Le 12e Bataillon de Chars de Combat

sur la ligne Weygand

 

 
 
 
Le 12e B.C.C. est mis sur pied de guerre à Valence en août 1939. Il s'agit d'un bataillon de chars de combat du type alpin. Au début de la guerre il stationne à Nice, puis à Aix-les-Bains. En décembre, il est envoyé sur la ligne Maginot, près de l'ouvrage du Hackenberg. C’est encore là qu'il se trouve au 10 mai 1940 et il échappe donc au coup de faux allemand. Pendant que s'achève la bataille de Dunkerque, le 12e B.C.C. est transféré au sud de la Somme, entre Poix et Nans-au-Mont, près de la tête de pont allemande d'Amiens. Il est alors éclaté entre différentes grandes unités, la 2e compagnie rejoignant la 16e DI, tandis que la 3e est mise à la disposition de la 13e DI.

Pour lui, la vraie guerre commence le 5 juin 1940, lorsque ses trois compagnies sont envoyées en avant des forces allemandes qui viennent de forcer les passages de la Somme. A 9 heures, la 2e compagnie reçoit l'ordre d'interdire la RN 16 et le plateau nord d'Essertaux à tout engin blindé ennemi. Une mission très délicate.

« La compagnie exécute son mouvement par la voie romaine. Elle est prise à partie par les feux des chars lourds ennemis embossés à la crête Saint-Sauflieu-Oresmaux. Un char (caporal-chef Boulanjon) reçoit un obus de 75 sur la partie antérieure de la tourelle. Armement détruit, tourelle fortement endommagée. Un char (sergent Drachet) a son canon détruit par obus.»

A 10 heures, la compagnie est cependant en place et la 1ère section du lieutenant Provoost contre-attaque immédiatement au sud-ouest d'Oresmaux. Elle est immédiatement prise à partie par des Panzer III et IV, qui immobilisent deux R 35. « Train de roulement détruit, nombreux impacts sur les tourelles et organes de vision. Les équipages épuisent leurs munitions et réussissent à rentrer dans nos lignes. Le 3e char (caporal Devis), criblé de coups (calibre inférieur à 47 rentre dans nos lignes.» Les deux chars immobilisés seront ramenés dans les lignes le soir même, grâce au lieutenant Provoost. Une dernière mission vers Saint-Sauflieu permet de prendre contact avec l'infanterie française qui tient la localité.

Cette première journée de très durs combats est assez encourageante, puisque le 12e B.C.C. a contenu l'adversaire au prix de pertes modérées : un chasseur blessé et trois chars évacués sur la compagnie d'échelon (CE).

A la 3e compagnie, qui combat à proximité, dans le secteur d'Essertaux - Ailly-sur-Noye, il en va tout autrement. Le lieutenant Foucault raconte ainsi que, dès les premiers contacts avec l'ennemi (deux Panzer IV, trois Panzer III et plusieurs Panzer II), il est touché par leur tir très précis et doit se replier, le train de roulement en piteux état : un galet porteur arraché et une poulie de tension faussée. A 17 heures, sa section reçoit l'ordre de contre-attaquer une heure plus tard. Au même moment : «le char de mon caporal (caporal Villeneuve) tombe en panne de moteur (panne se produisant très fréquemment sur les chars R 35 que nous possédions, vers la 50e heure de marche).» Le char est remplacé immédiatement, mais dès que l'assaut débouche, la section est mise hors de combat par les Panzer IV.

« char du chef de section : 1 coup de 75 mm dans la boîte de vitesses (pignons à sec d'huile mais intacts, commande d'accélérateur cassée) ; char du sergent Tardieu immobilisé par des coups dans le train de roulement, chef de char tué dans la tourelle après avoir fait évacuer son mécanicien par le trou d'homme ; char du volant (sergent David) : tombé dans un trou profond en voulant se camoufler aux vues.»

Les deux sections de soutien souffrent elles aussi, mais les Allemands rompent le combat. La journée a coûté cinq officiers et sous-officiers au bataillon, ainsi que trois R 35 détruits et trois autres évacués à la CE. Il ne reste plus que huit chars à la 3e compagnie.

Le 6 juin, la 2e compagnie tient toujours le plateau d'Essertaux. Elle en conserve la maîtrise toute la journée malgré les assauts ennemis, permettant le repli du GRD 19. Les pertes sont nulles durant la journée, de même qu'à la 3e.

Le 7 juin, la 3e compagnie est en réserve, la 2e tient le bois de Bemy et repousse trois attaques d'infanterie, en épuisant presque toutes ses munitions. Trois R 35 endommagés au train de roulement par des obus antichars doivent être abandonnés.

Il en est de même le lendemain, lorsque la compagnie commence son repli vers le sud : trois chars en panne de train de roulement doivent être abandonnés. Ils sont incendiés par les équipages.

Les pannes se multiplient, puisque le 9 juin, alors que la 2e compagnie ne compte plus que cinq R 35, deux autres chars tombent en panne : l'un a ses organes de direction avariés, l'autre son demi-arbre droit de barbotin cassé. Ils sont sabordés à 7 heures du matin.

Le 12 juin, la 2e compagnie compte huit chars, dont quatre sont mis à la disposition de la 47e D.I. à Pontarmé. Ils disparaîtront dans la tourmente, près de Romorantin, tandis que le gros de la compagnie et ses quatre chars survivants terminera la campagne dans la Creuse. La 3e compagnie, quant à elle, a été encerclée près de Montdidier, le 8 juin 1940.