après avoir détruit ses derniers chars.

Entre le 14 et le 27 juin, le PC et la CE retraitèrent sur l'axe Vitry-le-François, Troyes, Nevers, La Souterraine, Confolens, Gordon (Lot) et Auch.
Au cours de la retraite, sept officiers, dix sous-officiers et soixante-quatorze chasseurs furent portés disparus. Dix-sept chars furent perdus.